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La règle de quatre

La règle de quatre

Titel: La règle de quatre
Autoren: Ian Caldwell
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Gil attend, inquiet, comme un berger qui souhaite rassembler son troupeau. Prudent, il cherche à échafauder un plan de secours. Nous n’allons pas assez vite à son goût.
    Je ferme les yeux et j’essaie de reconstituer de mémoire la topographie du campus.
    — Plus que quinze mètres, Paul, lance Charlie. Maximum, trente.
    Sous la bouche d’égout, près de Clio, Gil jette un coup d’œil à sa montre.
    — Il est 19 h 29. Je vais soulever la plaque et m’assurer que le champ est libre. Préparez-vous à courir.
    Il se cale sur le dernier échelon et se met en position, les bras contre la plaque. Avant de bander ses muscles, il nous regarde par-dessus son épaule.
    — N’oubliez pas. Les proctors n’ont pas le droit de descendre dans les tunnels. S’ils nous repèrent, ils se contenteront de nous ordonner de sortir. Dans ce cas, on reste en bas. Interdiction absolue de prononcer le moindre nom, le moindre mot qui pourrait nous identifier. Compris ?
    Nous opinons du chef.
    Gil inspire profondément, remonte ses poings et fait pivoter le couvercle d’environ trente centimètres. Une voix aboie, qui vient de là-haut.
    — Ne bougez pas ! Restez où vous êtes !
    — Merde, siffle Gil entre ses dents.
    Charlie le tire par la chemise.
    — On file ! Par là-bas ! Éteignez vos lampes !
    Je m’engouffre dans le tunnel, entraînant Paul dans la foulée. J’essaie de me rappeler par où nous sommes passés.
    Rester à droite. Attention aux tuyaux à gauche. Rester à droite.
    J’effleure le mur et ma chemise se déchire à l’épaule. Paul titube, accablé par la chaleur. Nous avançons en trébuchant. Gil nous rattrape. Une torche électrique, un bras puis une tête surgissent dans le tunnel
    — Sortez de là ! ordonne une voix.
    Le faisceau de la torche balaie le vide dans les deux directions et envoie un triangle de lumière fouiller le tunnel.
    Une deuxième voix. Celle d’une femme, maintenant.
    — Dernier avertissement !
    Je regarde en direction de Gil. Je devine le contour de sa tête, le hochement qui nous ordonne de rester immobiles. Je sens l’haleine humide de Paul dans mon cou. Le visage blême, défait, il s’appuie contre le mur. Assez fort pour se faire entendre, la femme lance à son collègue :
    — Très bien. Postez un vigile à toutes les sorties.
    La torche disparaît. Charlie nous pousse aussitôt dans le dos. Nous courons droit devant jusqu’à un embranchement, puis nous filons à droite en territoire inconnu.
    — Ici, ils ne peuvent pas nous voir, murmure Gil, à bout de souffle.
    Il braque sa lampe sur un autre tunnel qui semble se dérouler à l’infini vers la partie nord-ouest du campus.
    — Et maintenant on fait quoi ? demande Charlie.
    — On essaie Dod Hall, tranche Gil.
    — Impossible, rétorque Paul en s’épongeant le front. Ils ont cadenassé la sortie.
    — Ils ne surveilleront que les grilles principales, suppose Charlie.
    — En passant par là, dis-je en montrant le fond du tunnel, je crois qu’on y sera plus rapidement.
    — Et alors ?
    — Il y a une sortie près de Rocky-Mathey. C’est encore loin ?
    Charlie tend une bouteille d’eau à Paul, qui boit goulûment nos dernières réserves.
    — Quelques centaines de mètres, répond-il. Peut-être plus.
    — Par ce tunnel ?
    Gil réfléchit un instant, puis hoche la tête.
    — Je n’ai rien de mieux à proposer, admet Charlie.
    Ensemble, nous nous enfonçons dans l’obscurité.
    Nous marchons en silence. Charlie me confie sa lampe, car la mienne montre des signes de faiblesse. Il ne lâche pas Paul des yeux, qui semble de plus en plus épuisé. Quand il fait mine de s’appuyer à un mur, Charlie le rattrape pour éviter qu’il ne se brûle sur une canalisation. À chaque pas, un peu d’eau clapote dans les bouteilles. Je commence à me demander si je n’ai pas perdu le sens de l’orientation.
    — Stop, les mecs ! s’exclame Charlie derrière nous. Paul tourne de l’œil.
    — Je voudrais m’asseoir deux secondes, avoue Paul d’une voix éteinte.
    Gil braque sa torche sur le fond du tunnel. Une série de barreaux métalliques bloque la sortie.
    — Merde !
    — Une barrière de sécurité, constate Charlie.
    — Qu’est-ce qu’on fait ?
    Gil se penche sur Paul.
    — Paul, demande-t-il en le secouant doucement par l’épaule, y a-t-il un moyen de sortir d’ici ?
    Paul désigne la canalisation près de la barrière, puis, le bras tremblant,
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