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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages
Autoren: Paul C. Doherty
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je vois dans un miroir, confusément. » Il lui suffisait de regarder dans la glace pour se voir tel qu’il était, pour voir ce qu’il avait fait et comment il avait tenté de le dissimuler. Il ferma les yeux, mais ne put prier. Il soupira et se releva. Son attention fut alors arrêtée par le reflet des chandelles. Étaient-ce les feux follets annonciateurs de sa fin prochaine ? Étaient-ce de véritables reflets ? La légende disait-elle vrai ? Ces étranges lueurs, qui surgissaient sur les marais et les fens, s’étaient-elles rapprochées, ensorcelantes et menaçantes, au point de scintiller devant sa chambre ?
    Il retourna s’asseoir à sa table et prit une plume. Il voulait écrire et se changer les idées, mais il se sentait seul et avait peur. Il devait se concentrer ! Il griffonna la citation de Saint Paul, mais la mélangea avec une référence aux feux follets. Une phrase du philosophe Sénèque lui traversa l’esprit. Que disait-elle ? Ah oui, voilà : « N’importe qui peut ôter la vie à un homme, mais personne ne peut lui ôter sa mort. » Il rejeta sa plume. La brise nocturne faisait doucement vibrer les fenêtres. Il se prit le visage entre les mains et fixa d’un regard vide les ténèbres pendant que son âme s’enfonçait de plus en plus loin dans un marécage de désespoir.

 
    Chapitre 1
    Nil posse creari de nilo .
    Rien ne se crée à partir de rien.
    Lucrèce
    Le prieur Cuthbert avait transformé l’un des vestiaires, qui s’ouvrait sur le couloir de la sacristie, en chambre funéraire. Les murs de plâtre blanc étaient tendus de noir et d’or. De chaque côté du cercueil on avait placé trois grands chandeliers de cuivre garnis de cierges violets fabriqués tout spécialement par le ciergier de l’abbaye. Une énorme croix était fixée au mur. Les draperies qui couvraient le corps de l’abbé Stephen étaient brodées de fils d’argent et dessinaient un Christ délivrant les âmes des prophètes et des patriarches. En dépit de la saison avancée, on avait trouvé quelques fleurs qu’on avait disposées dans des vases d’argent aux quatre coins de la bière. Les braseros odorants parsemés de thym séché embaumaient l’air. Cuthbert était fier de ce qu’il était parvenu à réaliser depuis la mort de l’abbé, quatre jours auparavant.
    La dépouille avait été lavée, purifiée et préparée pour l’enterrement. Plus tard dans la journée, juste après midi, il célébrerait la grand-messe de requiem dans l’église abbatiale. Le prieur avait prévenu ses frères de s’abstenir de tout bavardage. On attendait un représentant du roi. Dès que le cadavre de l’abbé Stephen avait été découvert, un messager, empruntant deux des chevaux les plus rapides des écuries, avait galopé vers Norwich où le souverain et la Cour se trouvaient, en route vers les comtés de l’Est.
    Le prieur Cuthbert s’écarta pour permettre à ses visiteurs de s’approcher du cercueil. Il se sentait vraiment nerveux. Il s’était attendu à ce que le roi dépêche un comte ou l’un de ses principaux barons. À leur place étaient arrivés Sir Hugh Corbett, garde du Sceau privé du souverain, un homme de haute taille, à la peau mate et à l’air réservé, accompagné de son écuyer, Ranulf-atte-Newgate, le clerc de la Cire verte, roux de poil et anguleux de face, et de Chanson, ce curieux clerc des écuries avec sa tignasse en broussaille et son oeil torve. Ils portaient tous les trois des habits de voyage souillés, des cottes-hardies brunes et des chausses de même couleur enfoncées dans des bottes de cavalier en cuir d’Espagne aux talons hauts. Leurs éperons tintaient, et épées et dagues leur frappaient la cuisse. « Ce sont des soldats », pensa Cuthbert, bien qu’il émanât d’eux un air d’autorité et de menace discrètes : de Corbett, surtout, un bel homme rasé avec soin aux traits agréables, mais aux yeux profondément enfoncés et pensifs. Il parlait peu, mais paraissait écouter et surveiller tout ce qui se passait autour de lui. Il ne perdit pas de temps en cérémonies. A peine introduit dans les appartements privés du prieur, il montra son mandat cacheté du sceau royal et tendit la main pour exhiber l’anneau de la chancellerie blasonné aux armes d’Angleterre.
    — Nous attendions quelqu’un d’autre, murmura Cuthbert.
    Corbett délaça sa chape qu’il lança à Chanson. Ranulf l’imita et s’étira pour soulager les crampes
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