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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler
Autoren: Ron Hansen
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catarrhe
bronchique en 1910, et en guise d’héritage, sa femme s’était retrouvée avec
trois enfants à charge et une pension mensuelle à peine suffisante pour payer
le loyer.
    August Kubizek avait assisté à la messe d’enterrement
de Léo Raubal à Linz, puis à la réception donnée pour les amis et la famille à
la maison de Bürgergasse, s’attendant sincèrement à y trouver Adolf, et
cruellement déçu par son absence. Assis sur le sofa à côté d’Angela, il lui
raconta qu’à l’automne 1908 il avait effectué huit semaines d’entraînement
militaire avec le 2 e régiment d’infanterie austro-hongrois, et qu’à
son retour dans l’appartement de Stumpergasse, en novembre, il avait découvert
qu’Hitler était parti brusquement sans laisser d’adresse. Depuis, son ami ne
lui avait donné aucun signe de vie.
    — Certes, nous avions des divergences d’opinions,
et des disputes terribles, mais avec Adolf c’était la routine. Cela fait un
moment que je retourne la situation dans tous les sens, sans trouver d’explication
pour son dépit ou son silence. Il n’avait jamais laissé entendre qu’il
partirait, même sous le coup de la colère. Je me sens tellement méprisé et
abandonné.
    — Moi aussi, répondit Angela.
    Kubizek se souvint que Léo venait d’être enterré
et se reprit :
    — Oh, pardon. Je ne suis qu’un égoïste. Votre
perte est bien plus grande.
    — En effet, répondit Angela d’un ton
sinistre.
    En 1913, les emplois étant rares à Linz, et, autant
qu’elle pouvait en juger, les hommes disponibles et assez courageux pour
épouser une veuve avec trois enfants carrément introuvables, Angela finit par
se résoudre à embarquer sa petite famille pour Vienne, où elle avait trouvé une
place de femme de chambre dans un hôtel modeste. Elle n’avait toujours pas revu
son frère, et n’avait reçu qu’une lettre de lui, mais si formelle et si
distante qu’elle l’avait prise pour une forme de sarcasme.
    Mais Paula se révoltait constamment, et les
enfants avaient besoin de l’autorité et de la sécurité d’un père, même si
celui-ci était aussi puéril et colérique que leur oncle. Donc Angela finit par
faire ce qu’August Kubizek avait omis de faire auparavant, c’est-à-dire
consulter les registres de police de Vienne, où elle découvrit que le dernier
domicile connu d’Adolf Hitler était au 58, Sechshauserstraße, où il s’était
présenté comme « écrivain ». Mais cela datait de trois ans. Sur le
seul autre document de police qu’il avait rempli, il n’y avait qu’un blanc à la
rubrique adresse.
    Elle se rendit au 58, Sechshauserstraße, où
une locataire âgée, qui pensait avoir vu un soir Hitler dormir sur un banc du
parc, suggéra à Angela d’essayer les foyers pour indigents.
    Ce qu’elle fit les jours suivants, les
visitant tous systématiquement les uns après les autres. Au foyer pour hommes
de Meldmannstraße, quelques-uns des sans-abri se souvenaient bien d’Hitler, de
ses vêtements répugnants qui grouillaient tellement de poux qu’ils avaient été
forcés de le maintenir sur son lit pendant qu’on le déshabillait et que l’on
passait tout ce qu’il possédait au kérosène. D’autres se le rappelaient en
train de vociférer contre les Habsbourg, de chanter Die Wacht am Rhein en
se rasant, transi jusqu’aux os parce qu’il avait vendu son manteau d’hiver à l’automne,
ou de s’appliquer à faire des aquarelles des monuments célèbres, qu’il vendait
ensuite aux touristes dans la rue, ou encore de traîner dans une librairie
ésotérique de la vieille ville. C’est donc là qu’elle se rendit ensuite.
    Dès qu’elle fut entrée dans la boutique, l’odeur
de nourriture moisie et de chemises sales, les particules de poussière s’amalgamant
dans l’air rance, le fatras dément de livres et de brochures s’amoncelant par
terre ou s’entassant de guingois dans des bibliothèques débordantes à deux
doigts de se renverser lui donnèrent envie d’en ressortir aussitôt. Sur les
murs s’étalaient des cartes d’astrologie et des plans d’alchimie, ainsi que des
photos encadrées de personnages bizarres au regard furieux qu’elle espérait
bien ne jamais rencontrer. Elle entendit un homme crier « Qui est-ce ? »
depuis l’arrière-boutique. Lorsqu’elle se nomma, le propriétaire ouvrit
immédiatement le rideau qui séparait les deux pièces, lui prit les mains dans
ses mains moites, et se
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