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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages
Autoren: Paul C. Doherty
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    PROLOGUE
    Praeparetur animus contra omnia.
    Prépare ton âme à l’inattendu.
    Sénèque
    Des ombres, noires comme la poix, enveloppaient l’abbaye de St Martin-des-Marais, nichée dans les fens {1} du Lincolnshire. Un visiteur l’avait qualifiée de « joyau sur un coussin vert ». D’autres, qui avaient fait l’expérience des bourbiers marécageux, des traîtres chemins de traverse et des pièges cachés, disaient des fens que c’était un lieu maléfique. Un historien, jadis, avait parlé des marais trompeurs et des noues de cette région sauvage comme de « la sacristie de l’Enfer ». Bien entendu, l’abbaye de St Martin, fondée sous le règne d’Henri II, était un endroit consacré. Ses bâtiments, et les services divins qui s’y déroulaient, avaient repoussé en Enfer les démons censés rôder dans ce paysage désolé.
    St Martin était devenue une puissante abbaye : ses moines avaient drainé les terres, créé prairies, pâtures, labours, pêcheries, viviers, construit à grands frais leur église, les greniers, les communs, l’infirmerie, le scriptorium et la bibliothèque. Les domaines de l’abbaye touchaient ceux de la famille Harcourt. Sir Eustace Harcourt avait fondé St Martin après être rentré sain et sauf d’un pèlerinage outre-mer où il avait, pour prier au Saint-Sépulcre, survécu tant à la chaleur qu’aux infidèles.
    Sir Eustace avait fait fi des légendes prétendant que les fens étaient hantés par le fantôme de Sir Geoffrey Mandeville, un baron voleur qui, avec sa suite de larrons, avait harcelé les habitants, leurs villes et leurs villages et même pillé chapelles et églises. Mandeville était mort de malemort, mais, selon les habitants de la région, avait été condamné pour l’éternité à errer en ces lieux avec ses diables de compagnons. Nombreux étaient ceux qui prétendaient avoir entendu le martèlement des sabots de leurs chevaux et avoir entrevu des silhouettes vêtues de noir glisser dans la nuit. Le conte était intéressant, mais les bons frères de St Martin y accordaient peu de foi, jugeant ridicules ces histoires de cavaliers fantômes arborant des bannières rouge sang frappées d’un grand V noir en leur centre, l’écusson personnel, ou la livrée, du démoniaque Mandeville. Il est vrai que ceux parmi les moines dont l’ouïe était plus fine chuchotaient que, quelque temps auparavant, alors qu’ils étaient rassemblés de nuit dans le réfectoire, ils avaient entendu la sonnerie stridente d’un cor de chasse ; ils soutenaient aussi que quelques serviteurs de Lady Margaret Harcourt, quasiment recluse depuis la disparition de son époux, avaient ouï la même trompe de chasse. Sir Reginald, feu l’époux de Lady Margaret, et ses amis n’avaient-ils pas naguère, en guise de folle plaisanterie, galopé dans les fens en soufflant dans leurs cornes ? Ou était-ce quelqu’un d’autre qui était sorti la nuit pour jouer les cavaliers fantômes ? Peut-être, avaient-ils conclu, un paysan avait-il eu vent de cette fable et avait-il décidé de se livrer à ce tour puéril.
    Ces sornettes n’inquiétaient pas trop les bénédictins en bure noire de St Martin. Ils menaient une vie confortable et sereine derrière le haut mur d’enceinte, protégés par une armée de frères lais et de paysans rattachés au domaine, sans compter leur influent abbé Stephen, un ami personnel du roi. Sous sa férule, l’abbaye, patronnée à la fois par la Couronne et l’Église, s’était enrichie et avait gagné en influence. Le souverain et son entourage n’y séjournaient-ils pas quand, pieux pèlerins, ils se rendaient dans les comtés de l’Est ou quand ils se dirigeaient vers le Nord pour combattre les Écossais ? Les moines ne se préoccupaient que de leur maison, de leur règle et de la calme routine qui marquait leur vie ; ils estimaient que les fens sauvages et les horribles histoires qui s’y rattachaient n’étaient que contes de nourrice. Mais l’ermite aux cheveux gris qui habitait près des murs de l’abbaye avait une tout autre opinion. Peu de gens connaissaient son vrai nom. Il était là depuis des années et on lui avait attribué le titre de Gardien des portes. L’abbé Stephen l’avait autorisé à construire une petite chaumine, une hutte de branches entrelacées, qu’il nommait son « château des vents ». Le Gardien des portes était moins sceptique que les religieux. D’après ses dires, des démons,
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