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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth
Autoren: Walter Scott
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de ce vaillant soldat, qui a peut-être gagné plus de coups que de couronnes dans les Pays-Bas. Ainsi donc, monsieur, comme je passais sous cette grande fenêtre, ayant laissé les rênes sur le cou de mon palefroi, tant pour être plus à l’aise qu’afin d’être plus libre pour regarder autour de moi, j’entendis ouvrir la croisée ; et ne me croyez jamais, monsieur, s’il n’est pas vrai que j’y vis la plus belle femme qui se fût jamais offerte à mes yeux. Or, je crois que j’ai vu autant de jolies filles que qui que ce soit, et je suis fait pour en juger aussi bien qu’un autre.
    – Pourriez-vous nous en faire la description ? demanda Tressilian.
    – Oh ! monsieur, je vous assure qu’elle était mise en femme comme il faut. Sa toilette était riche et recherchée, et aurait pu convenir à une reine. Sa robe, son corsage et ses manches étaient de satin couleur de gingembre ; à mon jugement, cette robe pouvait coûter trente shillings l’aune ; elle était doublée de taffetas moiré, et garnie de deux larges galons d’or et d’argent. Et son chapeau, monsieur, c’est ce que j’ai vu de meilleur goût dans nos environs ; il était de soie jaune, bordé d’une frange d’or avec une broderie de scorpions de Venise. Je vous assure, monsieur, qu’il était magnifique, et qu’il surpassait tout ce qu’on peut en dire. Quant au bas de sa robe, il était taillé à l’ancienne mode de Pas-devant .
    – Je ne vous demandais pas quel était son costume, dit Tressilian, qui avait montré quelque impatience pendant que le marchand entrait dans tous ces détails. Parlez-nous de son teint, de ses traits, de la couleur de ses cheveux.
    – Quant à son teint, je ne puis en rien dire de bien positif ; mais j’ai remarqué qu’elle tenait un éventail monté sur un manche d’ivoire curieusement damasquiné ; et, pour la couleur de ses cheveux, je puis vous garantir que, brune ou blonde, elle portait par-dessus un réseau de soie verte, tissé avec de l’or.
    – Voilà bien une mémoire de mercier, dit Lambourne. On lui demande des détails sur la figure d’une femme, et il vous parle de sa parure.
    – Je vous dis, répliqua Goldthred un peu déconcerté, que j’ai à peine eu le temps de la regarder ; car, comme j’allais lui souhaiter le bonjour en me préparant à un sourire…
    – Semblable à celui d’un singe qui convoite une châtaigne, dit Lambourne.
    – Tout-à-coup, continua le mercier sans s’inquiéter de cette interruption, Tony Foster parut lui-même, un bâton à la main…
    – J’espère, dit l’aubergiste, qu’il t’en fendit la tête pour te récompenser de ton impertinence.
    – Cela est plus facile à dire qu’à faire, répondit Goldthred d’un ton d’indignation. Non, non, il n’y eut rien de semblable. Il est vrai qu’il s’avança vers moi le bâton en l’air et qu’il me dit quelques gros mots, me demandant pourquoi je ne suivais pas la grande route, et d’autres choses semblables : de sorte que je me sentis tellement courroucé, que je lui aurais brisé le crâne du manche de mon fouet sans la présence de la dame, que je craignais de voir s’évanouir de frayeur.
    – Fi ! cœur de poule, fi ! dit Lambourne ; quel brave chevalier a jamais songé à la frayeur d’une dame quand, pour la délivrer, il va combattre en sa présence géant, magicien ou dragon ? Mais pourquoi parler de dragon à un homme qui se laisserait chasser par un hanneton ? Tu as manqué l’occasion la plus belle.
    – Eh bien, tâche d’en mieux profiter, fanfaron. Voilà le château enchanté ; le dragon et la dame sont à ton service, si tu oses t’y présenter.
    – Je le ferais pour une pinte de vin des Canaries. Mais un instant. J’ai besoin de linge : veux-tu gager une pièce de toile de Hollande contre ces cinq angelots d’or ? et demain matin je vais chez Tony Foster, et je le force à me présenter à sa belle.
    – J’accepte la gageure ; et, quoique tu aies l’impudence du diable, je réponds que je la gagnerai. Notre hôte gardera les enjeux, et je déposerai cinq angelots d’or entre ses mains, en attendant que je lui envoie la pièce de toile.
    – Je ne veux pas tenir les enjeux d’une telle gageure, dit Gosling. Mon neveu, buvez tranquillement votre vin, et ne cherchez pas de pareilles aventures. Je vous réponds, que M. Foster a assez de crédit pour vous faire recevoir au château d’Oxford, et décorer vos jambes
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