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La canne aux rubans

La canne aux rubans

Titel: La canne aux rubans
Autoren: Jean Grangeot
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heures du
matin, rue des Tanneurs à Saint-Aignan, enfant légitime d’Adolphe Bernardeau et
d’Anne Marguerite Bertrand. Ce garçon, comme la coutume le voulait, porterait
le même prénom que son père.
    Les témoins signèrent puis rejoignirent les autres.
    Blois La Science leur déclara avant de sortir :
    — Souvenez-vous bien, tous ici réunis, que lorsque le
gosse sera grand et qu’il se fera recevoir compagnon, le nom de Blois lui sera
réservé. S’il est très instruit on pourra ajouter « La Science ».
J’ai dit.
    Chacun murmura un vague serment et le défilé se reforma pour
descendre la grande rue. La neige avait fondu. Seules de rares traces
subsistaient sur les branches des arbres exposées au nord.
     
    À quelque temps de là, alors que Blois La Science et ses
compagnons étaient au travail sur une tour du château, le prince de Chalais le
fit demander. Sur le moment, Blois fut surpris, car ce n’était pas dans les
habitudes du châtelain de parler avec les ouvriers.
    Le prince de Chalais grand, sec, toujours vêtu d’un habit
noir bien coupé, portait autour du cou une petite écharpe blanche nouée
retombant devant en jabot. Cet homme aussi noble que pieux avait perdu en 1852
son épouse et trois de ses enfants lors d’une épidémie de choléra. Son sourire
s’était éteint mais sa voix avait conservé le ton du commandement.
    — Bonjour mon Prince, dit Blois respectueusement.
    Le châtelain commença son monologue par des compliments sur le
travail, le félicitant même de sa grande capacité.
    — Je vois que j’ai eu raison d’écouter les
recommandations de Monsieur Samson, l’architecte des Monuments historiques de
Paris. Rencontrez-vous de grandes difficultés, mon ami ?
    — Non, mon Prince, car j’ai avec moi des compagnons qui
connaissent bien leur affaire.
    — Je suis satisfait de vous entendre me répondre ainsi.
    Un bref silence suivit. Puis il reprit :
    — J’ai appris que récemment vous avez eu un fils, un
bel enfant à ce qu’on dit. La mère est-elle en bonne santé ?
    — Excellente, Monsieur le Prince.
    — J’ai appris également que vous l’aviez déclaré en
grande pompe à la mairie. Vous savez que le maire de Saint-Aignan fait partie
de mes amis et qu’il vient souvent me rendre visite.
    — Pour ce qui est de mon fils, mon Prince, ce sont mes
amis qui ont désiré cette conduite et je m’y suis prêté de bonne grâce.
    — D’autant plus que « bon chien chasse de
race » comme on dit par ici. Vous êtes compagnon ; votre père
l’était…
    — Et mon fils le sera peut-être, Monsieur le Prince.
C’est un souhait qui me tient à cœur.
    — On peut toujours espérer, mon ami ; cela
renforce la volonté. Je vous ai fait venir parce que j’ai une proposition à
vous faire.
    Blois La Science sentit des picotements sur sa nuque. Il se
dit : Tiens ! nous arrivons au vrai but. Que va-t-il me sortir ce
noblaillon ? Ça sent mauvais !
    Le prince de Chalais toussota légèrement et enchaîna :
    — Voulez-vous que je sois le parrain de votre fils et
que je pourvoie à son instruction ? Vous savez que j’ai perdu une grande
partie de ma famille. Il me serait donc agréable de m’intéresser à cet enfant
dont le père a toute mon estime. J’ai entendu parler de son grand-père. Une
forte tête… tandis que vous, vous êtes attentionné à votre travail, à vos
plans ; bref, si j’ose dire, je vous admire en silence.
    — C’est trop, Monsieur le Prince. Je ne fais que mon
travail. Je suis solide, ai, je pense une bonne tête, de bonnes épaules et un
bon cœur. Il faut tout cela pour mener à bien mon travail.
    — Voyons, est-ce entendu ? Vous ferez baptiser
votre fils lorsque la mère sera rétablie. Monsieur l’abbé s’occupera de tout
cela, il en a l’habitude.
    Blois sentit le piège se refermer sur lui. Pourtant il fit
l’impossible pour se contrôler et répondit d’une voix posée.
    — Mais Monsieur le Prince, j’ai le temps de faire
baptiser mon gosse. Rien ne presse.
    — Il faut pourtant que cela se passe ainsi, lança de
Chalais d’un ton sec.
    — Laissez-moi y penser ; nous nous reverrons.
    Le prince sortit un mouchoir de sa poche et se tamponna le
nez. Blois en profita pour faire demi-tour et retourna à son chantier laissant
son interlocuteur sur sa faim.
    Le lendemain, au milieu de la matinée, l’abbé frappa à la
porte de Nanette. Elle vint lui ouvrir.
    — Bonjour Monsieur
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