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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth
Autoren: Walter Scott
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déjà. Les uns buvaient, les autres jouaient aux cartes, quelques uns causaient ; et d’autres, dont les affaires exigeaient qu’ils se levassent le lendemain de grand matin, finissaient de souper, et disaient déjà au garçon de préparer leurs chambres.
    L’arrivée de l’étranger fixa sur lui cette espèce d’attention indifférente qu’on accorde généralement en pareil cas à un nouveau venu, et voici quel fut le résultat de cet examen. – C’était un de ces hommes qui, quoique bien faits et d’un extérieur qui n’a rien de désagréable en lui-même, sont cependant si loin d’avoir une physionomie qui prévienne en leur faveur, que, soit à cause de l’expression de leurs traits, du son de leur voix, ou par suite de leur tournure et de leurs manières, on éprouve en somme une sorte de répugnance à se trouver en leur société. Il avait un air de hardiesse sans franchise, et semblait annoncer au premier abord de grandes prétentions aux égards et aux déférences, comme s’il eût craint de ne pas en trouver s’il ne faisait valoir à l’instant ses droits pour en obtenir. Son manteau de voyage {4} entr’ouvert laissait voir un beau justaucorps galonné, et un ceinturon de buffle qui soutenait un sabre et une paire de pistolets.
    – Vous voyagez bien pourvu, monsieur, dit Giles Gosling en jetant un coup d’œil sur ces armes, tandis qu’il plaçait sur la table le vin que le voyageur avait demandé.
    – Oui, mon hôte ; j’ai reconnu leur utilité dans le moment du danger, et je n’imite pas vos grands du jour, qui congédient leur suite du moment qu’ils croient n’en plus avoir besoin.
    – Oui-dà, monsieur, vous venez donc des Pays-Bas, du sol natal de la pique et de la coulevrine ?
    – J’ai été haut et bas, mon ami, d’un côté et puis d’un autre, près et loin ; mais je bois à votre santé un verre de votre vin. Emplissez-en un autre, et videz-le à la mienne. S’il n’est pas bon au superlatif, buvez-le encore tel que vous l’avez versé.
    – S’il n’est pas bon au superlatif, répéta Gosling après avoir vidé son verre, en passant la langue sur ses lèvres avec l’air de satisfaction d’un gourmet, je ne sais ce que c’est que le superlatif. Vous ne trouverez pas de pareil vin aux Trois-Grues, dans le Vintry {5}  ; et si vous en trouvez de meilleur, même aux Canaries ou à Xérès, je consens à ne toucher de ma vie ni pot ni argent. Levez votre verre entre vos yeux et le jour, et vous verrez les atomes s’agiter dans cette liqueur dorée comme la poussière dans un rayon de soleil ; mais j’aimerais mieux servir du vin à dix paysans qu’à un voyageur. J’espère que Votre Honneur le trouve bon ?
    – Il est propre et confortable, mon hôte ; mais, pour avoir d’excellent vin, il faut le boire sur le lieu même où croît la vigne. Croyez-moi, l’Espagnol est trop habile pour vous envoyer la quintessence de la grappe. Celui-ci, que vous regardez comme vin d’élite, ne passerait que pour de la piquette à la Groyne ou au Port Sainte-Marie. Il faut voyager, mon hôte, si vous voulez être profondément versé dans les mystères du flacon et du tonneau.
    – En vérité, signor hôte, si je ne voyageais que pour me trouver ensuite mécontent de ce que je puis avoir dans mon pays, il me semble que je ferais le voyage d’un fou ; et je vous assure qu’il y a plus d’un fou en état de flairer le bon vin sans être jamais sorti des brouillards de la vieille Angleterre. Ainsi donc grand merci toujours à mon coin du feu.
    – Ce n’est pas là penser noblement, mon hôte, et je garantis que tous vos concitoyens ne sont pas de votre avis. Je parie qu’il y a parmi vous des braves qui ont fait un voyage en Virginie, ou du moins une tournée dans les Pays-Bas. Allons, interrogez votre mémoire. N’avez-vous en pays étranger aucun ami dont vous seriez charmé d’avoir des nouvelles ?
    – Non, en vérité. Il n’en existe aucun depuis que cet écervelé de Robin de Drysandford s’est fait tuer au siège de la Brille. Au diable soit la coulevrine dont le boulet l’a emporté, car jamais meilleur vivant n’a rempli et vidé son verre du soir au lendemain. Mais il est mort, et je ne connais ni soldat ni voyageur dont je donnerais la pelure d’une pomme cuite.
    – Par ma foi, voilà qui est étrange. Quoi ! tandis qu’il y a tant de braves Anglais en pays étrangers, vous qui semblez être un homme comme il faut,
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