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La règle de quatre

La règle de quatre

Titel: La règle de quatre
Autoren: Ian Caldwell
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à partir.
    Du pied, je balaie la neige sur la plaque d’égout. Charlie s’agenouille et, sans effort, soulève le couvercle. Je m’assure une dernière fois qu’il n’y a personne dans la rue.
    — Toi d’abord, m’enjoint-il en posant une main sur mon épaule.
    — Et les sacs à dos ?
    — Allez ! Dépêche-toi !
    Je prends appui sur le bord. Une chaleur épaisse s’exhale du trou. Ma parka me gêne tandis que j’essaie de me glisser à l’intérieur.
    — Tommy, dépêche, bon sang ! Cherche un peu, tu trouveras un barreau contre la paroi.
    Ma chaussure se pose enfin sur le premier échelon. J’amorce la descente.
    — Très bien, approuve Charlie. Attrape.
    Il passe les deux sacs à dos par l’ouverture.
    Un réseau de tuyaux se perd dans l’obscurité. L’endroit bruisse de cliquetis et de chuintements. Nous sommes au cœur de l’appareil circulatoire de Princeton, où les canalisations irradient depuis la chaudière centrale jusque dans les résidences et les salles de cours. D’après Charlie, la vapeur à l’intérieur des canalisations exerce une pression supérieure à cent kilos au centimètre carré. Les plus petits tuyaux abritent des fils électriques ou diffusent du gaz naturel. Je ne vois nulle part un panneau d’avertissement, pas le moindre triangle fluorescent, pas la plus petite affiche sur le règlement. L’université aimerait bien oublier l’existence de cet enfer. Un seul message, à l’entrée, peint voilà des lustres en lettres noires : LASCIATE OGNI SPERANZA , VOI CH ’ EN - TRATE . Paul, qui n’a jamais eu peur dans ce dédale, avait souri en le déchiffrant la première fois. Abandonnez tout espoir, vous qui entrez ici, avait-il dit, traduisant Dante pour les néophytes.
    Charlie se laisse glisser à son tour et remet le couvercle en place. En sautant du dernier échelon, il retire son bonnet. La lumière fait briller les gouttes de sueur qui perlent sur son front. Il n’est pas passé chez le coiffeur depuis quatre mois et ses cheveux balaient le plafond.
    Il hume l’air ambiant et extrait du sac un pot de Vick’s VapoRub.
    — Tiens, mets-en un peu sous le nez et tu ne seras pas gêné par l’odeur.
    Je décline son offre. Un médecin légiste lui a révélé cette astuce pour ne pas être gêné par les exhalaisons des cadavres pendant les autopsies. Depuis la mort de mon père, je ne tiens pas la profession médicale en haute estime. Pour moi, un toubib est un bon à rien doublé d’un hypocrite. Mais imaginer Charlie dans un hôpital est une tout autre affaire. Dans son équipe d’ambulanciers, c’est lui qu’on appelle pour les cas difficiles, lui qui trouvera toujours une vingt-cinquième heure pour aider des inconnus à lutter contre celle qu’il surnomme la Voleuse.
    Charlie sort deux pistolets laser, à fines rayures grises, et les ceintures de Velcro. Je suis en nage. Pendant qu’il farfouille dans ses sacs, je retire ma parka, mais, au moment où je vais la balancer sur un tuyau, il m’attrape le bras.
    — Attention ! Tu te souviens du blouson de Gil ?
    Ça m’était sorti de la tête. La chaleur des canalisations avait fait fondre le Nylon et le blouson s’était embrasé. Nous avions dû éteindre le début d’incendie avec nos chaussures.
    — On laisse ça ici, et on le reprendra tout à l’heure, ajoute-t-il en m’arrachant la parka des mains.
    Il la roule en boule avec la sienne et fourre le tout dans un sac extensible qu’il suspend à un crochet du plafond.
    — Comme ça, les rats n’y toucheront pas.
    Il prend une torche, un émetteur-récepteur et deux bouteilles d’eau couvertes de condensation qu’il glisse dans les filets extérieurs de son sac à dos.
    — N’oublie pas ! Si on se perd de vue, tu ne descends pas plus bas. Si l’eau coule dans un sens, va dans la direction opposée. Tu ne voudrais pas te retrouver au fond d’un égout ou d’une chute si le débit augmente. Ici, le niveau de l’eau monte très vite.
    Allusion à peine voilée à notre dernière équipée souterraine, au cours de laquelle je m’étais perdu. J’ai chaud. Je m’évente avec un pan de ma chemise.
    Charlie me donne un récepteur.
    — Alors, on va dans quelle direction ?
    — À toi de décider, répond-il en souriant.
    — Pourquoi ?
    — Parce que c’est toi le sherpa, chuchote-t-il en me tapotant la tête.
    — Et que veux-tu que je fasse ?
    — Paul connaît les tunnels mieux que nous. Il faut une
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