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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges
Autoren: Bernard Cornwell
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de cet ange qu’on avait aperçu au-dessus des toits à Lyme.
    — Je pense qu’ils avaient trop bu, dit Edward.
    — Moi aussi, je vois des anges quand j’ai bu, remarqua
John.
    — Cette Jane, reprit Edward, elle ressemble à un ange,
pour sûr.
    — Pour la conduite, elle n’en est pas un, répondit
John. La fille est enceinte.
    Les quatre hommes se tournèrent vers Thomas qui regardait
d’un air innocent le trésor suspendu aux poutres. À vrai dire, il avait peur
que l’enfant soit de lui et il était terrifié à la pensée de ce que dirait son
père quand il le découvrirait. Mais, ce soir-là, il fit comme s’il ignorait
l’état de Jane. Il se contentait de regarder le trésor à demi masqué par un
filet de pêche qu’on avait suspendu aux poutres de l’église pour le faire
sécher.
    Peu à peu, les quatre hommes succombèrent au sommeil. Un
courant d’air froid agita les flammes des deux cierges. Un chien se mit à
hurler quelque part dans le village. On entendait le bruit incessant de la mer.
Les vagues venaient frapper les galets, se retiraient dans un raclement,
faisaient une pause et venaient frapper à nouveau. Thomas écouta les
ronflements des quatre hommes et pria le ciel que son père n’apprenne jamais
rien au sujet de Jane, bien que cela fût peu probable car elle insistait pour
qu’il l’épouse et lui ne savait que faire. Peut-être, pensa-t-il, devrait-il
s’enfuir, tout simplement ; prendre Jane et son arc et partir, mais il ne
pouvait se décider. Alors il se contenta de regarder la relique au plafond de
l’église et se mit à prier son saint patron pour lui demander de l’aide.
    Le trésor était une lance. Une énorme chose, avec une
poignée épaisse comme un avant-bras et longue comme deux hommes. Elle était en
frêne, probablement, bien qu’elle fût si ancienne qu’on ne pouvait en être
certain. Le temps avait un peu tordu la poignée noircie et la pointe n’était ni
en fer ni en acier ; c’était une pièce en argent terni, effilée comme une
aiguille. La poignée n’avait pas de renflement pour protéger la main, elle
était droite comme celle d’une pique. En fait, cette relique ressemblait
beaucoup à une grande pique à bœuf, mais jamais un fermier n’aurait mis une pointe
en argent sur une pique à bœuf. C’était bien une arme, une lance.
    Mais pas n’importe quelle lance. Il s’agissait de la lance
avec laquelle saint Georges avait tué le dragon. C’était la lance de
l’Angleterre, car saint Georges était le saint patron de l’Angleterre et cela
en faisait un très grand trésor, même si elle se trouvait accrochée sous le
toit peuplé d’araignées de l’église de Hookton. Bien des gens prétendaient
qu’elle ne pouvait pas être la lance de saint Georges, mais Thomas, lui, le
croyait et il se plaisait à imaginer la poussière soulevée par les sabots du
cheval et la gueule du dragon crachant les flammes de l’enfer tandis que le
cheval se cabrait et que le saint retirait sa lance. Le soleil, brillant comme
une aile d’ange, embrasait le casque de saint Georges, et Thomas entendait le
rugissement du dragon, le claquement de sa grande gueule en forme de crochet,
le hennissement de terreur du cheval et il voyait le saint se mettre debout sur
ses étriers avant de plonger la pointe d’argent de la lance dans le flanc
racorni du monstre. La lance allait droit au cœur et le cri de douleur du
dragon montait jusqu’au ciel pendant qu’il se tordait, perdait son sang et
expirait. Puis la poussière retombait et le sang du dragon formait une croûte
sur le sable du désert. Saint Georges retirait la lance qui, d’une manière ou
d’une autre, avait fini par venir entre les mains du père Ralph. Mais
comment ? Le prêtre ne voulait pas le dire. Pourtant elle était bien là,
cette grande lance noircie, assez lourde pour briser les écailles d’un dragon.
    C’est ainsi que, cette nuit-là, Thomas priait saint Georges
pendant que Jane, dont le ventre commençait à s’alourdir d’un enfant à naître,
dormait dans la salle de la taverne et que le père Ralph hurlait en rêvant que
des démons l’encerclaient dans la nuit. Les renards criaient dans les collines
tandis que les vagues, interminablement, venaient griffer et lécher les galets
sur le Hook. C’était la nuit de Pâques.
    Thomas fut réveillé par les coqs du village. Il vit que les
cierges étaient presque entièrement consumés sur leurs supports d’étain.
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