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Le dernier vol du faucon

Le dernier vol du faucon

Titel: Le dernier vol du faucon
Autoren: Axel Aylwen
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apporta aussitôt un brancard de solides bambous et une douzaine d'hommes y placèrent le tigre mort. Ils le portèrent à travers la foule admirative puis, après s etre prosternés devant leur seigneur, déposèrent la dépouille de l'animal au pied de l'estrade.
    Joignant gracieusement les mains devant son visage, le puissant visiteur baissa les yeux vers le tigre en
    esquissant un signe de remerciement. Les cinq mahouts survivants s'approchèrent à leur tour et se prosternèrent sur les coudes et les genoux, la tête respectueusement baissée, les mains jointes au-dessus du front.
    Dévoré de curiosité, le plus hardi d'entre eux glissa à travers ses doigts entrecroisés un regard vers ce bel étranger. Sa chevelure semblait normale - n'était-elle pas noire et raide comme celle de tous les Siamois? - et sa peau d'un beau hâle clair ne déparait pas avec certains représentants de la race locale. Mais la ressemblance s'arrêtait là. Le nez de ce seigneur était droit et fin, et son corps, bien que parfaitement proportionné, affichait une stature des plus imposantes. Quant à ses yeux, ils avaient la couleur des noisettes sauvages qui poussent dans la forêt et ils brillaient d'une lueur singulière.
    Il leur rendit leur salut en joignant lui aussi les mains devant son menton, juste un peu au-dessous du visage ainsi qu'il convenait à son rang élevé. Tous se sentirent honorés car il se dégageait en effet de lui une aura de force et de dignité qui les impressionnait tous. Et son geste fut si naturel qu'ils avaient peine à croire qu'il s'agissait réellement d'un farang.
    « Vous avez bien rempli votre rôle, mahouts. Puisse le Seigneur Bouddha guider en toute sécurité l'âme de votre brave compagnon vers son prochain cycle de vie. »
    Bien que né sur une lointaine île grecque, Constantin Phaulkon, devenu maintenant Grand Barcalon, parlait un siamois sans reproche.
    Il se tourna vers son assistant prosterné à son côté. «Vitoon, veille à ce que la crémation du corps soit accomplie avec toute la solennité nécessaire. J'allumerai moi-même le bûcher funéraire. Informe-toi également de la situation de sa famille. Si ses parents dépendaient de son soutien, fais en sorte qu'ils ne manquent de rien jusqu'à la fin de leurs jours.
    - Je reçois vos ordres, Puissant Seigneur. »
    Les villageois commencèrent à se disperser. Ils avançaient, le torse incliné, veillant à ce que leur tête
    ne se trouve à aucun moment plus élevée que celle du Barcalon. Car il était le Premier ministre du Siam, un illustre dignitaire jouissant de quinze mille marques de dignité. Aucun d'eux n'oublierait jamais ce jour où il avait accosté la rive, honorant de sa visite leur humble village au bord du fleuve.
    Le kamnan, chef du village, un homme aux cheveux gris coupés court, son corps brun et décharné ployé jusqu'à terre en signe d'humilité, s'approcha humblement et lança un ordre pour que six vigoureux villageois emportent sur leurs épaules l'estrade du Barcalon jusqu'à sa maison. La procession se mit en mouvement et il marcha respectueusement à côté, fier de cet honneur.
    Le village de Ban Klang, une agglomération de huttes de bois montées sur pilotis, avait été fondé un siècle plus tôt dans les mangroves infestées de crocodiles, le long du fleuve Tenasserim. On n'y comptait pas beaucoup d'habitations mais elles occupaient un espace stratégique sur la seule route praticable traversant l'étroite bande de terre qui séparait l'océan Indien de l'océan Pacifique. A mi-chemin, Ban Klang constituait une étape commode sur cet axe de communication vital que représentait la route terrestre reliant Mergui - premier port de la côte occidentale siamoise - à la florissante Ayuthia, la capitale, à plus de soixante milles en amont du golfe du Bengale.
    Phaulkon s'était rendu à Mergui pour réprimer une sanglante révolte de la communauté musulmane et pour installer son ami Thomas Ivatt sur le siège de gouverneur de cette importante province. Après six jours de voyage avec les cent hommes de sa suite, il se réjouissait de ce repos et de la distraction offerte par le kamnan. Il leur restait encore à parcourir durant six autres jours une route difficile - trois sur des fleuves à demi navigables, trois à dos d'éléphant - avant de pouvoir contempler les flèches d'or de leur bien-aimée Ayuthia et d'être enfin de retour chez eux.
    Phaulkon abaissa son regard vers le kamnan attentif qui
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