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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable
Autoren: Anne Tremblay
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décidé
     à garder son contrat avec la compagnie.
    Les requêtes que nous venions porter aux ministres et qui étaient appuyées par
     tout le comté, demandaient au gouvernement de faire évacuer nos propriétés et de
     faire réparer les dommages causés : tout ce que nous avons pu obtenir, c’est que
     des arbitres viennent fixer la valeur des dommages faits à la récolte de
     l’année. Nos ministres ont montré que les 45,000 Canadiens-Français [ sic ]
     qui habitent le comté du Lac-Saint-Jean pèsent bien peu dans leur estime à côté
     d’un millionnaire étranger.
    Nous voyons chez nous la répétition du scandale du Nord-Ouest. Des arpenteurs
     sont arrivés sur les terres des Métis : ils ont divisé lesterres habitées, bouleversé les propriétés, et une partie de ces terres ont
     été données à des colons étrangers venus d’ailleurs. Les Métis ont réclamé
     pendant un an en vain. Voyant que le gouvernement ne daignait pas leur répondre,
     ils se sont soulevés. Ils ont été accusés de révolte et vaincus. Le gouvernement
     d’Alors, pour se donner raison, a sacrifié la tête d’un brave patriote... Peu de
     temps après, on a rendu aux Métis ce qu’ils avaient réclamé en vain... — Nous
     voyons chez nous la même chose : des étrangers se rendent maîtres de nos
     propriétés... C’est le scandale qui se répète, avec cette différence que les
     terres des Métis restaient à l’agriculture et au pays tandis que les nôtres sont
     anéanties sous l’eau, et cette différence encore, que les Métis n’étaient que
     « squatters » tandis que nous sommes propriétaires.
    Telle qu’elle est, la question n’est pas réglée du tout. Elle ne le sera jamais
     si on ne la règle pas selon la justice.
    On a dit : Vous allez être indemnisés ; on va payer les dommages.
    — Il y a des dommages qui ne se payent pas. Quand un homme, par des années de
     travail, a organisé sa carrière et qu’il a assuré l’avenir de ses fils autour de
     lui attachés au sol malgré toutes les tentations de la ville, qu’il se réjouit
     de les voir sous ses yeux mener une vie sérieuse, honnête, chrétienne... Et que
     tout d’un coup, à cause de la ruine d’une partie du domaine de la famille, il en
     voit un ou deux, ou ses filles prendre le bord de la ville, exposés à tous les
     dangers pour leurs corps et pour leurs âmes, il se passe dans le cœur d’un père
     et d’une mère quelque chose que l’argent n’est pas capable de compenser. La
     désorganisation d’une carrière, surtout le démembrement d’une famille, ce sont
     des choses qui ne peuvent être évaluées ni dédommagées.
    Il y a encore les torts qui atteignent les organisations paroissiales et
     municipales, les fromageries, les routes, etc. Qui est-ce qui va évaluer cela ?
     Comment peut-on réparer tout cela ?
    Une autre cause de difficultés graves et interminables, où le cultivateur aura
     toujours le dessous, c’est que l’élévation du lac fait quenous
     devenons voisin de la compagnie. Elle a le lac, nous avons la terre. Chaque fois
     que pour obtenir plus de rendement elle s’avisera d’excéder la limite fixée,
     nous souffrirons de nouveaux empiètements. Nous nous plaindrons. Le gouvernement
     nous répondra comme maintenant qu’il est lié par son contrat. Il faudra plaider
     ou bien endurer sans rien dire. Pouvons-nous consentir à devenir ainsi esclaves
     d’une compagnie ?... Jamais !
    Cette compagnie a commis un acte criminel. Le code criminel dit : « Si
     quelqu’un, individu ou compagnie, empiète sur la propriété d’un particulier, il
     commet un méfait ; et le propriétaire peut toujours exiger l’évacuation de sa
     propriété envahie et la démolition des ouvrages... » C’est le devoir du
     gouvernement de faire respecter la propriété et de punir les violateurs de la
     justice.
    Pour une bouteille de boisson vendue en contravention, on mobilise la police,
     on institue un procès et le coupable est condamné. Mais si c’est une compagnie
     qui s’empare de la propriété non pas d’un seul mais de centaines de
     cultivateurs, sans permission, sans avis, on n’agit pas ; bien au contraire on
     prend sa défense, on appelle cela du « progrès industriel »...
    J’ai assisté il y a peu d’années à un congrès de colonisation, où à propos de
     la désertion des campagnes, un de nos hommes politiques disait : « Le but de
     cette
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