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L'Amour Courtois

L'Amour Courtois

Titel: L'Amour Courtois
Autoren: Jean Markale
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de la volonté du haut clergé. Celui-ci,
par contre, est au sommet de la pyramide. Il fait et défait les rois, on l’a
bien vu lorsqu’il s’est agi de passer de la dynastie carolingienne à la dynastie
capétienne. En France, parmi les douze pairs, se trouvent six évêques ou
archevêques. Le haut clergé se politise de plus en plus, participe à la vie des
états – si tant est qu’on puisse parler d’états au sens moderne du mot pour
cette époque – et se soucie peu de spiritualité ou de culture. Cela, c’est bon
pour les moines : ils n’ont que cela à faire.
    À vrai dire, les moines de toute obédience ont profité de l’aubaine
qui se présentait à eux. Ils se sont réellement occupés de spiritualité et de
culture, et c’est grâce à eux que la mentalité a commencé à changer.
    En tant que dépositaires du savoir, celui-ci englobant aussi
bien les sciences et les arts que la tradition proprement religieuse, les
moines du XI e  siècle ont non seulement
conservé le patrimoine culturel de l’Occident, mais ils l’ont fait vivre, ils l’ont
prolongé et mûri : ce que l’on a coutume d’appeler Moyen Âge est leur fait.
C’est une réalité historique incontestable.
    Il va sans dire que, dans l’optique du temps, les
disciplines intellectuelles ne sont point soumises à la spécification. Être
philosophe suppose avoir une connaissance encyclopédique et aussi synthétique
de tout ce qui est connu. Être philosophe, c’est non seulement raisonner sur
les causes et les effets, comme aurait dit Pangloss, mais encore intégrer la
vie culturelle à la vie spirituelle : l’une ne va pas sans l’autre. C’est
un point essentiel à débattre si l’on veut comprendre quelque chose à la
mentalité de ce Moyen Âge.
    Cependant, au XI e  siècle
de notre ère, apparaît une réalité aveuglante, tellement aveuglante que
personne ne l’avait encore vue, à savoir l’existence de la femme à côté d’un
être masculin. On dira que ce n’est pas nouveau, et que l’humanité en a eu
conscience depuis l’aube des temps. C’est sûr. Mais ce qui est inédit, c’est
que cela se passe dans une société chrétienne essentiellement bâtie pour des
mâles, par des mâles, une société qui n’admet les femmes que pour ce qu’elles
sont, c’est-à-dire des êtres inférieurs. Le message de saint Paul, déformé par
les Pères de l’Église, a été reçu, et il a été appliqué. Au début du XI e siècle, plus que jamais, la femme est la servante
de l’homme en ce sens qu’elle aide l’homme à
parvenir à la plénitude.
    Or, la prise de conscience qui se manifeste à ce moment-là, du
moins dans certains milieux qui ont le temps de se poser des questions, est
absolument double : d’une part, sur le plan du déroulement quotidien de la
vie, la femme est souvent héritière d’un domaine ou d’une fortune, donc intéressante parce qu’elle représente une puissance
économique sans laquelle l’homme ne pourrait accomplir la mission divine dont
il s’arroge l’exclusivité ; d’autre part, les théologiens et mystiques qui
refusent toute influence de la mystérieuse Marie de Magdala sur le Christ Jésus,
commencent à s’apercevoir que ce même Christ Jésus a pris corps dans le ventre
d’une femme à laquelle il doit son humanité, donc son incarnation en tant que
fils de Dieu chez les hommes. Ces théologiens et mystiques n’étaient pas assez
sots pour ne pas trouver dans ces constatations des éléments contradictoires. D’où
une assez belle confusion quant au concept de la Theotokos  :
en un mot, a-t-elle copulé avec Joseph ou a-t-elle été fécondée par l’Esprit-Saint
en dehors de tout contact physique ? On sait comment l’Église catholique
romaine a répondu : Marie, mère de Dieu, est toujours vierge. Le tout est
de savoir ce que le mot vierge signifie, mais
comme personne ne l’explique réellement, on peut toujours se perdre dans les
méandres de l’étymologie et de la spéculation. Et si l’on en n’est pas encore
au dogme de l’Immaculée Conception (il fallait bien aller encore plus loin pour
justifier une virginité physique et une prédestination), on en est réellement
au stade le plus primaire qui consiste à admettre le rôle maternel de Marie
tout en lui refusant un quelconque rôle sexuel. Pauvre Joseph ! pourtant, dans
les généalogies du Sauveur, on s’arrange pour prouver qu’il était lui aussi
descendant de David.
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