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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau
Autoren: Mireille Calmel
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s’offrait sans vergogne. Il se dirigea vers une table dans le fond de la salle, dans le brouhaha et la fumée que dégageait en coulant la graisse d’un porcelet embroché au-dessus de la braise.
    Il lui déplaisait que Marie le sache dans un de ces endroits. Il aimait boire, c’était un fait, il en avait pris la fâcheuse tendance durant ces années où il n’espérait que laver le souvenir de son amour perdu. Il l’avait gardée malgré son abdomen qui avait enflé. La vérité était qu’en ces lieux peu fréquentables pour gens de bien se trouvait toujours quelqu’un dont l’histoire ou les contes assouvissaient sa soif plus exigeante encore de connaissance. Il avait rencontré là des alchimistes à la recherche de Satan pour mieux approcher Dieu, des guérisseuses, des faiseuses d’anges 5 autant que des catins. Devant un verre, ils se livraient et lui confiaient leur savoir. Philippus eut tôt fait de repérer l’homme attablé. Il s’avança résolument vers lui.
    Celui-ci le reconnut et le salua. Il était seul. Philippus tira une chaise et s’assit en face de lui, faisant signe à une servante d’apporter un pichet de vin supplémentaire.
    —  Te voici généreux, le Médicus ! remarqua l’homme avec un accent prononcé.
    Il était mat de peau et Philippus savait de lui ce qu’on en disait : il était hébreu, respecté, se nommait Lévi et s’intéressait à son héritage. Cela ne l’avait pas frappé lors de son arrivée, mais cet attrait prenait désormais tout son sens.
    —  J’ai un service à te demander, dit-il sans préambule, peu désireux de s’attarder à une conversation qui pouvait être épiée. Tu sais lire l’hébreu ancien, n’est-ce pas ?
    L’homme acquiesça du menton, une lueur dans son regard brun et racé.
    —  Je possède un texte qu’il me faut traduire, continua Philippus, certain de sa curiosité.
    —  Je pourrai le faire, si tu me paies bien, répondit Lévi sur un ton supérieur qui déplut à Philippus.
    —  Tu auras ton content, mais tu dois me garantir la plus grande discrétion.
    —  Sur ma foi, le Médicus, je serai plus muet qu’une tombe.
    —  Viens chez moi demain, décida Philippus. Seul. Tu estimeras la valeur de ce que tu auras à traduire sur place et seras payé en conséquence. On prétend aussi que tu parles et comprends le français. Est-ce vrai ?
    —  J’ai de multiples talents, mais une seule parole. Je viendrai.
    Philippus se leva comme la servante apportait le pichet commandé. Il n’avait pas envie de boire. La condescendance de l’Hébreu avait éveillé sa méfiance. Il décida de lui montrer qu’il n’était pas dupe. Il jeta quelques pièces sur la table et le salua d’un avertissement :
    —  Étanche ta soif, mon ami, mais retiens ta langue ou l’Akasba te la fera avaler.
    Puis il se fraya un passage jusqu’à la sortie et inspira largement l’odeur de la nuit.
    Adossé à un arbre, un garçon d’une douzaine d’années cherchait à deviner par l’encadrement de la porte quelque jupon retroussé ou corsage délacé. Philippus s’en amusa un instant puis, saisi d’une idée soudaine, s’approcha de lui et lui glissa quelques pièces dans la main pour éveiller sa convoitise.
    —  Il faut des sous pour s’offrir une catin. Connais-tu celui que l’on nomme l’Hébreu ?
    —  Pour sûr, monseigneur.
    —  Sais-tu où il loge ?
    —  Non, mais je le voudrais bien, se lamenta le garçon qui avait espéré d’autres piécettes.
    —  Suis-le et rapporte-moi son adresse. Outre de quoi t’offrir un dépucelage, je te donnerai le nom de celle qui saura s’en contenter.
    —  C’est comme si c’était fait, monseigneur !
    —  Sais-tu ma maison ?
    —  Tout le monde vous connaît, affirma le jeunot avec respect. Vous êtes le Médicus.
    —  Je t’attendrai donc, glissa Philippus en guise de bonsoir.
    Il rentra sans se presser. Au-dessus de sa tête où régnait une calvitie importante, une myriade d’étoiles ouvrait un infini majestueux. Il les contempla longuement, appuyé contre le mur de sa maison. Elles étaient à la fois mystère et révélation. Michel de Nostre-Dame y aurait lu un signe, lui n’avait qu’une science pour entrevoir son destin.
    Et il savait qu’il venait de jouer le sien.

22
     
     
    Comme Philippus s’en doutait, l’Hébreu ne parut pas surpris lorsque précautionneusement il défit devant lui les liens de cuir. Tout juste Marie put-elle lire
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