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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler
Autoren: Ron Hansen
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présenta comme Ernst Pretzsche. Bossu et courtaud, bien
plus petit qu’Angela, il semblait absolument fasciné par le fait que celle-ci
soit la demi-sœur d’Hitler, et il se rapprochait de plus en plus en parlant de
son amitié avec ce cher Adolf et de sa beauté à elle, alors que la seule pensée
qui venait à l’esprit d’Angela était qu’il ressemblait à un crapaud. Elle lui
demanda où était Hitler, mais il ne semblait pas disposé à le lui révéler tout
de suite. La main sur le cœur, il s’exclama :
    — Avoir un tel génie dans sa famille !
Je mentirais en disant que je ne vous envie pas, Frau Raubal. Le jeune Hitler !
Cette confiance en soi, cette passion, cette volonté, ce regard mystique !
    — Vous l’avez vu récemment ?
    Pretzsche se contenta d’essuyer une tasse avec
son mouchoir et de la lui remplir de café froid, avant de lui offrir le
tabouret derrière la caisse, tout en lui racontant sa propre histoire, comment
il avait grandi au Mexique où son père, apothicaire de profession et
anthropologue à ses heures, étudiait les rites magiques et le culte du sang des
Aztèques.
    — Mais vous n’aimez pas les sciences
occultes, dit-il.
    — Ça se voit tant que ça ?
    Son visage ne cessait de changer d’expression,
comme si s’en tenir à une seule représentait pour lui un exploit de
coordination.
    — Inutile de prendre un ton condescendant.
    — Vous ne m’avez toujours pas dit où est
Adolf.
    — Vous ne me croyez pas quand je vous dis
que je le connais.
    — Mais si !
    — Restez ! dit-il en se précipitant
dans une allée. Je vais vous montrer un livre qu’il m’a revendu !
    Et il produisit un vieil exemplaire tout piqué
et corné de Parzival, de Wolfram von Eschenbach, expliquant à Angela qu’Eschenbach
était un poète lyrique du XIII e siècle dont la célèbre légende du saint
Graal avait inspiré Richard Wagner pour son opéra.
    Elle lui prit le livre des mains et vit la
signature d’Adolf sur la page de garde. Puis elle le feuilleta et fut
stupéfaite de voir les pages couvertes de l’écriture d’Hitler, qui remplissait
les blancs de ses commentaires, corrections de syntaxe, citations d’autres
autorités en la matière, saluait une note utile d’un point d’exclamation, ou
barrait une autre d’un NON ! rageur.
    — C’était son livre préféré ? demanda-t-elle.
    — Oh, oui, parmi une centaine d’autres. La
Rome antique, le yoga, l’hypnotisme, l’astrologie, la phrénologie, les
religions orientales, Wotan. Malheureusement, il n’avait pas les moyens de s’acheter
des livres. Alors j’ai eu pitié de lui et lui ai permis d’en emprunter.
    — Mais pourquoi était-il si pauvre ?
    Pretzsche tripota un stylo-plume dans sa poche
de chemise tout en surveillant la porte d’entrée. Personne d’autre n’était en
vue.
    — Le jeu peut-être, ou les femmes. Peut-être
qu’il prenait des leçons particulières. Qui sait où passe l’argent ?
    Angela lui rendit sa tasse de café et se leva
du tabouret.
    — Cela fait un moment que vous ne l’avez
pas vu ?
    — Une bonne année. Peut-être plus.
    — Vous avez une idée de l’endroit où il
pourrait être ?
    Un sourire hésitant déforma sa grande bouche
lorsqu’il s’enquit d’un air bizarrement innocent :
    — Vous n’êtes pas remariée, Frau Raubal ?
    Elle se dirigea vers la porte.
    — Attendez ! s’écria-t-il.
    Et, comme elle continuait, il lança :
    — En Bavière !
    Elle se retourna :
    — Où ?
    — N’y a-t-il pas d’artistes là-bas ?
    Installée avec sa
fille dans un wagon de deuxième classe du train qui traversait l’Autriche d’est
en ouest, Angela sortit d’un panier de pique-nique leur déjeuner composé de Wienerwürstl, pain de seigle, moutarde douce et radis noirs. Elle expliqua
à sa fille que München voulait dire bei den Mönchen, chez les
moines. Des moines franciscains encapuchonnés y brassaient la bière depuis le XII e siècle. Et à présent il y avait des centaines et des centaines de
brasseries.
    — On va voir quelqu’un ? demanda
Geli.
    — Tu ne te souviens pas de ton oncle, je
suppose ?
    Geli secoua la tête.
    Angela lui parla de lui. Elle était son aînée
de six ans, et avait grandi en considérant ce tout petit garçon comme son
joujou, sa poupée préférée. Elle l’appelait Schatzi, trésor. Mais c’était
un Muttersöhnchen, un fifils à sa maman, et elle se disputait souvent
avec Frau Klara
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