Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La rose de Raby

La rose de Raby

Titel: La rose de Raby
Autoren: C.L. Grace
Vom Netzwerk:
heure plus tôt seulement. Tirant son épée, il l'avait plongée dans le ventre de la vieille, la transperçant comme un lapin ou un porc. Après, les soldats l'avaient suspendue par les pieds à la branche d'un orme, et tous en cercle ils s'étaient moqués de son corps strié de veines, décharné, qui se balançait tel un animal à l'étal d'un boucher. Après avoir rassemblé leur butin et sellé leurs chevaux, ils avaient laissé ce cadavre ensanglanté sans un regard en arrière. Comment Atworth avait-il été décrit par un de ses soldats ?
    « Un monstre ne craignant ni Dieu ni les hommes. » Eh bien, la vieille femme avait vu juste. Dès lors, tout était allé de travers. Deux jours plus tard, ils étaient tombés dans une embuscade tendue par des mercenaires allemands, des Lorrains, qui avaient tué six des hommes d'Atworth et s'étaient approprié le gros de leur butin.
    Atworth ouvrit les yeux; la douleur avait cédé. Quelqu'un viendrait peut-être le secourir. Il se tendit, guettant un bruit; la lumière qui filtrait sous la porte était moins vive, maintenant. Personne ne viendrait! Atworth reprit ses vagues rêveries. Tous ceux de sa troupe, sans exception, étaient morts de mort violente, tués entre les haies et les fossés du nord de la France. Ils avaient été pris dans la grande débâcle qui avait englouti les forces anglaises, quand les armées françaises, sous la conduite de cette étrange pucelle d'Orléans, Jeanne d'Arc, avaient bouté les maudits hors de France. Atworth se trouvait sur la place du marché de Rouen quand on avait brûlé la Pucelle.
    Il avait observé son corps maigre, émacié, se boursoufler dans la chaleur, pourtant, elle avait continué à prier d'une voix forte, tandis que son visage d'enfant abandonné disparaissait derrière le rideau de flammes. Et après ?
    Ces jours sombres au château de Rouen, où il était garde du corps de la duchesse Cécile d'York. Un lien s'était forgé, là-bas, qui durait encore. Rien ne l'avait changé, pas même quand Atworth avait été capturé par le vicomte de Sanglier, un jeune mécréant sans merci. Atworth avait vu en lui le reflet de son âme, et, de nouveau, un lien s'était forgé, une chaîne qui l'entravait toujours après tant d'années, et que Sanglier tenait encore.
    Après s'être enfui de France, Atworth était rentré dans son petit village, près de Cantorbéry. Il était devenu un homme hanté par ses démons. Ayant rapporté un important butin, il s'était établi riche propriétaire fermier, et s'était fiancé à la fille d'un seigneur; mais cela avait mal tourné. La fille était morte d'une de ces fièvres subites qui ravageaient le comté. Les affaires d'Atworth n'avaient jamais prospéré. Plus grave, partout où il allait, il voyait ces fantômes : la vieille qui le dévisageait depuis le fond d'une taverne. Ou bien, aux heures noires de la nuit, il regardait par sa fenêtre et voyait le visage de la sorcière, encadré de ses cheveux gris, ses yeux sans âme qui le fixaient avec défi, et sa bouche cernée de rouge. Elle était effrayante quand elle apparaissait sur la pelouse que diaprait la lune, devant la maison à colombages qu'il occupait. Atworth ne connaissait plus la paix.
    — Je suis devenu comme une bouteille dans la fumée, murmura-t-il.
    Il s'était précipité à Cantorbéry pour y chercher du réconfort Il avait prié, jeûné. Un frère qui l'avait entendu en confession avait pleuré à la litanie de ses péchés : meurtres, viols, vols et incendies volontaires, et lui avait refusé l'absolution tant qu'Atworth n'aurait pas accompli un pèlerinage. Atworth était parti outremer et avait connu la chaleur brûlante de la Palestine; au retour, il était passé par Rome pour obtenir l'absolution de l'un des propres confesseurs du pape; le prêtre lui avait imposé une vie de stricte observance.
    En rentrant à Cantorbéry, Atworth avait rejoint les frères du Sac, pour embrasser une vie de prière, de jeûne et de pénitence. Même là, son passé ne desserrait pas son étau de fer. Il avait été ordonné prêtre et avait acquis une réputation de sainteté et de confesseur perspicace.
    Dame Cécile d'York, la mère du roi, se souvenant de leurs liens anciens, s'était hâtée de venir confier son âme à ses bons soins, Atworth serra les mâchoires. Elle avait d'excellentes raisons de vouloir obtenir son absolution.
    Il murmura une prière. Il était trop dur ! Désormais, il était un
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher