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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale
Autoren: Jean-François Parot
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constatation signifie quoi, dans l’ordre de notre débat ?
    — Je comprends votre perplexité, répondit Nicolas, mais il se trouve qu’un témoin qui est aussi une coupable, Marie Chaffoureau, m’a confié beaucoup de choses, dans la certitude où elle était de son impunité. Elle a beaucoup bavardé et m’a appris, en particulier, que Charlotte Galaine s’était longtemps trouvée dans l’impossibilité de faire un nœud.
    — Et alors ?
    — Quand elle y parvint, ce nœud, elle le faisait à l’envers. J’en tire les conclusions. Charlotte Galaine, j’ai le triste privilège de vous accuser de l’assassinat par étranglement d’Élodie Galaine, votre nièce.
    La vieille fille se leva, farouche.
    — Suppôt du Diable que tu as attiré chez nous, ne vois-tu pas que c’est Camille, ma sœur, la coupable ?
    Nicolas eut un sourire.
    — Ce propos, dit-il, confirme encore mon accusation. À trop vouloir prouver, on ne prouve rien. L’apothicaire, c’est Camille. Le billet du fripier, on le retrouve sous le lit de Camille. Le mouchoir, c’est Camille. Lorsqu’une chose gêne Charlotte, c’est Camille. Or, un détail infime de mon enquête m’est resté en mémoire. Lors de votre premier interrogatoire, Charlotte Galaine, vous avez évoqué des masques blancs vénitiens. Malheureusement pour vous, votre sœur, Camille, ne s’en est point souvenue et a eu l’air intrigué. S’il y avait eu complicité entre vous, jamais vous ne l’auriez contredite. Je ne prétends pas que Camille Galaine n’ait pas eu une part de responsabilité dans ce drame, mais rien ne prouve sa complicité dans le crime.
    Camille pleurait.
    — Pourquoi ma sœur m’accuse-t-elle ? demanda-t-elle dans un sanglot. Elle m’avait assuré que ce pauvre enfant était mort-né, qu’il fallait tout faire pour l’enterrer secrètement, de peur du scandale. Ce n’était que cela.
    — Nous nous égarons, dit Sartine. Concluez !
    — Messieurs, reprit Nicolas, pour compléter cette preuve, je rappelle que le matin de la catastrophe de la place Louis XV, lors de ma première visite chez les Galaine, j’ai trouvé Camille habillée et parée avec soin, alors que sa sœur n’avait d’évidence pas trouvé le temps de faire toilette. Et il est vrai que la nuit avait été longue, difficile, mouvementée, qu’il avait fallu porter un corps et habiller un cadavre… Mais, me direz-vous, les mobiles ? Il y a, bien sûr, celui de l’intérêt. Charlotte aime son frère, elle est prête à tout pour le tirer d’affaire. Il s’agit bien de faire disparaître un danger et un obstacle en la personne d’Élodie Galaine. Mais il y a un second mobile, celui qui conduit la meurtrière à assouvir une rancune et une vengeance depuis longtemps caressées. Le même témoin, dont la langue imprudente s’est laissée aller à des propos compromettants, m’apprend qu’une rivalité amoureuse a opposé les deux sœurs dans leur jeunesse. Ce fut si violent que le prétendant effrayé prit la fuite, ne voulant choisir ni l’une ni l’autre. Si Camille se complaît dans son célibat, l’autre ne s’en est jamais remise. Meurtrière d’Élodie et de son enfant, avec la complicité de la Miette et celle de Marie Chaffoureau, elle est le maître d’œuvre d’un complot domestique organisé et prémédité dans ses moindres détails. J’ajoute que la cuisinière, gardienne du foyer, n’a pas seulement pris fait et cause pour Charlotte, dans l’exécution du crime que nous venons d’évoquer, mais qu’elle est aussi l’auteur de l’attentat contre Naganda. À bien y réfléchir, elle était la seule à pouvoir accéder à la mansarde de l’Indien, proche de sa propre chambre où elle s’était retirée pendant la séance que vous savez… Pour elle, Naganda était le mauvais génie qui avait jeté opprobre et discrédit sur la maison Galaine. Son meurtre visait aussi à relancer la thèse de la jalousie pour compromettre les jeunes gens de l’entourage. Reste, qu’il serait logique de s’interroger sur le rôle de M. Charles Galaine, marchand pelletier. N’est-il pas coupable sans l’être, complice sans l’être et responsable sans l’être du terrible destin de sa nièce ? La justice devra trancher. Voilà, messieurs, j’en ai achevé.

    Le silence qui s’était abattu sur la salle d’audience n’était troublé que par les pleurs de Camille Galaine. Charlotte murmurait des mots sans suite et Marie
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