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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe
Autoren: E.M. Remarque
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arrivé quelque chose. »
    Sa voix se brisa.
    « Il faut… Tout de suite…
    –  Jeanne, dit Ravic avec impatience. Le temps de jouer la comédie est passé. Tu m’as fait cette scène une fois, et j’ai marché. Cette fois, je ne marche pas. Adresse-toi ailleurs. »
    Il raccrocha sans attendre la réponse et essaya de se rendormir. Il n’y parvint pas. Le téléphone tinta de nouveau. Il ne bougea pas. La sonnerie continua de retentir sans arrêt dans l’obscurité et le silence. Il jeta son oreiller sur l’appareil. La sonnerie étouffée se prolongea pendant quelques minutes, puis s’arrêta.
    Ravic attendit. Plus rien. Il se leva et prit une cigarette. Le goût en était désagréable. Il l’éteignit. Le reste du calvados était sur la table. Il en but une gorgée, puis reposa la bouteille. Du café, pensa-t-il. Du café chaud. Du beurre, des croissants frais. Il connaissait un bistrot qui ne fermait jamais.
    Il regarda sa montre. Il n’avait dormi que deux heures, mais sa fatigue avait disparu. Inutile, maintenant, de se laisser reprendre par le sommeil, pour se réveiller plus tard tout engourdi. Il alla dans la salle de bain, ouvrit le robinet de la douche.
    Il entendit du bruit. Était-ce encore le téléphone ? Il ferma le robinet. Non, quelqu’un frappait à la porte. Il mit sa robe de chambre. On frappait de plus en plus fort. Ce n’était certainement pas Jeanne. Le verrou n’était pas mis, elle serait entrée. Il attendit encore un instant. Si c’était la police…
    Il ouvrit la porte. Un homme qu’il ne connaissait pas était là. Un homme en smoking, dont la silhouette lui était vaguement familière…
    « Docteur Ravic ?
    –  Que voulez-vous ? dit Ravic, au lieu de répondre à sa question.
    –  Êtes-vous le docteur Ravic ?
    –  Que venez-vous faire chez moi ?
    –  Si vous êtes le docteur Ravic, il faut que vous veniez tout de suite chez Jeanne Madou.
    –  Vraiment ?
    –  Elle a eu un accident…
    –  Quelle sorte d’accident ? demanda Ravic avec un sourire incrédule.
    –  Avec un revolver… répondit l’homme. Le coup est parti…
    –  Est-elle blessée ? » dit Ravic avec ironie.
    « Elle aura fait semblant de se suicider, pensa-t-il ; pour effrayer ce pauvre imbécile. »
    « Elle se meurt ! dit l’homme d’une voix éteinte. 11 faut que vous veniez ! Elle se meurt ! Je l’ai tuée !
    –  Hein ?
    –  Oui… j’ai… »
    Ravic avait déjà enlevé sa robe de chambre, et s’habillait rapidement.
    « Avez-vous un taxi, en bas ?
    J’ai ma voiture… »
    Ravic s’empara de son veston, de sa trousse, ramassa ses chaussures, et se précipita hors de la chambre.
    « Je finirai de me vêtir dans la voiture. Venez vite… »
     
    L’auto fonça dans la nuit opaque. La ville était obscurcie. Il semblait qu’il n’y avait plus de rues… Seulement l’espace brumeux d’où émergeaient çà et là les lumières bleues des postes de défense passive.
    Dans l’auto, Ravic finit de se vêtir. Son regard était perdu dans la nuit. Inutile d’interroger l’homme qui conduisait. Toute l’attention de celui-ci se concentrait sur la route à suivre, sur les obstacles à éviter. Il ne pouvait parler ; il était simplement capable de conduire, d’éviter les accidents, et de ne pas s’égarer dans l’obscurité. « Quinze minutes de perdues, songeait Ravic, quinze minutes au moins.
    –  Plus vite, dit-il.
    –  Je ne puis… Je n’ai pas le droit d’allumer les phares.
    –  Allumez-les tout de même ! »
    L’homme obéit. Aux carrefours, des agents tentèrent de les arrêter. Une Renault, éblouie par les faisceaux lumineux, manqua de les heurter.
    « Continuez, cria Ravic, plus vite. »
    Devant la maison, la voiture s’arrêta brusquement. L’ascenseur était là. La porte était entrouverte. À un des étages supé rieurs, quelqu’un sonnait furieusement. Dans sa précipitation, l’homme avait probablement oublié de refermer la porte. Heureusement, pensa Ravic. Quelques minutes de sauvées.
    L’ascenseur montait lentement. Il s’arrêta au quatrième. Quelqu’un ouvrit la porte.
    « Qu’est-ce qui vous a pris de garder l’ascenseur si longtemps ? »
    C’était l’homme qui sonnait avec tant d’insistance. Ravic le repoussa et referma la porte.
    « Laissez-nous ! Il faut que nous montions d’abord ! »
    L’ascenseur continua sa montée lente, et enfin s’arrêta. Ravic ouvrit sans perdre
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