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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche
Autoren: Arlette Cousture
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faire ?
    – Tu veux pas ?
    Blanche se raidit. Elle n’avait jamais accepté
qu’il y eût un détenteur de l’autorité dans sa maison.
    – Clovis, je te demande pas ta
permission. Je te demande ce que tu en penses.
    C’est ça que j’étais en train de te dire avant
que tu me coupes la parole. J’en pense que je suis d’accord. Ça fait qu’on va
chercher, aujourd’hui, quelqu’un de fiable pour garder les filles, c’est tout.
    Blanche lui sauta au cou, s’excusant et le
remerciant à la fois. Clovis partit pour le travail en promettant de trouver
une bonne personne. Quand il rentra le soir, il avertit Blanche qu’une dame
devait se présenter vers huit heures.
    – Déjà ?
    – C’est la tante d’une de nos employées.
À ce qu’on me dit, c’est une vraie perle .
    La personne ressemblait en effet à une perle et Blanche partit deux jours plus tard.
Aussitôt arrivée à Saint-Stanislas, elle courut presque chez sa mère.
    – Moman ! Mais qu’est-ce que vous
avez ?
    – L’âge, Blanche. Tout ce que j’ai, c’est
des années.
    Blanche sortit sa trousse médicale, que Clovis
lui avait discrètement suggéré d’emporter, et elle ausculta sa mère qui
ricanait à cause du froid du stéthoscope.
    – Cessez de rire, moman. J’entends rien.
    – As-tu l’impression que mon cœur va te
dire ses secrets ?
    – Non, mais votre cœur a un méchant
murmure.
    – Je sais ça depuis des années, Blanche.
    – Pis vous êtes allée en Abitibi quand
même ?
    – C’est peut-être pour ça que je suis pas
encore morte.
    – Ha ! dites donc pas de niaiseries.
    Blanche fit un examen complet et crut que son
cœur allait exploser. Il n’y avait plus rien, chez sa mère, qui fonctionnait.
Elle téléphona au médecin de Saint-Stanislas pour lui demander de passer.
    – J’ai vu votre mère la semaine dernière.
Elle a déjà eu tous les résultats.
    Blanche ne voulut pas montrer qu’elle était
dans l’ignorance totale.
    – C’est quoi le pronostic, docteur ?
    – Ça dépend. Si c’est son cœur qui lâche
le premier, ça peut être n’importe quand. Mais
si elle endure le martyre de son cancer du rein, elle peut vivre jusqu’à Noël.
    Blanche s’empressa de téléphoner à Clovis.
Elle pleurait de ses nouvelles.
    – Je redescends demain, avec elle.
Peux-tu voir à ce qu’on mette les deux filles dans la même chambre ? Peux-tu
essayer de trouver un lit pour moman ?
    – C’est déjà fait, Blanche.
    – Quoi ?
    – C’est déjà fait. On a déplacé les lits
ce matin, aussitôt que tu es partie. Pis j’ai communiqué avec la gare de
Saint-Stanislas. Le mobilier de chambre de ta mère va être dans le même train
que vous autres. Tu peux t’occuper de le faire préparer ?
    – Clovis ?
    – Oui.
    – Comment est-ce que tu savais ?
    – Moi aussi, Blanche, je connais
l’écriture de ta mère. Pis je te connais. Tu vas toujours être ma garde-malade
préférée. Pis tu vas toujours être la fille de ta mère. À demain, Blanche.
J’vas être à la gare avec un camion.
    – À demain, Clovis. Clovis ?
    – Oui.
    – Je t’aime.
    Émilie essayait de se tenir droite, serrant
dans ses mains son petit sac fleuri du crin de sa Tite. Le mal qui envahissait
son dos l’empêchait de voir disparaître la
gare de Saint-Stanislas. Blanche la couvrit et plaça un oreiller sous ses
reins. Émilie s’agita, agacée.
    – Cesse de me dorloter pis enlève-toi
donc de devant la fenêtre. Je veux voir la Batiscan.
    Confuse, Blanche s’assit et suivit le regard
de sa mère.
    – J’aurais aimé ça qu’on soit le 9 septembre. J’ai jamais vu la Batiscan aussi belle
que le 9 septembre 1901.
    Blanche hocha la tête, refoulant ses larmes.
Sa mère, encore, pensait à son père ; au jour de son mariage.
    « Ovila, ta grande mule vient enfin de
prendre son dernier train. Quand on va me remettre dedans, je n’aurai pas
conscience, je le sais. Je me meurs, Ovila. Je ne peux même pas dire que ça me
fait de la peine. Je ne peux même pas dire que je voudrais que tu sois avec moi
à me tenir la main. Je pense que ça me ferait plus de mal que de bien.
J’imagine que tu vas me survivre quelques années. Après tout, avec tes deux ans
de moins, tu es encore une jeunesse, toi. Mes amis, pâpâ, attendez-moi. »
    « Moman, pourquoi est-ce que vous nous
avez pas dit que vous étiez aussi malade ? Vous avez dû souffrir le
martyre dans votre classe d’Abitibi.
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