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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth
Autoren: Walter Scott
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total de sa carte, et il ne sait pas quand il partira. C’est un bijou qu’un tel hôte. Et moi, en vrai chien à pendre, je le laisse assis là-bas dans un coin, comme une brebis galeuse, sans lui faire la politesse de lui demander s’il veut souper ou boire un coup avec nous. Il ne me traiterait que comme je le mérite s’il s’en allait au Lièvre avant que la nuit soit plus avancée.
    Arrangeant avec grâce une serviette blanche sous son bras gauche, et tenant de la main droite son plus beau flacon d’argent, il ôta un instant son bonnet de velours, et s’avança vers l’individu solitaire dont il venait de parler, et sur qui les yeux de toute la compagnie se fixèrent à l’instant.
    C’était un homme de vingt-cinq à trente ans, d’une taille au-dessus de la moyenne, vêtu avec simplicité mais avec décence, ayant un air d’aisance qui tenait de la dignité, et qui semblait prouver que ses vêtemens n’étaient pas ceux qui auraient convenu à son rang. Il avait l’air pensif et réservé, les cheveux bruns, et des yeux noirs qui brillaient d’un éclat peu commun lorsqu’une vive émotion l’animait momentanément, mais qui, en toute autre occasion, annonçaient, comme tous ses autres traits, un homme tranquille et réfléchi. Les curieux du village avaient travaillé de leur mieux à découvrir son nom, sa qualité, et l’affaire qui l’avait amené à Cumnor, sans que rien eût transpiré qui pût les satisfaire. Giles Gosling, qui était le coq de l’endroit, zélé partisan de la reine Élisabeth et de la religion protestante, fut d’abord tenté de soupçonner son hôte d’être un jésuite, un prêtre, tel qu’il en venait alors un assez grand nombre de Rome et d’Espagne pour figurer sur un gibet en Angleterre ; mais il ne lui était guère possible de conserver une telle prévention contre un hôte qui donnait si peu d’embarras, qui payait son écot avec tant de régularité, et qui semblait se proposer de faire quelque séjour à l’auberge de l’ Ours-Noir .
    – Tous les papistes, pensa Giles Gosling, sont, unis comme les cinq doigts de la main. Si cet homme en était un, il aurait trouvé à se loger chez le riche squire de Bessellsley, ou chez le vieux chevalier à Wooton, ou dans quelque antre de leurs cavernes romaines, au lieu de venir dans une maison publique, en honnête homme et en bon chrétien. D’ailleurs, vendredi dernier, il mangea du bœuf aux carottes, quoiqu’il y eût sur la table des anguilles grillées aussi bonnes qu’on en pêcha jamais dans l’Isis {8} .
    L’honnête Giles Gosling, qui s’était convaincu par de semblables raisonnemens que son hôte n’était pas catholique, s’avança donc vers lui avec toute la courtoisie possible, et le pria de lui faire l’honneur de boire un verre de vin frais, et d’assister à une petite collation qu’il donnait à son neveu en l’honneur de son retour, et, comme il s’en flattait, de sa réformation. L’étranger fit d’abord un signe de tête comme pour refuser son invitation ; mais l’hôte insista en employant des argumens fondés sur l’honneur de sa maison et sur les soupçons que pourrait faire naître dans l’esprit des habitans de Cumnor une humeur si peu sociable.
    – Sur ma foi, monsieur, lui dit-il, il y va de mon honneur que chacun soit joyeux dans mon auberge. D’ailleurs, nous avons parmi nous, à Cumnor, de mauvaises langues ; et où n’y en a-t-il pas ? On n’y voit pas de bon œil les gens qui enfoncent leur chapeau sur leur front, comme s’ils regrettaient le temps passé, au lieu de jouir du bonheur que la faveur du ciel nous a accordé en nous donnant pour maîtresse la bonne reine Élisabeth, que Dieu bénisse et conserve.
    – Eh quoi, mon hôte ! répondit l’étranger, un homme doit-il paraître suspect parce qu’il se livre à ses pensées sous l’ombre de son bonnet ? Vous qui avez passé dans le monde deux fois autant de temps que moi, vous devez savoir qu’il existe certaines idées qui s’attachent à nous en dépit de nous-mêmes, et que c’est en vain qu’on se dit : Chassons-les, et soyons joyeux.
    – Sur ma foi ! si telles sont les pensées qui vous tourmentent l’esprit, et que le bon anglais ne suffise pas pour les faire déguerpir, je ferai venir d’Oxford un des élèves du père Bacon, qui les en chassera à force de logique et d’hébreu. Mais que n’essayez-vous plutôt de les noyer dans une mer de bon vin des
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