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La Fille de l’Archer

La Fille de l’Archer

Titel: La Fille de l’Archer
Autoren: Serge Brussolo
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une délivrance.
    Les survivants de la troupe se retrouvent en bas. Javotte et ses filles ont récupéré dans le garde-manger tout ce qu’elles étaient en mesure de transporter. Le moral est au plus bas. Les baladins quittent le château en enjambant les corps de leurs compagnons. Wallah n’éprouve aucune tristesse. Ces hommes la méprisaient et leurs attouchements lui étaient odieux. Elle ne versera pas une larme.
    L’un derrière l’autre, ils s’engagent sur le chemin qui va les ramener au bois des sorcières. Wallah regarde souvent par-dessus son épaule, s’attendant à voir surgir le chien de guerre. Mais non, il ne se montre pas. Sans doute a-t-il fini par mourir, prisonnier de la chambre des amants, perdant son sang par les blessures que lui a infligées Jehan avant de rendre l’âme.
    Oui, c’est sûrement ce qui s’est produit. On ne le reverra pas. Ou alors, en ce moment même, il est couché près du cadavre de son maître, au sommet du pic de Mauperthuis, et se laisse mourir.
    Non, on ne le reverra pas…
    Malgré elle, Wallah presse le pas. Elle voudrait déjà être dans la plaine, tournant le dos à la montagne, en route vers une autre province.
    En dépit de ses craintes, ils atteignent la forêt sans encombre. L’odeur résineuse des arbres leur agace les narines. Les troncs serrés rendent la marche difficile. Tout à coup, une silhouette sort d’un taillis. Wallah reconnaît la mère Toine, qui l’avait mise en garde lors de la première traversée. La vieille la dévisage d’un air horrifié qui plonge l’adolescente dans la perplexité.
    — Toi ! glapit-elle. Toi ! Il ne t’a pas tuée ? Tu es la première à revenir… La seule qui ait survécu… Mais alors, cela veut dire…
    La veuve Toine bat en retraite, poussant des cris d’alarme qui demeurent incompréhensibles pour les saltimbanques. Pourquoi les accueille-t-on ainsi ? Ils n’ont pourtant rien d’effrayant !
    Très vite, les ramasseurs de fagots se rassemblent, dardant sur les baladins des regards soupçonneux.
    — Elle est revenue ! ulule la vieille à l’intention des paysans regroupés autour d’elle. Vous ne comprenez donc pas ? Ça veut dire qu’elle est possédée ! Pour survivre, elle a embrassé le cul du démon. Ils sont tous possédés ! Les bons chrétiens ne reviennent jamais ! Qu’est-ce que vous attendez ? Vous allez les laisser se répandre dans nos campagnes ? S’introduire la nuit dans nos maisons ? Incubes, succubes, goules… voilà ce qu’ils sont aujourd’hui. C’était le prix à payer pour rester en vie. Le baron les a convertis. Ils travaillent pour lui, aujourd’hui. Pourquoi croyez-vous qu’ils reviennent sinon pour faire son marché ? Ils voleront vos enfants ! Envoûteront vos filles, vos fiancées ! De la viande à sacrifices, c’est cela que leur maître les a envoyés chercher. Ce sont les serviteurs du dévoreur à présent ! Ils le nourrissent avec notre chair !
    Wallah et ses compagnons s’immobilisent, frappés de stupeur. Ils ne s’attendaient pas à un tel accueil.
    — Il faut les brûler ! vocifère la vieille. Ne les laissez pas sortir de la forêt ! Qu’ils retournent chez leur maître !
    Abandonnant les fagots, les paysans ont reflué en désordre vers la lisière. La terreur se lit sur le visage des plus âgés, mais les jeunes, eux, ont déjà pioché des tisons dans le feu de camp allumé près des charrettes. Les voilà qui lancent ces projectiles en direction des baladins. Wallah ne réagit pas, convaincue que les brandons s’éteindront en touchant l’herbe humide de rosée. Elle est décontenancée quand elle voit les buissons s’enflammer en crépitant. Ainsi la mère Toine disait vrai : la végétation jouit d’un exceptionnel pouvoir d’embrasement !
    Le temps qu’elle se reprenne, une ceinture de feu les entoure déjà, s’étendant à une vitesse effroyable. La chaleur les oblige à reculer. En un clin d’œil l’air est irrespirable, saturé d’étincelles et de flammèches, à croire que les arbres ont été aspergés d’huile !
    — En arrière ! hurle Bézélios. Il faut retourner sur la montagne ! La caillasse arrêtera la progression du feu !
    Il a raison. Les flammes s’éteindront dès qu’elles commenceront à lécher la roche. Le problème, c’est que, devant ou derrière, la forêt n’est désormais qu’un immense bûcher, et qu’il n’est plus possible de faire demi-tour. La tenaille
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