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La Légion Des Damnés

La Légion Des Damnés

Titel: La Légion Des Damnés
Autoren: Sven Hassel
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mauvaises habitudes. Si ça ne suffit pas, dis-le franchement et nous trouverons autre chose.
    Les yeux fixés dans le vide, l'Untersturmführer hurla d'une voix stridente:
    — Bastonnade !
    Quelques secondes plus tard, l'homme gisait sur le dos, pieds nus emprisonnés dans un pilori.
    — Combien, Herr Untersturmführer ?
    — Vingt !
    L'homme perdit connaissance avant la fin de la punition. Mais ils avaient des moyens de remédier à cela, des moyens indescriptibles, et bientôt l'homme dut reprendre sa place dans le rang.
    Tirant profit de l'expérience du premier, le suivant répondit correctement :
    — Herr Untersturmführer, l'ancien sous-officier Victor Giese, du 7 e Régiment de Pionniers, présent au rapport, déclare qu'il a vingt-deux ans, condamné pour vol à dix ans de travaux forcés.
    — Vol ! Quelle ignominie ! Tu ne sais donc pas qu'un soldat ne doit jamais voler ?
    — Herr Untersturmführer, je déclare que je sais qu'un soldat ne doit jamais voler.
    — Mais tu as volé tout de même.
    — Oui, Herr Untersturmführer.
    — Ce qui signifie que tu as la tête dure ?
    — Oui, Herr Untersturmführer, je déclare que j'ai la tête dure.
    — Eh bien, nous allons être très généreux avec toi et te donner quelques cours particuliers. Nous avons ici, précisément, un excellent professeur...
    Les yeux fixés dans le vide, l'Untersturmführer hurla d'une voix stridente :
    — Chat à neuf queues !
    Ils le pendirent par les poignets, les orteils touchant à peine le sol...
    Aucun d'entre nous, pas même les femmes, ne sortit indemne de cette « prise de contact ». Nous apprîmes rapidement, d'ailleurs, qu'à Lengries, nous n'étions pas des hommes et des femmes, mais des porcs, des tas de fumier, des putains.
    Presque tout ce qui se passait à Lengries est indescriptible, révoltant, monotone. Malgré sa fertilité macabre, l'imagination qui s'exerce dans le sadisme est remarquablement limitée, tandis que s'émousse rapidement la sensibilité des victimes. Voir les gens souffrir et mourir est également monotone, à la longue, même lorsqu'ils souffrent et meurent de cent façons que l'on eût estimées, en temps normal, inconcevables. Nos tortionnaires avaient carte blanche pour épancher sur nous leur appétit de pouvoir et de cruauté, et tiraient largement profit de l'occasion. Ils vivaient plus intensément qu'ils n'avaient jamais vécu ; leurs âmes vous puaient au nez bien davantage que les corps malades, torturés, de leurs prisonniers.
    Je ne veux blâmer nos gardiens en aucune façon. Eux aussi étaient victimes d'une situation qu'ils n'avaient pas créée et, sur un certain plan, ils en ressortirent plus mal en point que leurs victimes : avec une âme putréfiée.
    J'ai cru, jadis, qu'il me suffirait de raconter Lengries pour communiquer aux gens mon propre dégoût et leur insuffler une volonté inébranlable de refaire un monde, une existence d'où la torture serait exclue. Mais on ne peut faire comprendre ces choses qu'à ceux qui les ont partagées et c'est à ceux-là, précisément, qu'il est inutile de les rappeler.
    Tous les autres, ceux qui n'ont jamais perdu leur liberté, me regardent comme s'ils avaient envie de me traiter de menteur, bien qu'ils sachent, au fond d'eux-mêmes — ayant lapé avec avidité les comptes rendus de la mascarade de Nuremberg — que je n'exagère pas, au contraire. Mais ils refusent de voir les choses en face, préférant clouer parquet après parquet sur la pourriture des fondations, brûler toujours plus d'encens, vaporiser toujours plus de parfum...
    Peut-être y aurait-il, tout de même, une âme courageuse qui osera entendre et voir sans frémir. J'ai besoin de cette âme, de cette personne, sans qui tout n'est que solitude. J'ai besoin, aussi, de raconter mon histoire, de m'en débarrasser. C'est peut-être uniquement pour ça que j'écris. Non pour essayer, en la hurlant aux nues, d'éviter sa répétition. Peut-être même, en voulant la crier sur les toits, suis-je ma propre dupe ? Peut-être mon but est-il simplement d'attirer sur moi l'attention, et l'admiration horrifiée des foules ? D'être aux yeux de tout le monde le héros d'aventures que tout le monde n'a point vécues...
    Certes, il n'a pas été donné à tout le monde de vivre ces aventures, mais ceux qui les ont connues sont trop nombreux pour que j'aie l'outrecuidance de me croire un phénomène. Je ne sais donc pas exactement pourquoi je prends la peine de
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