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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges
Autoren: Bernard Cornwell
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Prologue
    Le trésor de Hookton fut volé au matin du jour de Pâques
1342. C’était une sainte relique suspendue aux poutres de l’église, et il était
d’ailleurs extraordinaire qu’un objet si précieux ait été conservé dans un
village si obscur. Certains disaient qu’il n’avait rien à faire à cet endroit,
qu’il aurait dû être conservé pieusement dans quelque cathédrale ou grosse
abbaye, mais d’autres, bien plus nombreux, disaient qu’il n’était pas
authentique. Seuls les esprits simples contestaient que les reliques fussent
des faux. De beaux parleurs parcouraient les chemins d’Angleterre pour vendre
des os jaunis présentés comme une phalange, un orteil ou une côte d’un saint
vénéré. Parfois il s’agissait d’os humains mais le plus souvent ils provenaient
d’un porc ou même d’un cerf ; cela n’empêchait pas le peuple de les
acheter et de leur adresser des prières. « Ils feraient aussi bien de
prier saint Glinglin, disait le père Ralph avec un rire moqueur. Ce sont des os
de jambon qu’ils prient, des os de jambon ! Le saint Cochon ! »
    C’était le père Ralph qui avait apporté le trésor à Hookton.
Quand il fut question de le transférer dans une cathédrale ou une abbaye, il ne
voulut pas en entendre parler. Et c’est ainsi que pendant huit années il resta
accroché dans la petite église en se couvrant de poussière et de toiles
d’araignée qui luisaient comme de l’argent quand un rayon de soleil descendait
de la haute fenêtre de la tour ouest. Des moineaux se perchaient sur le trésor
et certains matins on trouvait des chauves-souris suspendues à sa hampe. On le
nettoyait rarement et plus rarement encore le descendait-on, même si, une fois
de temps en temps, le père Ralph demandait qu’on dresse une échelle et qu’on le
décroche de ses chaînes. Penché sur lui, il disait une prière et passait
doucement sa main sur l’objet. Il ne se vantait jamais de posséder ce trésor.
D’autres églises ou des monastères s’en seraient servis pour attirer les
pèlerins, mais le père Ralph renvoyait les visiteurs. Lorsqu’un voyageur
l’interrogeait sur la relique, il répondait : « Ce n’est rien, juste
une babiole, rien du tout. » Et, si le visiteur insistait, il se mettait
en colère : « Ce n’est rien. Rien, rien, rien ! » Même
quand il n’était pas en colère, le père Ralph était un homme impressionnant
mais, quand l’irritation s’emparait de lui, il se transformait en un être
furieux à la chevelure hirsute et ses éclats protégeaient le trésor. Pourtant, le
père Ralph était persuadé que l’ignorance était la meilleure des garanties et
que si les hommes n’en avaient pas connaissance, Dieu assurerait sa bonne
garde. Et c’est bien ce qu’il a fait. Du moins pendant un certain temps.
    La meilleure protection du trésor, c’est qu’il se trouvait
dans une obscure bourgade. Ce minuscule village était situé sur la côte sud de
l’Angleterre, à l’endroit où la Lipp, un cours d’eau qui a presque la dimension
d’une rivière, se jette dans la mer au milieu d’une plage de galets. Le village
possédait une demi-douzaine de bateaux de pêche, protégés la nuit par le Hook [1] ,
une langue de galets qui s’avançait en s’incurvant devant l’embouchure de la
Lipp. Malgré cela, lors de la fameuse tempête de 1322, la mer avait submergé le
Hook et fracassé les bateaux en les jetant sur la plage. Le village ne s’était
jamais remis de cette tragédie. Avant la tempête, dix-neuf bateaux faisaient
voile au départ du Hook, mais, vingt ans plus tard, il n’y avait plus que six
petites embarcations pour fendre les vagues au-delà de la barre dangereuse de
la Lipp. Le reste des villageois travaillait dans les marais salants ou bien
faisait paître moutons et vaches dans les collines situées derrière les
chaumières de pisé qui se blottissaient autour de la petite église en pierre où
le trésor était suspendu à des poutres noircies. C’était cela Hookton :
des bateaux de pêche, du sel et de l’élevage, avec de vertes collines derrière,
de l’ignorance à l’intérieur et la vaste mer devant.
    Dans ce village, comme partout dans la chrétienté, il y
avait une vigile la veille de Pâques et, en cette année 1342, ce service fut
assuré par cinq hommes qui regardèrent le père Ralph consacrer le pain et le
vin de Pâques et les poser sur l’autel drapé de blanc. Les hosties
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