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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac
Autoren: Anne Tremblay
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satisfaction éclaira le visage du curé. Il tapota l’épaule
     du vaincu en lui disant :
    — Là, vous parlez, mon brave, ça vous sera rendu au centuple. Je dois vous
     quitter astheure, je repasserai demain comme promis.
    — J’vous raccompagne, monsieur le curé.
    Ainsi, il était hébergé chez une famille nommée Mailloux, drôle de nom qui rime
     avec caillou, se dit Patrick O’Connor tandis que le bruit des pas s’estompait au
     rythme des marches que les hommes descendaient. Une insoutenable soif le
     tenaillait et il aurait voulu qu’on lui apporte à boire. Peut-être que c’eut été
     cette Joséphine censée s’occuper de lui, qui lui aurait tendu un verre d’eau, la
     main passée derrière sa tête… le buste penché sur lui… Joséphine… une jeune
     fille pure, vierge probablement, de beaux grands cheveux blonds, une taille
     fine, des seins ronds et fermes… Oh, oui il l’imaginait, cette Joséphine…
     Peut-être qu’il n’était pas si malade après tout, se dit-il en se rendormant, un
     rêve érotique pointant sous les draps.

    — Monsieur, monsieur, il faut vous réveiller, monsieur,
     monsieur…
    Monsieur… monsieur… quels étaient ces mots qui le tiraient de son
     sommeil ?
    — Ah, y se réveille enfin…
    Patrick O’Connor ouvrit péniblement les paupières qu’il avait tenues résolument
     closes pendant presque vingt longues heures. Allons, où était-il ? Ah oui ! le
     bateau, la fièvre, oui, le curé, il était là debout devant le lit. À ses côtés,
     un vieil homme, qui correspondait parfaitement à l’image qu’il s’était forgée, à
     n’en pas douter c’était monsieur Mailloux, son hôte, mais la jeune fille en
     retrait, près de la porte, oh, là, là, il s’était trompé du tout au tout. Elle
     était rougeaude, boulotte et loin d’être blonde, il n’aurait pu imaginer pire !
     Finis les beaux rêves ! À moins que ce ne soit pas la Joséphine en question… Ah,
     pourvu que ce ne soit pas elle !
    — Alors, mon brave, ça va mieux ? demanda le curé d’un air satisfait.
    — Oui, merci, répondit Patrick, gêné.
    Ils étaient là, tous les trois à le regarder, des inconnus, des étrangers, et
     lui, vulnérable. Tout à coup, il en eut assez de ce pays, de ces gens, il eut
     une envie folle de se retrouver chez lui avec sa famille.
    — Vous avez longtemps dormi, reprit le curé. Je vous présente monsieur
     Mailloux, qui a eu l’obligeance de vous accueillir dans sa maison, et voici sa
     fille Joséphine, qui vous traitera aux petits oignons, j’en suis certain.
    Et voilà, plus aucun doute ! « Oh, là, là, souhaitons au moins qu’elle sache
     cuisiner ! » se dit le marin tout en souriant poliment à la jeune femme, qui
     baissa les yeux en rougissant.
    — Allons, ma fille, ne sois pas timide, enchaîna le curé. Va chercher un peu de
     ce bouillon que tu as préparé pour notre malade. Il doit s’alimenter, ordre du
     docteur, ajouta-t-il en retournant son attention vers Patrick, tandis que la
     jeune fille obéissait et partait à lacuisine. Maintenant que
     nous sommes entre hommes, tous les trois, nous allons régler certains points.
     Vous savez que la situation est délicate. Joséphine est une jeune fille comme il
     faut et je ne veux pas de commérages dans ma paroisse. Je me suis porté garant
     de son honneur, je me fais bien comprendre, n’est-ce pas mon brave ?
    Prenant son air le plus sévère, le curé attendit la réponse.
    — Oui, mon père, moé être sans reproche, assura le marin tout en pensant : « Si
     vous craignez pour la vertu de cette baleine, pas de danger ! Il faudrait être
     mal pris pour songer à cette possibilité. »
    — Vous parlez drôle, intervint pour la première fois monsieur Mailloux. D’où
     c’est que vous venez ?
    Patrick le sentit méfiant. Il lui fit son plus honnête sourire et lui
     répondit :
    — Irlande. Beau pays, mais très loin. Moé aimer aventure, moé travailler sur
     bateau.
    Tout à coup, il se rappela l’existence de son sac. Où était-il ? Toutes ses
     précieuses affaires ?
    — Mon sac, où être mon sac ? demanda-t-il anxieusement.
    — Un sac ? répéta le curé. Oh non, mon brave, on vous a retrouvé avec seulement
     votre linge sur le dos. Allons, ajouta-t-il devant la mine déconfite du
     convalescent, bénissez le Seigneur d’être encore en vie et d’avoir été recueilli
     par de si braves gens. On doit se
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