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la tondue

la tondue

Titel: la tondue
Autoren: Marie de Palet
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cheveux !…
    — Bien sûr, c’est la mode à Paris. J’ai fait faire une indéfrisable. »
    Et elle ébouriffa en riant ses courtes boucles pour cacher la rougeur qui lui montait au front.
    La mère ne répondit pas. Elle baissa brusquement les yeux sur ses légumes. Au bout d’un moment, elle soupira : « Je comprends, il faut bien quelquefois changer ses habitudes ! » Cela dit, elle continua son travail en silence.
    Yvette se servit de café et se mit à le boire à petites gorgées, debout, regardant le chemin par la fenêtre de la cuisine.
    Quelques instants après, elle demanda :
    « Alors, que se passe-t-il par ici ?
    — Oh ! Ici, il ne se passe pas grand-chose. La vie est toujours la même : le travail, le travail et encore le travail !
    — Jacques m’a dit que vous aviez agrandi la propriété.
    — Ah oui ! On a acheté les terres de ce pauvre Louis Brent. Il est mort, tu le sais. Ses neveux voulaient s’en débarrasser et comme elles touchent les nôtres… »
    Elle ajouta, après une hésitation :
    « Et puis, on a acheté aussi la ferme des Ségala.
    — Ségala a vendu !… »
    Yvette s’étonnait. C’était l’un des plus gros propriétaires du coin. Sa ferme était promise à un bel avenir d’autant plus qu’il avait trois garçons, de francs lurons plutôt débrouillards, bons travailleurs… Pourquoi avait-il décidé d’abandonner le pays ?
    La mère lui expliqua tout de suite :
    « Eh oui ! Il avait un peu trafiqué pendant la guerre et cela n’a pas été du goût de tout le monde.
    — Il avait trafiqué avec les Allemands ?
    — Plus ou moins…, on ne l’a jamais bien su ; mais le fait est qu’il a dû partir plus vite qu’au pas… Tiens, mais il est même monté à Paris avant qu’on ne le recherche trop… Heureusement pour lui, car, à la Libération, il y aurait eu du vilain s’il était resté… »
    Joseph, le père d’Yvette, entra et interrompit la conversation.
    « Bonjour, papa.
    — Bonjour, petite fille, répondit-il en l’embrassant, tu es devenue bien jolie… » ajouta-t-il en souriant, les yeux un peu mouillés.
    Il apportait avec lui une odeur de foin coupé, d’herbe sèche et de tabac gris qu’il fumait régulièrement et dont il n’avait jamais pu ou voulu se défaire. Jacques le suivait. Tous deux se mirent à parler de prés à faner et d’autres travaux à faire dans la journée.
    La mère, qui depuis quelque temps donnait des signes d’impatience, dit soudain d’une voix douce, sans regarder personne :
    « Si cela ne vous faisait rien, y aurait-il quelqu’un qui pourrait me remplacer pour aller garder les vaches. Je serais libre et je pourrais…
    — Bien sûr, répondit spontanément Yvette, il faut que je m’occupe, alors autant le faire tout de suite, où me faut-il aller ?
    — Que faisais-tu au juste à Paris ? demanda le père en roulant une cigarette avec soin.
    — … Je… J’étais secrétaire. »
    Pouvait-elle leur dire qu’elle n’était secrétaire que de nom ? Elle en avait le grade et le salaire car c’était le seul moyen que Fritz eût trouvé pour l’avoir toujours à ses côtés. Il la logeait dans un hôtel où il venait la retrouver souvent, mais, tous les jours, elle allait au bureau et, très vite, elle avait rêvé de devenir vraiment sa secrétaire… Elle s’y était si bien appliquée qu’elle avait appris seule à taper à la machine, elle avait même pris des cours de sténo pour pouvoir remplacer “la vieille grue peinturlurée” qui venait tous les matins d’une lointaine banlieue.
    Un an à peine après sa rencontre avec l’Allemand, elle pouvait remplir le rôle de secrétaire aussi bien que sa rivale.
    « Pourquoi n’y es-tu pas restée ? demanda la mère en lui jetant un regard noir : c’est un bon métier, secrétaire.
    — Maintenant que la guerre est finie, on a supprimé des bureaux… Et, j’ai perdu ma place.
    — Je croyais, au contraire, qu’on cherchait des gens pour remplacer ceux qui avaient collaboré.
    — C’est possible, se força-t-elle à répondre avec désinvolture mais chez nous, on a fermé les bureaux.
    — C’était où ?
    — Au ministère.
    — Avec les Allemands ? »
    Le père l’interrompit :
    « Mais non, le ministère est français. Qu’est-ce que tu vas chercher là !… »
    Clémence, la mère, baissa le nez, comme prise en faute et se concentra sur ses légumes.
    Le déjeuner s’acheva en
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