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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler
Autoren: Michel Folco
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de trottoir. À partir de là, attention, vous avez treize secondes avant l’explosion). Afin d’évaluer le temps, Milan Ciganovic leur avait demandé de fermer les yeux et de compter jusqu’à treize (Vous voyez, quand chaque seconde compte, c’est long, treize secondes).
    Cabrinovic monta sur le parapet et, la main en visière, il s’offrit une vue d’ensemble du quai. Cent mètres en amont, il reconnut les silhouettes des deux lycéens Vaso Cubrilovic (dix-sept ans et six mois) et Cvetko Popovic (dix-sept ans et cinq mois). En dépit de leur totale inexpérience, chacun d’eux avait reçu une bombe et un pistolet Browning.
    C’est très injuste, rumina Cabrinovic en vérifiant la présence dans sa poche de poitrine de la capsule de cyanure. Son plan était parfait : il tuerait l’archiduc avant tous les autres, il avalerait la capsule de cyanure et, pour faire bonne mesure, il se jetterait dans la Miljacka en criant : « Vive la Serbie libre ! »
    Les unes après les autres, les églises catholiques et orthodoxes sonnèrent leurs cloches, rappelant à leurs fidèles que la grand-messe dominicale allait commencer. Un rappel
bientôt imité par les muezzins qui, faute de cloches, les mains en porte-voix, devaient s’époumoner du haut de leurs minarets…
    ***
    Partageant le même fuseau horaire et à plusieurs centaines de kilomètres du quai Appel et de Sarajevo, les églises catholiques munichoises sonnèrent 10 heures avec un enthousiasme que certains ne partageaient pas… Au troisième étage du 34 de la Schleissheimerstrasse, allongé sur son lit, Adolf interrompit sa lecture et se leva pour aller fermer l’unique fenêtre qui donnait sur la rue, assourdissant un peu l’intempestif boucan dominical. Il retourna s’allonger et reprit son livre, un pamphlet intitulé Pour en finir une bonne fois pour toutes avec les artistes .
    Ces scandaleuses cent quatre-vingt-dix pages étaient l’œuvre d’un scientifique gaulois, le professeur Johann Gimpel qui, avec un aplomb écœurant, assurait ses lecteurs que la totalité des artistes n’étaient que des inadaptés pathologiques qui trouvaient dans l’art une vulgaire compensation à leurs problèmes existentiels. Toutes les existences problématiques, équivoques, tarées, tous les faibles, les malades, les dégénérés, les aventuriers, les escrocs, les criminels ont une parenté spirituelle avec l’artiste.
    Adolf n’en revenait pas d’une telle outrecuidance ! Il avait l’impression d’avoir reçu le contenu d’une poubelle de restaurant sur la tête. Il gigotait d’indignation sur son mince matelas vierge de toute punaise (on était en Allemagne ici !).
    Les artistes forment une classe à part, impérieuse par l’idéal, mais inférieure par la raison et la moralité. Vous pouvez vous entendre avec un philosophe, un savant, un entrepreneur d’industrie, un militaire, un
légiste, un économiste ; avec tout ce qui calcule, raisonne, combine, suppute ; mais avec un artiste, c’est impossible.
    Le comportement de l’artiste résulte d’une conviction irréversible d’être fait d’une essence supérieure qui n’a pas de comptes à rendre aux simples mortels. L’artiste prétend être prédestiné à l’être : il affirme, sans rire, qu’être artiste n’était pas une profession, mais plutôt une vocation…
    L’auteur démontrait qu’artiste avait d’abord été une profession, certainement pas une vocation. Il citait l’époque des bâtisseurs de cathédrales où les peintres et les sculpteurs (les tailleurs d’images) étaient qualifiés d’ouvriers manuels, traités comme tels ; par exemple, les peintres de fresques, jamais signées, étaient payés au mètre.
    Les neurones surchauffés au rouge, agacé comme une fourmi un jour d’orage, Adolf quitta son lit et arpenta fébrilement la petite chambre. Depuis le départ de Rudi, il avait un peu plus de place pour déambuler. Les mains dans le dos, la bouche crispée, les dents serrées, il enrageait de ne pouvoir vertement répliquer à l’auteur, là, maintenant, tout de suite, d’un grand coup de poing sur l’appendice nasal !
    Adolf ne lisait jamais pour se distraire, persuadé que sa mémoire, semblable à un muscle, augmentait sa puissance à mesure qu’augmentaient ses connaissances. Aussi, chaque fois qu’il lisait, il gardait à portée un crayon et un carnet dans lequel il notait ce qui l’étonnait, ou ce qu’il estimait pouvoir lui
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