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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville
Autoren: Jean-Pierre Charland
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photographie permettait d'en juger. Elle ne semblait pas être une jeune femme susceptible de soulever les passions. Mais après dix ans dans la police, Gagnon savait que la passion se
    trouvait habituellement là où on ne s'attendait pas à la voir.
    L'enquêteur pouvait déjà formuler quelques hypothèses pour expliquer la disparition de Blanche. La première, la plus simple, était la plus plausible: lassée de vivre avec ses parents adoptifs, elle était partie. Elle pouvait se trouver chez un parent, une amie, ou encore avoir loué une chambre en ville. Peut-être avait-elle rencontré un homme avec qui aller vivre.
    Il allait explorer ces quelques pistes, en commençant par une visite chez son employeur, Jean-Baptiste Tremblay. Celui-ci tenait un commerce rue Saint-Joseph. En plus des journaux, du tabac et des articles pour fumeur, il offrait aux consommateurs un assortiment complet de cafés et de thés. Cela lui permettait d'attirer une clientèle aisée, au goût raffiné, ou désireuse de s'afficher comme telle.
    Quand le lieutenant Gagnon poussa la porte du commerce une demi-heure plus tard, il fut accueilli par une vendeuse plutôt gauche. Blanche se trouvait déjà remplacée. Il lui demanda de voir le patron. Celui-ci, un gros homme rougeaud, le fit passer dans l'arrière-boutique quand il sut qu'il était de la police.
    —    C'est bien votre employée, Blanche Girard ? demanda l'officier en lui mettant la photographie sous le nez.
    —    Oui. Enfin, il s'agit de mon ex-employée. Elle est absente depuis presque une semaine. Je l'ai justement remplacée ce matin. Il lui est arrivé quelque chose ?
    —    C'est ce que j'essaie de découvrir. Vous pouvez me dire quelle sorte de personne c'est?
    —    Oh ! Une fille timide, tranquille, honnête. Je n'ai jamais eu de problèmes avec elle. Je pouvais lui faire confiance.
    Le commerçant semblait sincère. La jeune fille devait être fort dévouée, pour mériter cette appréciation.
    —    Elle ne vous a pas averti qu'elle quittait son emploi ?
    —    Non, et cela m'a beaucoup surpris. Samedi, elle est partie avec le drap de la vitrine. Je mets une toile blanche pour montrer les pipes, les boîtes de cigares, ces choses-là, parce que cela fait plus propre. Donc elle est partie avec le drap qu'elle lavait tous les dimanches en me disant «à bientôt». Quand je suis arrivé lundi dernier, à onze heures, le magasin était toujours fermé. Elle s'occupait d'ouvrir certains matins. Je n'ai pas reçu un mot de sa part. Je me suis occupé du comptoir en plus de tout le reste pendant deux jours, en espérant la voir revenir. Mais, hier, j'ai décidé de la remplacer.
    —    Elle ne vous a pas dit qu'elle souhaitait quitter son emploi ?
    —    Non, pas un mot.
    L'homme affichait maintenant une mine inquiète.
    —    Cette jeune fille vous a déjà signifié qu'elle désirait fuir la maison ?
    —    Donc, elle n'est pas revenue chez elle ? Depuis quand ?
    Il attendit un moment, mais le policier semblait plus enclin à poser des questions qu'à répondre aux siennes. Il continua :
    —    Elle était malheureuse. Elle arrivait souvent les yeux rouges d'avoir pleuré. Je lui ai déjà dit de se chercher une chambre dans les environs, car Stadacona était trop loin. Mais elle répondait que c'était trop cher, que de toute façon elle voulait entrer chez les religieuses. Jamais elle n'a parlé de quitter son domicile autrement que pour évoquer son désir d'aller au couvent.
    —    Cette histoire de devenir religieuse, c'était sérieux ?
    Gagnon avait du mal à croire que Blanche avait fui la maison en catastrophe pour entrer en religion.
    —    Je ne sais pas, expliqua le commerçant. Elle était sûrement très religieuse, elle voyait le curé de sa paroisse au moins deux ou trois fois par semaine, mais j'ai toujours cru que c'était un rêve. Elle n'avait pas assez d'instruction pour enseigner ou s'occuper des malades.
    —    Savez-vous si elle voyait des garçons, sortait avec quelqu'un ?
    —    Je ne crois pas. Un gars est venu ici quelques fois pour lui parler, Grâce. C'était toujours pour l'avertir des heures de répétition de la chorale de la paroisse Saint-Roch, mais de ce côté-ci je n'entends pas toujours ce qui se discute dans le
    magasin.
    Lui non plus ne croyait pas à l'existence d'un «cavalier» susceptible de se transformer en concubin.
    —    Elle a des amies? Quelqu'un qui
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