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Khadija

Khadija

Titel: Khadija
Autoren: Marek Halter
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brisée.
    Dans un effort surhumain qui lui laissa la bouche béante sur un cri silencieux, rassemblant ce qu'il lui restait de forces, il se propulsa en avant. D'un moulinet de son sabre, il tenta de faucher une patte du méhari de Muhammad. La bête sentit venir le coup. Elle s'écarta brutalement. Muhammad vida sa selle et chuta lourdement sur le sol, perdant son arme. Il cherchait à se redresser quand le pillard lança sa nimcha droit sur sa poitrine. Muhammad roula sur lui-même. La lame trancha le tissu de sa tunique à hauteur d'épaule et ripa sur une pierre dans un tintement d'étincelles.
    Muhammad l'entendit crisser dans la poussière rouge de sang. D'un même mouvement, il s'empara du sabre de son agresseur et se redressa. Les yeux fermés, les deux poings noués sur la nimcha, il se laissa tomber sur sa poitrine. Dans ses poignets il devina l'aisance avec laquelle le fer entrait dans la chair et brisait les os. Avec une rage qui faillit lui ôter toute conscience, il pressa l'arme de tout son corps, de toutes ses forces sur l'homme qui se débattait. Des doigts gluants cherchèrent sa gorge. Des mains trop faibles. Il y eut une secousse, un grand gargouillis de sang. C'était fini.
    Muhammad repoussa le cadavre et se mit à genoux. Au-dessus de lui, tout autour, les hommes de Yâkût combattaient à grands coups d'acier. Le temps d'un éclair, il voulut jeter le sabre du pilleur pour chercher sa dague. Mais son poing se crispa sur la poignée. Une émotion violente le secoua devant la dépouille de celui qu'il venait d'abattre. Pour la première fois de sa vie, il avait tué un homme.
     
    Il n'eut pas à combattre pour reprendre son méhari. Les assaillants qui avaient survécu au piège des chamelles tentaient maintenant de fuir.
    Sur l'autre aile, Bilâl avait tout aussi bien réussi que lui à briser la férocité des cavaliers. Leur débandade avait stoppé net la charge frontale des pilleurs. C'en était fini de leur raid. Tous, ils tentaient à présent d'échapper à la colère des hommes de Yâkût, que la victoire excitait comme des démons.
    Muhammad nettoya la lame de la nimcha avec le vêtement déchiré du cadavre. La tête encore bourdonnante de violence, il admira l'arme qui avait failli lui ôter la vie avant de le sauver. L'acier épais dont la courbe très douce évoquait la hanche d'une femme luisait dans le crépuscule avec un ondoiement d'eau sous la lune. De fines lettres, trop fines pour être lisibles dans la lumière évanescente du jour, étaient gravées dans le métal. Tout contre la garde, il remarqua un quillon d'acier plus clair avec deux boucles en forme de fleur de Jéricho. Une belle arme de valeur, comme seules en produisaient les grandes forges du pays de Sham. Une nimcha certainement volée lors d'une précédente razzia.
    Et le premier des biens acquis par Muhammad ibn `Abdallâh dans ce voyage qui n'était déjà comme aucun autre.
    Sentant le sang séché craqueler sur ses lèvres et ses joues, Muhammad fixa le ciel pourpre. Du fond du cœur il remercia la grande Al'lat. Elle avait décidé et choisi. Et lui, maintenant, il était impatient de savoir ce qu'en dirait Abu Nurbel et Al Sa'ib.

La déesse Al Ozzâ
    Suivie d'Ashemou, Khadija pénétra dans la lumière dorée des lampes à huile.
    — Seigneur Al Çakhr, sois le bienvenu dans ma maison de veuve !
    Abu Sofyan ne l'avait pas entendue approcher. Il sursauta légèrement. Son regard glissa sur le visage de Khadija pour fixer celui de la jeune Ashemou. Puis revint sur Khadija, courut sur la grande et austère robe noire et la mine sévère de son hôtesse. Il inclina doucement la tête, pressant la main sur sa poitrine barrée du baudrier, affichant toute l'apparence d'un sage respect.
    — Cousine bint Khowaylid ! La main d'Al`lat sur toi et ta maisonnée ! Tu vis dans un palais digne des reines de Yarim.
    — Tes mots sont faits pour flatter, seigneur Al Çakhr. Reine, je ne le suis pas, mais cette maison, il est vrai, est pareille à celles du pays de Yarim. Comme tu le sais, mon époux l'a fait construire par des maçons de là-bas.
    — Âmmar al Khattab, ton époux, était un sage.
    — Un sage que la Grande Assemblée de Mekka n'a pas su écouter comme elle l'aurait dû.
    — C'était il y a longtemps.
    — Trouves-tu ? Six années seulement qu'on lui a fermé les yeux. Pour moi, de toutes petites années. Elles sont passées comme une saison.
    Le ton paisible de Khadija décontenança Abu
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