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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler
Autoren: Michel Folco
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réfléchir.
    Les deux comploteurs s’assirent en terrasse et commandèrent deux cafés. Autour d’eux, des clients coiffés de fez fumaient le narguilé, les yeux flous, un genou replié à la hauteur du menton, les pieds embabouchés.
    – Pourvu qu’ils soient assez autrichiens pour ne rien changer à leur programme.
    – Si la visite au musée n’est pas annulée, ils repasseront forcément par ici.
    Des gens couraient sur le quai Appel, lançant à la ronde « On a bombardé l’archiduc, et ça a raté ! » Vivant un événement qu’ils n’oublieraient jamais, ils voulaient en faire partie en étant les premiers à annoncer l’extraordinaire nouvelle.
    ***
    À l’instant où le serveur déposait deux tasses de café turc sur la table ronde, à l’instant où l’archiduc et la duchesse Sophie montaient les marches conduisant à la salle de réception de l’hôtel de ville, Adolf, à Munich, poussait la porte du café Kalimdor dans la Schleissheimerstrasse, où il avait ses habitudes. En échange d’un café au lait (quinze Kreuzer ) il pouvait rester le temps qu’il voulait et lire la presse mise à la disposition des clients.
    Sa place habituelle près de la vitrine étant occupée par trois artistes à l’accent slave et aux cheveux longs et sales,
Adolf se contenta d’une place dans le fond, proche des sanitaires. Il prit au passage le seul exemplaire disponible du Münchner Post et le lut de la première à la dernière ligne, y compris les publicités et les petites annonces (son père ne s’y prenait pas autrement). Il avalait sa dernière gorgée de café au lait quand il vit Rudi se faufiler entre les tables occupées.
    – Je savais que tu serais là, dit le jeune homme en s’asseyant.
    Adolf le dévisagea d’un regard rappelant celui d’un naja adulte qui a la queue prise dans une tapette à rat.
    – Laisse-moi deviner, tu as besoin d’argent ?
    Rudolf sourit en essuyant avec un pan de sa chemise les verres de ses lunettes.
    – Pas beaucoup, cinq Mark suffiront. Je te les rendrai à la fin de la semaine.
    – Quand exactement ?
    – Je te les rendrai samedi, d’ici là j’aurai vendu la Hofbräuhaus et la Feldherrnhalle.
    Il mentionnait deux aquarelles terminées la semaine dernière et qu’il n’avait pas encore écoulées.
    Pragmatique, Adolf lui compta cinq Mark . Rudi était son unique vendeur, et il lui était indispensable pour survivre à Munich.
    Rudolf empocha l’argent.
    – Merci, Adi… et si tu le veux je peux te dire ce que je vais en faire.
    – Je t’écoute.
    – Grâce à toi, je vais perdre mon pucelage… enfin.
    Adolf cacha son embarras en baissant la tête.
    – Pourquoi maintenant ?
    Rudolf eut un bon sourire.
    – Faut bien commencer un jour, et puis j’ai déjà dix-neuf ans.
    Adolf remua sur sa chaise, le regard fuyant. Il avait vingt-cinq ans et il était encore vierge.
    – Tu as donc rencontré quelqu’un ?
    Rudolf cessa de sourire, retira ses lunettes et recommença à les nettoyer.
    – Hélas non. Je ne suis pas comme toi, moi, je ne leur plais pas.
    Rudolf rechaussa ses lunettes. Il ne comprenait pas pourquoi son ami ne profitait jamais de l’attirance qu’il suscitait auprès des femmes. Adolf semblait ne rien voir et se bornait à une grande politesse qui allait du baisemain au claquement de talons accompagné d’une brève inclinaison de la nuque.
    – Je ne comprends pas.
    Rudolf haussa les épaules.
    – Je vais me payer une putain.
    Adolf leva la tête et lui fit les gros yeux.
    – Non, Rudi, je t’assure que ce n’est pas une bonne idée. Les risques sont trop grands.
    – Quels risques ?
    – D’attraper le microbe de la blennorragie, ou pire, la syphilis ! Je sais de quoi je parle, j’ai lu deux livres entiers sur le sujet.
    – Et ?
    Adolf fit mine de se prendre la tête à deux mains.
    – Mais tu ne comprends donc rien ! Tu sais ce qui se passe quand on attrape une telle maladie ?
    – Non.
    – Toute ta vie est fichue ! Tu ne peux plus te marier, tu ne peux plus fonder une famille, tout le monde te rejette ! Alors si c’est ça que tu veux faire de ta vie, c’est ça que tu vas avoir !
    Peu convaincu, Rudolf leva l’index afin d’objecter quelque chose de pertinent lorsqu’au même instant, à la même seconde, à Sarajevo, face à un archiduc furibond, le
maire musulman Fehim Effendi Curcic commençait la lecture de son discours de bienvenue.
    – L’insigne honneur qui
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