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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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pour s’enfuir.
    — Père !
    Mais son père ne prononça plus une parole. Il expira. Et
Thomas, qui toute sa vie avait lutté contre lui, se mit à pleurer comme un
enfant. Il lui était arrivé d’avoir honte de son père, mais en ce matin de
Pâques rempli de fumée, il découvrit qu’il l’aimait. La plupart des prêtres ne
reconnaissaient pas leurs enfants, mais le père Ralph n’avait jamais caché
l’existence de Thomas. Il avait laissé le monde penser ce qu’il voulait et
avait ouvertement confessé qu’il était homme tout autant que prêtre. S’il avait
péché en aimant sa gouvernante, cela avait été un doux péché qu’il n’avait
jamais nié, même s’il récitait des actes de contrition et craignait d’être puni
dans l’autre monde.
    Thomas tira son père à l’écart de l’autel. Il ne voulait pas
que son corps brûle lorsque le toit s’effondrerait. Le calice d’argent qu’il
avait renversé dans sa fuite se trouvait sous la robe imbibée de sang du
défunt. Thomas le mit dans sa poche avant de traîner le cadavre à l’extérieur,
dans le cimetière. Il déposa son père auprès du corps de l’homme à la tunique
rouge et verte et resta accroupi, en larmes, se disant qu’il avait échoué dans
sa première vigile de Pâques. Le diable avait volé les sacrements, la lance de
saint Georges avait disparu et Hookton n’existait plus.
    À midi, sir Giles Marriott arriva au village avec une troupe
d’hommes armés d’arcs et de serpes. Sir Giles, quant à lui, portait une cotte
de mailles et une épée. Mais l’ennemi n’était plus là et, dans le village, il
ne restait plus que Thomas.
    — Trois faucons jaunes sur champ d’azur, dit Thomas à
sir Giles.
    — Thomas ? demanda celui-ci, interloqué.
    Il était le seigneur du manoir, âgé à présent, bien qu’en
son temps il eût porté la lance à la fois contre les Écossais et contre les
Français. Le père de Thomas et lui avaient été de bons amis mais il ne
comprenait pas Thomas qui lui paraissait sauvage comme un loup.
    — Trois faucons d’or sur champ d’azur, répéta Thomas
d’un air farouche. Ce sont les armes de l’homme qui a fait ça.
    Était-ce le blason de son cousin ? Il l’ignorait. Son
père avait laissé tant de questions sans réponse !
    — Je ne sais pas de qui ce sont les armes, dit sir
Giles, mais je vais prier pour qu’il expie ses œuvres en enfer.
    Il n’y avait rien à faire tant que les feux ne se seraient
pas éteints d’eux-mêmes. Alors seulement on pourrait extraire les corps des
cendres. Les brûlés avaient noirci et s’étaient rétrécis d’une manière
grotesque, au point que des hommes de haute taille ressemblaient à des enfants.
Les morts du village furent transportés au cimetière pour être enterrés
dignement, mais les corps des quatre arbalétriers furent traînés sur la plage
et dénudés.
    — Est-ce toi qui les as tués ? demanda sir Giles à
Thomas.
    — C’est moi, messire.
    — Eh bien, merci.
    — Mes premiers morts français, dit Thomas d’une voix
chargée de colère.
    — Non, dit sir Giles en levant l’une des tuniques pour
montrer à Thomas le calice vert brodé sur la manche. Ils viennent de Gênes. Les
Français les engagent comme arbalétriers. J’en ai tué quelques-uns de mon
temps. Mais ils sont toujours plus nombreux. Sais-tu ce que signifie cet
emblème ?
    — C’est une coupe ?
    Sir Giles fit non de la tête.
    — Le saint Graal. Ils pensent qu’ils le possèdent dans
leur cathédrale. On m’a dit que c’était un grand objet vert incrusté
d’émeraudes qu’ils ont rapporté des croisades. J’aimerais bien le voir, un
jour.
    — Alors, je vous le rapporterai, dit Thomas d’un ton
amer, tout comme je rapporterai notre lance.
    Sir Giles contempla la mer. Les navires des assaillants
étaient repartis depuis longtemps et on ne voyait plus à cet endroit que le
soleil et les vagues.
    — Pourquoi a-t-il fallu qu’ils viennent ici ?
demanda-t-il.
    — Pour la lance.
    Sir Giles avait le visage rouge, les cheveux blancs et son corps
avait pris de l’embonpoint.
    — J’ai peine à y croire, c’était juste une vieille
pique, rien de plus.
    — C’était vraiment une relique, insista Thomas, c’est
pour cela qu’ils sont venus.
    Sir Giles se garda d’argumenter. Il changea de sujet :
    — Ton père aurait aimé que tu finisses tes études.
    — Mes études sont finies, répondit Thomas d’un

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