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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort
Autoren: Caroline Roe
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quotidienne.
    — Pourquoi font-ils ainsi sonner les cloches ? demanda Rubèn. Nous n’avons pas ce genre de choses chez nous. Vos églises cherchent apparemment à se faire remarquer.
    — Elles n’appellent pas à la prière, lui répondit Antoni. Elles donnent l’alarme.
    Il frappa dans ses mains et écouta un instant.
    — Mateu, Pere, cria-t-il, venez ici !
    Un serviteur à moitié vêtu arriva en courant. De toute évidence, on l’avait arraché à sa sieste.
    — Le portail et les portes, Mateu.
    — Tout est bouclé.
    — Vérifie à nouveau. Il faut les barrer, y compris celles de l’entrepôt. Venez avec moi, lança-t-il à ses deux hôtes.
    Ils coururent à l’arrière de la maison, récupérèrent au passage cinq serviteurs, traversèrent la cour et pénétrèrent dans l’entrepôt.
    — Emportons tout ça dans la maison !
    Le maître et les serviteurs sortirent les objets les plus précieux pour les ranger en grande hâte dans la cave ; les invités leur prêtèrent main-forte.
    Dès qu’ils eurent terminé, les serviteurs disparurent.
    — Si vous redoutez les pirates, dit Antoni, vous êtes libres de rejoindre les serviteurs à la cave. Mais si votre curiosité vous pousse à voir ce qu’ils vont faire cette fois-ci, vous pouvez me rejoindre sur le toit.
    — Alors nous grimperons sur le toit, décida Daniel. Vous venez, Rubèn ?
     
    — Qu’est-ce qu’ils veulent ? demanda Rubèn.
    — Tout ce qui se transporte et se vend aisément, lui expliqua Antoni. C’est pourquoi je sors mes plus belles marchandises de l’entrepôt dès que sonne l’alarme. Sinon, ils cherchent des esclaves.
    — Vous prenez la chose avec calme, maître Antoni, dit Daniel.
    — Céder à la panique n’est d’aucune utilité. J’ai travaillé dur et j’ai dépensé pas mal d’argent pour protéger ma maison. Cela fait, je ne peux que monter et regarder.
    Comme ils parlaient, Rubèn s’approcha du bord du toit, se tapit derrière un petit parapet et observa avec intérêt.
    — Je présume qu’il n’y a pas de pirates à Séville, dit Antoni avec un étonnement feint. Un jeune homme de cette ville ne peut donc y être habitué.
    — Je pense qu’il a dû en entendre parler à Majorque, enchérit Daniel.
    — Regardez-le, maître Daniel. Hola, Rubèn ! À qui faites-vous signe ? Avez-vous les mêmes pirates à Séville ? À Majorque ?
    — Il faisait signe ? demanda Daniel.
    — Comment est-ce possible ? Il avait pourtant l’air de regarder quelqu’un et je l’ai fait sursauter, n’est-ce pas ?
    Rubèn sauta sur ses pieds et, après avoir lâché quelques mots incohérents, partit du toit en courant. Ses bottes claquèrent sur les marches de pierre de l’escalier.
    — Où allez-vous ? cria Antoni en s’élançant derrière lui. Il vaut mieux que vous restiez ici, ajouta-t-il à l’adresse de Daniel. Ce garçon est mon hôte et je dois m’assurer qu’il demeure en sécurité entre mes murs.
    Daniel entendit le marchand appeler Mateu, puis il se rendit de l’autre côté du toit, juste à temps pour voir Rubèn traverser la cour, ôter la lourde barre du portail et sortir à toute allure. Deux serviteurs s’élancèrent, non pas pour rattraper le garçon, mais pour clore à nouveau la demeure. Daniel regagna la partie du toit la plus proche du port. Les assaillants avaient incendié deux maisons et faisaient monter dans leurs canots deux groupes d’enfants apeurés. Par instants, il entrevoyait Rubèn, du moins le croyait-il, parmi les gens qui s’enfuyaient dans les rues.
    Moins d’une heure après que les cloches eurent donné l’alarme, les pirates regagnaient les galées.
     
    Quand les vaisseaux disparurent à l’horizon, la pluie qui ne tombait jusque-là que par intermittence s’abattit en véritables trombes. Les citadins s’en moquaient bien et ne pensaient qu’à évaluer les pertes : des enfants disparus, des biens dérobés, deux cabanes en bois qui avaient brûlé, et Rubèn était introuvable. Alors que les voisins consolaient les parents des enfants perdus, Antoni, Daniel et deux serviteurs coururent dans les rues à sa recherche. Une femme déclara voir vu un jeune étranger, fort bien vêtu, courir en direction de la plage, au sud de la ville, mais elle n’en était pas certaine. Une autre jura ses grands dieux avoir vu les pirates l’enlever et le jeter dans un canot.
    — Tu en es sûre ? lui dit Antoni. Il n’a rien d’un
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