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la tondue

la tondue

Titel: la tondue
Autoren: Marie de Palet
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profitent… Il y en a qui dénoncent et qui savent y faire… »
    Dans les paroles amères du vieil homme, Yvette discerna beaucoup de souffrances et d’amertume.
    Elle était mal placée pour répondre, elle ne savait à quoi il faisait allusion mais comprit qu’ici aussi il y avait eu des problèmes. Elle pensa que si Camille avait connu sa vie à Paris, il aurait été encore plus amer.
    La matinée s’étira, après le départ de Camille et, quand approcha midi, il fallut songer à rentrer.
    Dans la pleine lumière de la mi-journée, les vaches s’énervaient à chasser les mouches exigeantes à grands coups de queue rageurs. Elles se hâtaient vers la fraîcheur relative de l’étable.
    Yvette s’amusa à l’idée de la surprise de ses amis s’ils avaient pu la voir en train d’attacher les bêtes… Mais la cruelle réalité s’imposa tout de suite : ses amis ne la verraient pas ; ils ne la verraient plus jamais…
    Elle se précipita dans la cuisine d’où s’échappait une bonne odeur de pommes de terre à la poêle comme elle les aimait.
    La mère se retourna et un sourire rapide étira ses lèvres minces :
    « Tiens, te voilà. La matinée s’est bien passée ?
    — Oui. J’ai rencontré Camille Bardin, nous avons bavardé et il m’a raconté…
    — Oh, je me doute bien de ce qu’il t’a raconté, coupa rapidement la mère. Les yeux brillants, les poings sur les hanches, la louche à potage encore à la main, elle fixa la jeune fille… Il t’a raconté la guerre… Ceux qui se sont enrichis quand d’autres y laissaient leur peau… Ceux qui ont dénoncé et ceux qu’on a condamnés à tort… Ah, on la connaît, sa chanson ! C’est toujours le même refrain qu’il nous chante depuis un an !…
    … Mais, bon Dieu, fit-elle en tapant du poing sur la table, s’il avait tant envie de se battre, il pouvait y aller, personne ne l’en a empêché. Pourquoi est-il resté caché au fond de sa maison comme nous l’avons tous fait ?
    … Je vais te dire, moi, ce que c’est que cet homme-là : c’est un jaloux qui aurait bien voulu en faire du marché noir, mais il aurait fallu travailler. Alors, comme Monsieur aime se la couler douce, il n’a jamais rien eu à vendre !… C’est pour ça que maintenant, il critique ceux qui ont su tirer parti de la situation ! »
    Elle saisit rageusement la queue de la poêle et, d’un coup rapide, fit sauter les pommes de terre qui retombèrent en un long grésillement.
    Yvette, surprise par cette colère qu’elle n’attendait pas, n’osa rien ajouter. Elle regarda la mère qui avait repris son travail comme si de rien n’était et s’assit silencieusement.
    Clémence, les lèvres encore agitées d’un léger tremblement, se retourna soudain, lança un regard aigu à sa fille et lui dit en hochant la tête :
    « Décidément, je ne m’habituerai jamais à te voir avec ces cheveux ras, on dirait qu’on te les a coupés de quatre coups de ciseaux ! »

V
    Paulette
    Pourtant le temps passa. Les jours succédèrent aux jours, monotones en leur diversité. Le travail s’ajouta au travail en une ronde sans cesse renouvelée.
    Yvette avait du mal à suivre cette activité fébrile qui jetait hors du lit son père et sa mère dès cinq heures du matin.
    L’aube les trouvait dans les champs et l’angélus du soir les surprenait encore le nez dans la poussière.
    «  Mais comment peuvent-ils vivre ainsi  ? » s’étonnait-elle souvent. «  Dire que j ’ étais comme eux , autrefois  », ajoutait-elle immédiatement.
    Paris lui manquait. L’animation des rues, la circulation, les magasins, les distractions, dont elle n’était pas arrivée à se déshabituer depuis un an, revenaient parler à sa mémoire. Elle souhaitait s’amuser encore et encore…
    Après tout, personne, ici, ne connaissait son passé. Elle comptait bien en profiter…
    La semaine s’étirait, morne et lente. Le labeur harassant ne s’arrêtait que le dimanche. Ce jour-là, l’atmosphère de la maison changeait. C’était la seule pause de la semaine que la religion exigeait et que la tradition imposait depuis des siècles. Ils étaient rares, ceux qui osaient transgresser la loi sans raisons majeures.
    Dès le matin, la mère et le père, levés aux aurores, avaient vaqué à toutes leurs occupations et étaient fin prêts pour la première messe. Une messe basse où les fidèles écoutaient dans un silence religieux le prêtre et les enfants de
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