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La passagère du France

La passagère du France

Titel: La passagère du France
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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pleine de mauvaise foi.
    Les deux amies entretenaient un jeu du chat et de la souris qu’elles plaçaient, selon les circonstances, sur une gamme amicale ou conflictuelle. Mis à part une haute idée d’elles-mêmes et une envie d’aboutir, ce qui fait qu’elles comprenaient beaucoup de choses l’une de l’autre, elles n’avaient pas grand-chose en commun. Paradoxalement, cela créait entre elles une amitié réelle.
    En l’occurrence, Béatrice se mit dans la tête qu’il s’était passé quelque chose entre Sophie et l’officier. Son soupçon se confirma quand cette dernière changea de sujet.
    — À ce propos, peux-tu me dire pourquoi tu as fait tout ce raffut autour de ma soi-disant disparition ?
    Béatrice joua la surprise.
    — Mais pour te retrouver, bien sûr.
    — Tu veux dire pour en profiter pour voir le commissaire et lui demander de te passer en cabine de première. Ne me prends pas pour une idiote.
    Béatrice acquiesça sans même chercher à se disculper.
    — Oui, j’ai sauté sur l’occasion.
    — Et qu’a-t-il dit ?
    — Il m’a baladée. « Pour cette nuit installez-vous bien confortablement dans la cabine qu’on vous a attribuée et laissez-moi faire le point après Southampton. Nous embarquons là-bas les derniers passagers et je saurai alors où j’en suis. » Tu parles ! Et il s’imagine que je l’ai cru. Je l’ai fusillé du regard et il...
    — Gérard Philipe !
    Interrompue brutalement Béatrice sursauta :
    — Quoi, Gérard Philipe ?
    — L’acteur que je cherchais tout à l’heure, c’est Gérard Philipe.
    Dire que Béatrice fut déstabilisée en entendant ce nom serait un euphémisme.
    — Gérard Philipe ! dit elle d’une voix toute changée, et tu ne te souvenais pas de son nom ?
    — Si, bien sûr, répliqua Sophie. Je me suis mélangée. Béatrice en était de plus en plus sûre, les pensées de
    Sophie ne pouvaient avoir qu’une seule origine : l’officier !
    — Armand de la Verne, lieutenant au 33e dragon dans Les Grandes Manoeuvres, continua Sophie qui venait de retrouver la mémoire. Voilà, c’est à lui que je pensais.
    Gérard Philippe était éblouissant et, à sa mort survenue trois ans auparavant en pleine gloire et en pleine jeunesse, il était devenu un mythe. Béatrice faisait partie de ces jeunes femmes que l’acteur fascinait. Elle avait du mal à croire qu’il puisse y avoir un seul homme au monde qui lui ressemblât.
    — Alors, comme ça, ton officier te fait penser à Gérard Philipe ! C’est trop beau pour être vrai. Il était unique !
    Dès l’instant où Béatrice établit le rapprochement entre l’acteur et l’officier, Sophie modifia son point de vue. Effectivement, cet officier lui avait rappelé l’acteur, pourtant il n’y avait rien de commun entre les deux hommes. Peut-être l’uniforme... Gérard Philipe avait quelque chose de juvénile, cet officier-là était un homme au visage marqué. Et rien chez lui ne paraissait juvénile. Ni ses traits, ni sa carrure que l’on devinait large sous l’uniforme.
    — Si je le vois, je saurai te dire ce qu’il en est de sa ressemblance, dit Béatrice vaguement moqueuse. Tu crois qu’on peut le retrouver ? Ce soir ?
    Sophie s’en voulut de n’avoir pas su cacher ses pensées. Maintenant elle n’aurait plus la paix ; Béatrice ne la lâcherait pas. Elle tenta de remettre les choses à leur place.
    — Tu sais, je dis qu’il me fait penser à Gérard Philipe, mais c’est à cause de l’uniforme, sinon je ne crois pas qu’il lui ressemble tant que ça. La preuve, je n’ai pas réagi. Et, ajouta-t-elle en passant du coq à l’âne, l’heure tourne, si on ne s’habille pas tout de suite, on se fera souffler la place au dîner.
    Béatrice comprit qu’il était inutile d’insister. Sophie passait déjà la robe trapèze qui lui arrivait juste au-dessus du genou. Elle ne fit aucun commentaire, Sophie avait raison, il était temps aussi pour elle de réussir à faire le chignon qu’elle avait vu sur Grâce Kelly dans le dernier Paris-Match et ça n’allait pas être simple. Quand elle vit son amie affairée à tordre ses cheveux et à piquer les épingles, Sophie se sentit soulagée. Elle avait réussi à passer à autre chose. Maintenant, elle se demandait quelles chaussures choisir. Elle opta pour des escarpins noirs dont le talon donnait une belle courbe au pied et une démarche féminine. Elle s’apprêtait à mettre la touche finale,
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