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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort
Autoren: Caroline Roe
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La vie nous apporte bien des surprises, oui…
    — Il est miraculeux que maître Mordecai ait survécu, fit remarquer le premier juge.
    — Nullement, monseigneur. Il avait été alerté de cette éventualité, et le goût, accompagné d’un certain engourdissement de la bouche, l’a mis en alerte. Mais je suis pratiquement certain, messeigneurs, que la même main, fidèle à la recette de son maître, a préparé trois, peut-être même quatre doses de ce poison : celles qui ont tué Joan Cristià et Narcís Bellfont, celle qui a mis en danger la vie de Mordecai ben Aaron, et peut-être aussi celle qui a tué maîtresse Magdalena.
    — Pourrait-il s’agir de l’accusé ?
    — Je ne le pense pas. La personne qui se trouvait auprès de Joan Cristià quand il a été empoisonné se faisait appeler Raimon. Selon divers témoignages, ce Raimon avait des cheveux rouges et un visage angélique. Je ne puis voir le jeune homme qui est entré dans ce prétoire, mais tous ceux présents en ce lieu pourront dire si une telle description lui correspond.
    — Puisses-tu crever comme un chien et pourrir en enfer, bâtard d’aveugle ! hurla Josep.
    — Ce sont pour ainsi dire les paroles proférées en ces derniers instants par Joan Cristià, commenta calmement le médecin.
    — Pauvre Joan Cristià… fit Lucà, affligé. Quoi qu’on puisse dire de lui, il a guéri bien des gens…
    — Il semble aussi qu’il en a tué beaucoup. Ou, pis encore, qu’il a fourni à d’autres le moyen de détruire leurs ennemis et leurs rivaux.
    — Je ne puis y croire. Lui, si généreux, si intelligent. Quand est-il mort ?
    — C’était, si je ne m’abuse, le vingt-troisième ou le vingt-quatrième jour du mois d’octobre, l’année dernière, alors que Son Excellence était très malade, dit Isaac.
    — Je crois que vous avez déclaré que vous parcouriez la province à l’époque, dit Berenguer, et que vous cherchiez du travail.
    — Non, je ne voyageais pas, Votre Excellence, précisa Lucà. De la Saint-Michel en septembre jusqu’après la Toussaint, j’ai séjourné à Vilafranca de Penedés. J’ai eu la chance de travailler avec un ébéniste à qui la ville avait commandé un splendide coffre ouvragé destiné au palais royal. Il sera offert à Sa Majesté l’année prochaine. Je suis certain que des habitants se souviennent de moi : je logeais chez une veuve dont je pourrais vous donner le nom. Une femme très respectable, très honnête. À moins que le pauvre Joan n’ait été empoisonné non loin de là, je n’ai pu me trouver dans le lieu où un aussi horrible événement s’est déroulé.
    — Il n’a pas été empoisonné près de Vilafranca de Penedés, certifia Isaac. Mais je crois que le sergent de Votre Excellence, qui a soigneusement enquêté sur la mort de cet homme, pourrait bien mieux que moi témoigner sur ce point.
    Une voix s’éleva au fond de la salle.
    — Puis-je prendre la parole ?
    Le clerc murmura quelque chose aux juges.
    — Certainement, maître Mordecai, dit le premier d’entre eux.
    — Selon les lettres que j’ai reçues de Majorque, ce Josep est le fils d’une dénommée Sara, qui travaille de temps en temps dans la maison de ma parente, Perla, la mère de ma cousine Faneta. Il me rappelle beaucoup un jeune homme qui, se faisant appeler Rubèn, vint me trouver en octobre dernier pour me déclarer qu’il était le fils de Faneta. Ses cheveux sont les mêmes, mais il a grandi et porte maintenant la barbe.
    — Approchez-vous, maître Mordecai, et observez-le plus attentivement.
    Mordecai traversa la foule et se planta devant Josep.
    — Oui, c’est toi. Tu ne te fais plus appeler Rubèn. Je m’en doutais. Ce n’est pas une barbe qui va m’abuser.
    — Je ne vous ai jamais rencontré auparavant, dit Josep. Ce dont je remercie le Ciel.
    — De quel poison as-tu usé pour tuer ma cousine, Faneta, et son fils, Rubèn ? demanda Mordecai d’une voix douce. Perla m’a décrit leur fin en des termes qui indiquent clairement qu’ils ont été empoisonnés, mais comment t’y es-tu pris après avoir quitté l’île ? A-t-il fallu plusieurs jours pour les tuer ? Ou ta mère s’en est-elle chargée ? C’est pour ça que tu devais tuer maître Daniel, n’est-ce pas ? Avant qu’il raconte à quelqu’un que Faneta et Rubèn étaient morts. Parce que tu croyais toutes ces histoires de coupes et de cuillères en or, de biens familiaux
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