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Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice
Autoren: Andrea H. Japp
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que le duché de Bretagne ne revienne pas, par alliance, à la famille de Valois qui a tant œuvré pour sa paix. D’autant… d’autant qu’indirectement Jean II aurait pu avoir maille à départir 4 avec notre bien-aimé souverain.
    Un clignement de paupières nerveux indiqua à Nogaret la gêne que ressentait le frère du roi, qui vida d’un trait le verre qu’il venait de se servir et goba deux pâtes de fruit. D’un ton qu’il tentait de raffermir et de garder léger, il s’enquit :
    — Maille à départir ?
    — Oui-da, une effroyable affaire de meurtres d’enfants en la seigneurie de Nogent-le-Rotrou, du duc de Bretagne. Fort heureusement, l’une des… grandes oreilles…
    — L’une de vos mouches ? le coupa Valois d’un ton acerbe.
    — Quel vilain terme, monseigneur. Il me faut bien employer moult informateurs pour rendre le meilleur service au roi, votre frère, susurra Guillaume de Nogaret. Bref, l’une de ces grandes oreilles m’a pleinement rassuré : l’odieux assassin fut bellement occis… enfin, « bellement » est un abus de langue. Son agonie fut longue et épouvantable, comme de mérité… Bien sûr, il parla.

    Mgr de Valois le considéra, le regard méfiant, cherchant la signification de sa dernière allusion. Nogaret venait d’obtenir ce qu’il était venu chercher : la certitude que le frère du roi n’avait ni commandité, ni même encouragé ces ignobles assassinats.
    Sans doute avait-il sauté sur l’occasion d’utiliser les victimes pour déstabiliser Jean II en sa seigneurie, laquelle formait une détestable, mais très prospère enclave au milieu de ses terres du Perche et de l’Alençonnais. Sans doute avait-il misé sur le mécontentement populaire, relayé par la mère abbesse des Clairets, Mme Constance de Gausbert, amie de son épouse et cousine germaine du pape. Un puissant encouragement pour Philippe le Bel, qui n’aurait pas hésité à écarter Jean de Bretagne de la seigneurie de Nogent afin de la remettre à son frère. Après tout, Jean II tenait trop à la bienveillance du roi à son égard pour provoquer son ire en lui tenant tête et aurait cédé en échange de compensations. Valois avait usé d’un stratagème somme toute bien habituel.
    Au fond, Nogaret l’admettait, en dépit de ses préventions contre Charles, la conviction que ce dernier n’avait pas trempé dans si vile affaire le soulageait. Quant au reste, à ses incessants calculs afin de s’enrichir ou de colmater 5 l’hémorragie profuse de ses deniers, messire de Nogaret se faisait fort de ne jamais relâcher sa surveillance. En dépit des rapports alarmants concernant la fécondité de la jeune Isabelle, sans doute son père Charles espérait-il la voir bientôt accéder à la couronne ducale aux côtés de son époux. Rapports que Nogaret avait obtenus à grands frais d’une des ventrières 6 qui entouraient la très jeune femme. Si Isabelle parvenait à produire un enfant, Nogent-le-Rotrou tomberait plus ou moins dans l’escarcelle de Valois à ce moment-là. Ne restait entre lui et ladite seigneurie qu’Arthur II, beau-père de sa fille.
    L’affaire se terminait donc. Une douzaine de petits miséreux avaient été massacrés, pour rien. Quelle importance ? Aucune. Toutefois, messire de Nogaret n’allait pas perdre une occasion de troubler la digestion de Charles de Valois en lui laissant entendre qu’il venait d’engranger un autre pénible secret pouvant lui porter tort, un jour, le cas échéant. De plus, l’impie arrogance d’Adelin d’Estrevers suffoquait Nogaret de dégoût et de rage froide. Vaurien qui avait usurpé la place de Dieu, en massacrant Ses agneaux par cupidité, indifférence et pour plaire à Mgr de Valois. Le damné devait payer.

    — Velours que ce vin, commenta messire de Nogaret en reposant son verre après une petite gorgée. Monseigneur, je vous avoue mon encombre. Qu’est une douzaine de petits miséreux, me rétorquerez-vous, d’autant que la plupart seraient de toute façon morts de faim, de maladie ou d’un mauvais coup de ruelle ? Toutefois, la longue oreille qui m’a si précieusement renseigné a… comment dire, évoqué une main de puissance derrière cette sombre histoire. Il semble que le meurtrier véritable n’était pas un simple maudit dégénéré.
    Valois déglutit avec peine et demanda :
    — Vraiment ?
    — Si fait. Il semble qu’il ait été… encouragé et rémunéré pour ces effroyables
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