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Grand-père

Grand-père

Titel: Grand-père
Autoren: Marina Picasso
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muse inconsolable, pendue au
plafond de son garage de Juan-les-Pins.
    Suicidée aussi Jacqueline, la compagne des derniers jours, morte
d’une balle dans la tempe.
    Et, plus tard, Dora Maar, morte dans la misère au milieu des
toiles de Picasso qu’elle refusait de vendre afin de garder pour elle seule la
présence de l’homme qu’elle idolâtrait.
    J’aurais dû, moi aussi, faire partie de ces victimes. Si je
suis encore là, je le dois à la rage de vivre et de lutter d’un grand-père dont
je rêvais…
    Et qui n’était pas là.

16
     
     
    Tout comme le marin après une vie de bourlingue, j’ai déposé
mon sac. Je ne veux plus le porter sur l’épaule. Il est beaucoup trop lourd. Trop
lourd et misérable.
    Assise  – et non plus allongée  – dans le bureau
de Duvanel, mon psychothérapeute, je peux enfin disposer de moi-même.
    Je suis Marina Picasso.
    — C’est bien, m’a simplement répondu l’analyste.
    Il a compris que j’étais prête à tourner une page.
    Une page sur la douleur.
     
    L’essentiel de ma vie est Gaël et Flore, ces enfants
auxquels je n’ai pu pleinement me consacrer durant mes « années noires ».
Je veux les retrouver, les apprendre, les aider à m’apprendre. Doucement, pas à
pas. Comme une convalescente.
    La Chine, l’Afrique, la Russie… Ensemble, nous découvrons le
monde et les images que nous prenons de plein fouet nous rapprochent, nous
unissent, nous confondent. Le bonheur qu’ils ressentent, le bonheur qu’ils m’apportent
aiguise mes sentiments de mère. Alors que, graduellement, je renais à ce monde,
mon désir d’avoir d’autres enfants se fait sentir en moi. Gaël et Flore
applaudissent à l’idée. Eux aussi ont envie d’agrandir la famille avec des
frères, des sœurs.
    — Et si tu en adoptais !
    — J’aimerais… si vous êtes d’accord.
    — Oui, nous sommes d’accord !
    Nous venons de sceller un pacte.
     
    Monique, la guide de l’agence Kuoni qui a organisé chacun de
nos voyages, est venue dîner à la maison accompagnée d’un ami vietnamien. Cet
ami, François, a fait toutes ses études en France et a toujours maintenu des
relations étroites avec son pays. Encouragée par sa gentillesse et la passion
avec laquelle il parle de son Viêt-nam, je lui dévoile mes projets d’adoption. Il
m’écoute, me sonde et m’explique  – après ce qui pourrait passer pour un
interrogatoire  – que, selon lui, je ne rencontrerais aucune difficulté si
je décidais d’adopter un enfant vietnamien.
    — Il y en a tant qui cherchent une famille. Il y en a
tant qui meurent…
    Il connaît à Hô Chi Minh-Ville une femme médecin à l’hôpital
pédiatrique Grall, l’ancien hôpital militaire français de Saigon. Il lui
parlera de moi.
    — Qui est-elle ?
    — M me  Hôa a consacré une partie de sa
fortune à aider les enfants défavorisés d’Hô Chi Minh-Ville. Elle a été
longtemps ministre de la Santé. Aujourd’hui, elle fait de la recherche et tente
d’améliorer les conditions de vie des filles et des garçons qu’elle soigne dans
son établissement.
    — Quand pourrais-je la voir ?
    — Je pars dans quelques jours. Dès mon retour, je vous
contacterai.
    Je n’ai plus qu’à attendre.
     
    M me  Hôa m’attend avec Gaël et Flore. Lorsque
François lui a fait part de ma requête, elle s’est aussitôt empressée de faire
toutes les démarches pour exaucer mon vœu. Elle a un nourrisson pour moi.
    Comme François, elle a fait ses études à Paris. Coïncidence
ou prémonition, le hasard a voulu qu’elle ait connu mon grand-père dans les
années cinquante. Tous deux appartenaient alors à la même cellule du Parti
communiste dans le XIII e arrondissement.
     
    Hô Chi Minh-Ville et son aéroport. La douane et ses
tracasseries. L’excitation de Gaël et de Flore. Mon impatience à moi. Bientôt, je
prendrai dans mes bras l’enfant que je souhaite tant, l’enfant de ma
résurrection.
    Il s’appellera Florian.
    Dans le minibus qui est venu nous chercher, nous découvrons
les rues, les maisons bigarrées, les échoppes des artisans, la foule affairée, les
couleurs, les odeurs : odeurs d’épices, de musc, de moiteur.
    Odeurs de paradis…
    Tout au bout de la ville, un bébé nous attend.
     
    La nursery de l’hôpital Grall vient de fermer ses portes. Pour
faire la connaissance de Florian, nous devrons revenir le lendemain matin. Je
suis désappointée. Une nuit est si longue quand on a si
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