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La croix de perdition

La croix de perdition

Titel: La croix de perdition
Autoren: Andrea H. Japp
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fond consternante affaire. La fascination d'un homme sans véritable grandeur pour un lointain ancêtre auréolé d'une gloire sanguinaire, son désespéré besoin de gloire, d'exception. Un homme si convaincu par sa propre mystification qu'il devenait une redoutable maladie capable de contaminer les esprits faibles et aurait pu ébranler les fondements de notre Sainte Mère l'Église. Sachez seulement que les forces du bien en sont sorties victorieuses.
    – Voilà qui ne m'éclaire guère, lâcha Plaisance avec ironie. Toutefois, je doute qu'une insistance de ma part infléchisse votre décision de vous taire.
    – Avec votre pardon, acquiesça le médecin, sans toutefois faire l'effort de paraître embarrassé. Sur ordre de notre Saint-Père. Ainsi, deux autres meurtres semblables sont survenus en mon absence ? Me permettez-vous de m'entretenir avec vos deux apothicaires ?
    – Je vous en supplie, monsieur. Je redoute la suite.
    – D'autres assassinats ?
    – Peut-être, ou de devoir châtier une fille ou plusieurs avec une sévérité que je ne pourrais atténuer étant entendu leurs impardonnables péchés. Je vous l'avoue sans hésiter : décider de la mort d'un être, aussi coupable soit-il, est une extrémité. J'ai toujours prié pour qu'elle me soit épargnée.
    – Je vous comprends et vous admire, madame, remarqua Arnoldus de Villanova, pleinement sincère pour la première fois de cette entrevue.
    Un petit coup discret frappé à sa porte tira Alexia de Nilanay de son aimable rêverie : il serait là bientôt. La gronderait-il pour sa stupide obstination ? Au contraire, serait-il si ravi de la revoir enfin que son sourire l'envelopperait et que les souvenirs de ses jours terribles n'y résisteraient pas et s'envoleraient ? Lui saurait. Rien ne lui était impossible. Aimery de Mortagne ne laisserait aucune chance au monstre qui avait tué à trois reprises. Alexia en était certaine. Sous ses manières charmantes et civiles, se terrait un fauve parfaitement dompté mais dont les crocs acérés n'avaient jamais perdu leur férocité. Elle l'avait senti dès que son regard avait croisé le sien, alors qu'elle se tenait devant lui telle une coupable, quelques semaines auparavant, une éternité plus tôt.
    Marguerite Bonnel passa la tête par l'entrebâillement de la porte à son invitation. Dieu du ciel, elle semblait avoir tant vieilli depuis le trépas de sa sœur que le cœur d'Alexia se serra de chagrin. La jeune femme se porta à la rencontre de la sœur hôtelière qui demanda d'une voix incertaine :
    – Je suis confuse de vous déranger, ma bien chère. Peut-être souhaitez-vous le coucher ? C'est que… le sommeil me fuit. Les potions d'Hermione semblent insuffisantes à y remédier. Mes nuits sont interminables et affreuses. D'autant que ma charge me contraint à dormir dans ce bâtiment plutôt qu'en compagnie de mes sœurs qui m'eussent apporté le réconfort de leur proximité. Je… Je me demandais si un gobelet d'infusion, bu en ma compagnie… oh, mais je m'en veux ! Je m'impose à vous, pathétique vieillarde que je fais.
    – Non pas, non pas ! s'exclama Alexia. En vérité, un bon gobelet me ferait grand plaisir.
    Un pauvre sourire éclaira le visage sans grâce, que toute sa joie avait déserté depuis le décès de Rolande.
    – Je cours les quérir. J'y ajouterai quelques pâtes de prunes et de noix que notre bonne Clotilde Bouvier m'a fait porter. Elles sont savoureuses. Grand merci à vous, Alexia.
    Elles devisèrent de choses et d'autres, Alexia tentant d'alléger un peu le chagrin de cette femme brisée. Toutefois, il devint vite évident que Marguerite n'avait qu'une envie, raconter encore et encore les charmants souvenirs d'enfance qui la liaient à sa cadette. Alexia se tut, lui faisant le cadeau de l'écoute, l'encourageant parfois d'un mouvement de tête, saluant la réminiscence d'une gentille bêtise de fillettes d'un petit rire. Elle regardait la femme qui ne vivrait plus que dans son passé parce que le présent était devenu trop douloureux. Une immense compassion l'envahit lorsqu'elle se rendit compte que personne ne pourrait plus rejoindre Marguerite dans sa peine.
    L'hôtelière récupéra son gobelet et le porta à sa bouche avant de poursuivre son monologue. Le geste banal troubla Alexia. En réalité, un détail, ce détail l'avait étonnée plus tôt, si anodin qu'il s'était contenté de lui traverser l'esprit. La reprise à la manche droite.
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