Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak
Autoren: Charles De Coster
Vom Netzwerk:
elle dit
un jour à Claes :
    – Si au lieu d’un enfant j’en avais deux, me battrais-tu, mon
homme ?
    – Je ne le sais, répondit Claes.
    – Mais, dit-elle, si ce second n’était point sorti de moi et
fût, comme celui de Katheline, l’œuvre d’un inconnu, du diable
peut-être ?
    – Les diables, répondit Claes, produisent feu, mort et fumée,
mais des enfants, non. Je tiendrais pour mien l’enfant de
Katheline.
    – Tu le ferais ? dit-elle.
    – Je l’ai dit, repartit Claes.
    Soetkin alla porter chez Katheline la nouvelle.
    En l’entendant, celle-ci, ne se pouvant tenir d’aise, s’exclama
ravie :
    – Il a parlé le bon homme, parlé pour le salut de mon pauvre
corps. Il sera béni par Dieu, béni par diable, si c’est, dit-elle
toute frissante, un diable qui te créa, pauvre petit qui t’agites
en mon sein.
    Soetkin et Katheline mirent au monde l’une un garçonnet, l’autre
une fillette. Tous deux furent portés à baptême, comme fils et
fille de Claes. Le fils de Soetkin fut nommé Hans, et ne vécut
point, la fille de Katheline fut nommée Nele et vint bien.
    Elle but la liqueur de vie à quatre flacons, qui furent les deux
de Katheline et les deux de Soetkin. Et les deux femmes se
disputaient doucement pour savoir qui donnerait à boire à l’enfant.
Mais, malgré son désir, force fut à Katheline de laisser tarir son
lait afin qu’on ne lui demandât point d’où il venait sans qu’elle
eût été mère.
    Quand la petite Nele sa fille, fut sevrée, elle la prit chez
elle et ne la laissa point aller chez Soetkin que lorsqu’elle l’eut
appelée sa mère.
    Les voisins disaient que c’était bien à Katheline, qui était
fortunée, de nourrir l’enfant des Claes, qui, de coutume, vivaient
pauvrement leur vie besoigneuse.

XVI
     
    Ulenspiegel se trouvait seul un matin au logis et, s’y ennuyant,
taillait dans un soulier de son père pour en faire un petit navire.
Il avait déjà planté le maître-mât dans la semelle et troué
l’empeigne pour y planter le beaupré, quand il vit à la demi-porte
passer le buste d’un cavalier et la tête d’un cheval.
    – Y a-t-il quelqu’un céans ? demanda le cavalier.
    – Il y a, répondit Ulenspiegel, un homme et demi et une tête de
cheval.
    – Comment ? demanda le cavalier.
    Ulenspiegel répondit.
    – Parce que je vois ici un homme entier, qui est moi ; la
moitié d’un homme, c’est ton buste, et une tête de cheval, c’est
celle de ta monture.
    – Où sont tes père et mère ? demanda l’homme.
    Ulenspiegel répondit : – Mon père est allé faire de mal en
pis, et ma mère s’occupe à nous faire honte ou dommage.
    – Explique-toi, dit le cavalier.
    Ulenspiegel répondit :
    – Mon père creuse à l’heure qu’il est plus profondément les
trous de son champ, afin d’y faire tomber de mal en pis les
chasseurs fouleurs de blé. Ma mère est allée emprunter de
l’argent ; si elle en rend trop peu, ce nous sera honte ;
si elle en rend trop, ce nous sera dommage.
    L’homme lui demanda alors par où il devait aller.
    – Là où sont les oies, répondit Ulenspiegel.
    L’homme s’en fut et revint au moment ou Ulenspiegel faisait du
second soulier de Claes une galère à rameurs.
    – Tu m’as trompé, dit-il ; où les oies sont, il n’y a que
boues et marais où elles pataugent.
    Ulenspiegel répondit :
    – Je ne t’ai point dit d’aller où les oies pataugent, mais où
elles cheminent.
    – Montre-moi du moins, dit l’homme, un chemin qui aille à
Heyst.
    – En Flandre, ce sont les piétons qui vont et non les chemins,
répondit Ulenspiegel.

XVII
     
    Soetkin dit un jour à Claes :
    – Mon homme, j’ai l’âme navrée : voilà trois jours que Thyl
a quitté la maison ; ne sais-tu où il est ?
    Claes répondit tristement :
    – Il est où sont les chiens vagabonds, sur quelque grande route,
avec quelques vauriens de son espèce. Dieu fut cruel en nous
donnant un tel fils. Quand il naquit, je vis en lui la joie de nos
vieux jours, un outil de plus dans la maison, je comptais en faire
un manouvrier, et le sort méchant en fait un larron et un
fainéant.
    – Ne sois point si dur, mon homme, dit Soetkin ; notre fils
n’ayant que neuf ans, est en pleine folie d’enfance. Ne faut-il pas
qu’il laisse, comme les arbres, tomber ses glumes sur le chemin
avant de se parer de ses feuilles, qui sont aux arbres populaires
honnêteté et vertu ? Il est malicieux, je ne l’ignore ;
mais sa malice
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher