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La parfaite Lumiere

La parfaite Lumiere

Titel: La parfaite Lumiere
Autoren: Eiji Yoshikawa
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rejetant le manteau molletonné.
    La proue avançait très lentement.
Sasuke ne pouvait se résoudre à ramer avec vigueur. On entendait chanter les
bulbuls.
    — ... Sasuke...
    — Monsieur ?
    — L’eau est suffisamment peu
profonde ici. Inutile de trop se rapprocher. Vous ne voudriez pas endommager
votre bateau. En outre, c’est à peu près l’heure où la marée va redescendre.
    En silence, Sasuke fixait des yeux
un grand pin élancé qui se dressait solitaire. Dessous, le vent jouait avec un
manteau rouge vif.
    Sasuke était sur le point de le
désigner lorsqu’il se rendit compte que Musashi avait déjà vu son adversaire.
Les yeux fixés sur Ganryū, Musashi sortit de son obi un mouchoir de
couleur fauve, le plia en quatre dans le sens de la longueur, et le noua autour
de ses cheveux qu’ébouriffait le vent. Puis il glissa son sabre court sur le
devant de son obi. Il ôta son sabre long, le déposa au fond du bateau et le
couvrit d’une natte de roseaux. Dans la main droite, il tenait le sabre de bois
qu’il s’était fabriqué avec la rame brisée.
    — ... C’est assez loin,
dit-il à Sasuke.
    Devant eux, l’eau s’étendait sur
près de soixante mètres. Sasuke donna deux longs coups de rame. Le bateau
bondit en avant et s’échoua sur un haut-fond ; la quille frémit.
    En cet instant, Musashi, son hakama retroussé haut des deux côtés, sauta légèrement dans la mer, si légèrement que
c’est à peine s’il éclaboussa. Il gagna rapidement le bord, son sabre de bois
fendant l’écume.
    Cinq pas. Dix pas. Sasuke, lâchant
sa rame, regardait avec stupeur, sans savoir où il était, ce qu’il faisait.
    Tandis que Ganryū s’éloignait
du pin comme une oriflamme rouge, son fourreau poli étincela au soleil.
    Il évoquait à Sasuke une queue de
renard argenté. « Dépêchez-vous ! » Ces mots lui jaillirent à
l’esprit mais Ganryū se trouvait déjà au bord de l’eau. Sasuke, certain
que Musashi était perdu, n’osait plus regarder Il tomba la face contre le fond
du bateau, glacé, tremblant, se cachant le visage comme si c’était lui qui eût
risqué à tout instant d’être fendu en deux.
    — Musashi !
    Ganryū planta résolument les
pieds dans le sable, refusant de céder un seul pouce de terrain.
    Musashi s’arrêta et se tint
immobile, exposé à l’eau et au vent. Sur son visage apparut l’ombre d’un
sourire.
    — Kojirō, dit-il avec
douceur.
    Il avait dans les yeux une
férocité inhumaine, une force si irrésistible qu’elle menaçait d’entraîner
inexorablement Kojirō vers le péril et la destruction. Les vagues
baignaient son sabre de bois. Les yeux de Ganryū lançaient des flammes,
s’efforçaient de terrifier, d’affaiblir.
    — Musashi !
    Pas de réponse.
    — Musashi !
    Au loin, la mer grondait, menaçante ;
la marée clapotait et murmurait au pied des deux hommes.
    — ... Encore en retard,
hein ? C’est donc là votre stratégie ? Je trouve ça lâche. Vous êtes
en retard de deux heures. J’étais ici à huit heures, tout comme je l’avais
promis. Je vous ai attendu.
    Musashi ne répondit pas.
    — ... Vous avez fait la même
chose à Ichijōji, et avant cela au Rengeōin. Votre méthode semble
être de démoraliser votre adversaire en le faisant attendre exprès. Avec Ganryū,
cette ruse vous sera inutile. Et maintenant, avancez bravement pour que les
générations futures ne se moquent pas de vous. En avant au combat,
Musashi !
    L’extrémité de son fourreau se
dressa haut derrière lui tandis qu’il tirait la grande « Perche à
sécher ». De la main gauche, il se débarrassa du fourreau qu’il jeta dans
l’eau. Musashi attendit juste le temps qu’une vague battît le récif et se
retirât pour déclarer soudain d’une voix douce :
    — Tu as perdu, Kojirō.
    — Quoi ? fit Ganryū,
ébranlé au plus profond de lui-même.
    — Le combat est terminé. Je
te dis que tu es vaincu.
    — Qu’est-ce que tu
racontes ?
    — Si tu devais gagner, tu ne
jetterais pas ton fourreau. Tu as rejeté ton avenir, ta vie.
    — Des mots ! Des
sottises !
    — Dommage, Kojirō. Prêt
à tomber ? Veux-tu en terminer vite ?
    — Viens donc... avance, espèce
de coquin !
    — Ho-o-o-o !
    Le cri de Musashi et le
mugissement des vagues allèrent ensemble crescendo. S’avançant dans l’eau, la
« Perche à sécher » brandie au-dessus de sa tête, Ganryū
affrontait Musashi bravement. Tandis que ce dernier montait en
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