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La parfaite Lumiere

La parfaite Lumiere

Titel: La parfaite Lumiere
Autoren: Eiji Yoshikawa
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courant sur le
rivage à gauche de son adversaire, un mince filet d’écume troubla la surface. Ganryū
se lança à la poursuite de Musashi.
    Les pieds de ce dernier quittèrent
l’eau et touchèrent le sable presque à l’instant même où l’épée de Ganryū – tout
son corps – se jeta sur lui comme un poisson volant. Quand Musashi
sentit l’approche de la « Perche à sécher », son corps en était
encore à la fin du mouvement qui l’avait amené hors de l’eau, légèrement penché
en avant.
    Il tenait à deux mains le sabre de
bois, tendu vers la droite, derrière lui, en partie caché. Satisfait de sa
position, il émit un grognement presque imperceptible. La « Perche à
sécher » avait paru sur le point de s’abattre ; mais elle eut une
hésitation légère, puis s’arrêta. A moins de trois mètres de Musashi, Ganryū
changea de direction d’un bond agile vers la droite.
    Les deux hommes se fixaient du
regard. Musashi, à deux ou trois pas de l’eau, avait dans son dos la mer. Ganryū
lui faisait face, l’épée brandie à deux mains.
    D’innombrables spectateurs
retenaient leur souffle.
    Au-dessus de Ganryū planaient
les prières et les espoirs de ceux qui croyaient en lui et voulaient qu’il
vécût ; au-dessus de Musashi, les prières et les espoirs des autres.
    De Sado et d’Iori, dans l’île.
    D’Otsū, d’Osugi et de
Gonnosuke, sur la plage de Shimonoseki.
    D’Akemi et de Matahachi, sur leur
colline à Kokura.
    Toutes leurs prières s’adressaient
au ciel.
    Ici, espoirs, prières et dieux
n’étaient d’aucun secours, non plus que la chance. Il n’y avait qu’un vide,
impersonnel et parfaitement impartial.
    Ce vide, si difficile à réaliser
par un être doué de vie, est-il la parfaite expression de l’esprit qui s’est
élevé au-dessus de la pensée et a transcendé les idées ?
    Les deux hommes parlaient sans
parler.
    Muscles, chair, ongles, cheveux,
sourcils – tous éléments corporels qui participent de la vie –,
s’unissaient contre l’ennemi en une force unique, défendant l’organisme vivant
dont ils faisaient partie. L’esprit seul ne faisait qu’un avec l’univers, clair
et serein, pareil au reflet de la lune dans un étang lorsqu’un typhon fait
rage. Atteindre cette immobilité sublime est le suprême accomplissement.
    Des âges parurent s’écouler ;
en réalité, l’intervalle fut bref : le temps nécessaire aux vagues pour
s’approcher et se retirer une demi-douzaine de fois.
    Alors, une grande clameur – plus
que de la gorge, elle venait des profondeurs de l’être – fracassa le
temps. Elle émanait de Ganryū, et fut suivie aussitôt par la clameur de
Musashi.
    Ces deux cris, pareils à des
vagues furieuses qui fouettent un rivage rocheux, lancèrent leurs esprits vers
le ciel. L’épée de l’assaillant, si haut brandie qu’elle semblait défier le
soleil, stria l’air ainsi qu’un arc-en-ciel.
    Musashi projeta l’épaule gauche en
avant, recula le pied droit, et présenta la partie supérieure de son corps de
trois quarts à son adversaire. Son épée de bois, qu’il tenait à deux mains,
fendit l’air à l’instant même où la pointe de la « Perche à sécher »
s’abattait en plein devant son nez.
    Le souffle des deux combattants se
mit à couvrir le bruit des vagues. Maintenant, le sabre de bois se trouvait
tendu à hauteur de l’œil, et la « Perche à sécher » brandie au-dessus
de la tête de celui qui la tenait. Ganryū avait bondi à quelque dix pas de
distance ; là, il avait d’un côté la mer. Bien qu’il n’eût pas réussi à
toucher Musashi lors de son premier assaut, il s’était placé dans une position
bien meilleure. Fût-il resté où il se trouvait, avec dans les yeux les reflets
du soleil dans l’eau, sa vision n’eût pas tardé à se troubler, puis son esprit,
et il fût tombé à la merci de Musashi.
    Avec une confiance renouvelée, Ganryū
commença à avancer centimètre par centimètre en guettant une brèche dans la
défense de son adversaire, et en se concentrant pour porter un coup décisif.
    Musashi fit ce à quoi l’on ne
s’attendait pas. Au lieu de s’avancer lentement, prudemment, il marcha
hardiment sur Ganryū, son sabre pointé devant lui, prêt à crever les yeux
de l’ennemi. La grossièreté de cette approche immobilisa Ganryū. Le sabre
de bois se dressa dans l’air. D’un puissant coup de pied, Musashi sauta haut,
et, pliant les
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