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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines
Autoren: Paul C. Doherty
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l'oriflamme. Les champions abaissent leur
visière, couchent leur lance et lèvent leur bouclier. Les montures s'élancent
dans un menaçant grondement. La charge commence, d'abord lente, puis le cœur
bat plus vite alors que la terre se met à trembler et que les combattants se
penchent l'un vers l'autre dans une lutte à mort. Il en fut ainsi. Je ne me
souviens que de ce qui est important, de ce qui excite ma mémoire. Imaginez que
vous suiviez un sombre couloir aux murs de pierre qui sonnent le creux. Vous
vous arrêtez pour regarder derrière vous. Vous voyez les ténèbres mais votre
regard est attiré par les torches à la lumière dansante, par l'éclat qu'elles
jettent. Il en allait ainsi de ma vie, de mon époque. Le péril ne menaçait pas
à chaque instant. J'étais en règle générale plongée dans une fastidieuse liste
de corvées banales à accomplir. J'avais l'œil sur l'office, m'assurais que les
cuisiniers et les bouchers achetaient de la viande de qualité et du poisson
frais. Je me rendais à l'abattoir pour contrôler que les cailles, les perdrix
et les faisans étaient préparés et conservés comme il faut. Je vérifiais que
l'on brûlait bien les vieilles jonchées et que l'on parsemait d'herbes
aromatiques celles que l'on venait de couper. La buanderie était aussi de mon
ressort : il fallait que le linge de la garde-robe et celui de la chambre
soient lavés à la perfection et bien rangés dans des armoires, des coffres et
des arches. Je m'occupais des pétitions : permission demandée par un homme
de créneler les murs de son manoir ; lettre de protection pour un marchand
se rendant à l'étranger ; pardon pour les coquins qui avaient commis des
crimes et désiraient se racheter en servant dans l'armée en Écosse ;
octroi d'offices et de bénéfices, de sauf-conduits des négociants étrangers
afin qu'ils puissent circuler en toute sécurité depuis Douvres. Je tenais les
comptes de l'épicerie, ceux de la dépense et du garde-manger. Et, par-dessus
tout, je soignais moult maux, y compris ceux de ma maîtresse, que ses menstrues
faisaient toujours souffrir. Je la traitais alors avec de la sanguisorbe, de la
marjolaine et de la camomille. Elle souffrait aussi d'urticaire, legs de ses
humeurs dérangées dans son enfance. Je lui appliquais de l'eau savonneuse et
lui faisais prendre des potions spéciales extraites de simples. Je veillais
aussi à la santé des autres : catarrhe, crampes d'estomac, coupures,
contusions et blessures. Dans les cas les plus sérieux ou lorsque j'hésitais,
je recommandais de consulter les médecins de St Bartholomew ou de St Mary
Bethlehem. Après avoir taillé ma plume à mon goût, je tenais le rôle de clerc
dans la chancellerie privée de la reine ; ou, sous la protection de
Demontaigu, je portais ses messages confidentiels dans différents quartiers de
la ville. J'adorais ces commissions où, dissimulés sous nos capuchons, nous
nous arrêtions dans une taverne de Londres, Le Cygne en gloire , Le
Rayon de miel ou La Cloche de Jérusalem . Je bavardais alors comme
une enfant. Demontaigu me prêtait une oreille attentive. Il lui arrivait de
m'effleurer. Je lui rendais cette caresse. Il n'évoquait que rarement sa
prêtrise. Il mentionnait parfois sa soif de silence, d'une vie normale et
paisible loin de l'agitation de la Cour. On le prenait pour ce qu'il était :
un clerc ayant reçu l'ordination. Il célébrait avec discrétion la messe du
petit matin, juste après l'aube, quand les cloches du palais et de l'abbaye
retentissaient. Je m'agenouillais sur le prie-Dieu et regardais ces mains qui
tenaient le pain de vie ou le calice sacré. Je baissais la tête et rougissais
en pensant à mes fantasmes de la nuit précédente. Deus meus  ! Les
larmes me brûlent les yeux. Mon cœur saigne rien qu'à cette perte, à ces
souvenirs doux-amers.
    Toujours est-il
que le tournoi allait commencer. Les lices étaient prêtes, les adversaires
sortaient de l'ombre, les coups d'estoc et de taille des sanglants combats
secrets étaient presque imminents. C'est ainsi qu'à la veille de l'Annonciation
en l'an de grâce 1308, tout au fond du domaine royal du palais de Westminster,
le carnage fit irruption dans le champ de la vie. (Je ne me hâterai point mais
décrirai les événements tels qu'ils se sont passés.) En cette journée froide et
lugubre, Isabelle et moi étions cloîtrées auprès de la reine douairière
Marguerite, tante de ma maîtresse, sœur de
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