Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan
Autoren: Jean Teulé
Vom Netzwerk:
aux procès, les
bombardent de chats miaulants.
    Louis-Henri se
lève brutalement, portant la nouvelle Marie-Christine dans ses bras :
    — Ma
femme n’a rien à voir avec ces fous-là !
    — Rue
Saint-Antoine, devant moi, une empoisonneuse ivre s’est vantée entre deux
lampées de vin : « Quel beau métier ! Et quelle clientèle !
Je ne vois chez moi que duchesses, marquises, princes, seigneurs ! Encore
trois empoisonnements et je me retire, fortune faite ! » L’affaire
des Poisons tourne au cauchemar politique. Tout le monde à la cour administre à
chacun dans le potage, le vin ou le parfum, de la poudre à faire éternuer une
dernière fois. On atteint la lie des siècles. Racine aurait aussi empoisonné sa
maîtresse : l’actrice Mme Duparc.
    — Ça ne
m’étonne pas de lui ! À force d’écrire des tragédies. Mais
Françoise !...
    — La
Reynie a mis la main sur un véritable nid de guêpes. Il anéantit les ouvrières
mais craint de s’attaquer à la reine des guêpes : Athénaïs de Montespan.
    — Vous
délirez ! Françoise...
    — ... a
empoisonné la stupide Mlle de Fontanges aux cheveux longs qu’elle avait
inconsidérément jetée dans les bras du roi afin qu’il s’écarte de la veuve
Scarron.
    — Vous
êtes dingue !
    — Elle
lui a offert une chemise de nuit imprégnée de cyanure. Dans la nuit, le poison
cutané mêlé à la sueur est entré dans la peau de la Fontanges qui est morte le
28 juin dernier en crachant un pus horrible.
    — Calomnie !
Françoise n’y est pour rien !
    — La
jeune fille a eu le temps de jeter sa diatribe contre votre épouse :
« C’est vous qui m’avez empoisonnée ! Mais l’on vous attend,
tigresse, dans le Tartare, où sont les empoisonneurs, lieu effroyable par les
hurlements et par les grincements de dents que ces misérables font. L’on vous
mettra au rang de la Brinvilliers et des autres qui ont attenté à la vie
d’innocentes créatures ! »
    — Des
preuves ! Des preuves ! gueule le marquis.
    Apeurée,
Marie-Christine se met à pleurer. La cuisinière déboule dans le théâtre :
« Ah, là, là ! Mais qu’est-ce que vous lui faites à ce nourrisson
pour qu’il crie comme ça ? Rendez-moi cette petite ! » puis elle
s’en va tandis que le peintre poursuit son pilonnage :
    — Le roi
a ordonné qu’aucune autopsie ne soit pratiquée, ce qui montre bien que lui
aussi a des doutes : « Si vous pouvez éviter de faire ouvrir le
corps, je crois que ce serait le meilleur parti. » Mais il a commandé une
enquête. On ne connaîtra jamais le contenu exact des documents qui furent remis
à Louis concernant l’implication de la mère de ses enfants dans l’affaire des
Poisons : après les avoir lus, il les brûla de ses propres mains.
    — Et
alors ? Qu’est-ce que ça prouve ? Ce n’est pas vrai !
    — Elle ne
se débarrasse pas seulement des gêneuses. Près de chez moi à Montlhéry, dans la
chapelle de Villebousin, elle fait pire.
    — Je ne
vous crois pas !
    — Vous
voudriez assister ?

 
51.
     
     
    Par la fenêtre
d’une auberge désertée entre Paris et Orléans, Montespan, en soutane et accoudé
à une table, regarde d’abord les calmes terres pleines d’eau régulière. Un
moulin à vent gouverne les champs. Le marquis déguisé tourne ensuite la tête
vers la chapelle du château isolé de Villebousin alors que le peintre Sabatel,
assis à côté, demande :
    — Vous
n’avez pas oublié la bourse de pistoles ?
    — Non,
répond Louis-Henri, mettant la main à sa poche pour la lui tendre.
    — Pas à
moi, refuse Sabatel. C’est au moine que j’ai réussi à acheter et que vous allez
remplacer qu’il faudra la donner au dernier moment.
    — Il y
aura qui ?
    — L’abbé
Guibourg, qui présidera la cérémonie, marchera en tête. Vous ne pourrez pas le
louper : il a une figure effrayante, un visage de cauchemar. Il sera suivi
par Lesage et l’abbé Mariette puis des quatre moines en cagoule à la queue leu
leu, du plus petit au plus grand. C’est le dernier que vous remplacerez.
Lorsque vous serez installé, il faudra attendre qu’Athénaïs de Montespan
arrive.
    Le cœur de
Louis-Henri se met à battre comme pour un rendez-vous amoureux.
    — Vous
garderez toujours la cagoule bien rabattue, rappelle le peintre. Quoi qu’il se
passe, vous n’interviendrez jamais. Vous m’avez promis. Il en va de ma vie si
vous êtes dévoilé. Tiens, voici le premier
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher