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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia
Autoren: Sara Poole
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ajouta :
    — Nous faisons tous des erreurs, Francesca, chacun d’entre nous. La seule chose, c’est d’éviter de les refaire encore et encore.
    — J’en suis incapable, répondis-je, non par modestie mais par sincérité. Je n’arrête pas d’en découvrir de nouvelles, tout le temps. Je soupçonne même d’avoir un don pour ça.
    Borgia éclata de rire.
    — Tu es encore jeune. Avec le temps, tu t’aguerriras.
    Il devait vraiment avoir foi en ses capacités, pour partir du principe que j’allais vivre, et même vieillir. Il ne me restait plus qu’à espérer qu’il ait raison. Peu après je pus disposer, ce dont je lui fus reconnaissante. L’angoisse quant à ce que me réservait mon avenir (aussi court fût-il) ne pouvait l’emporter sur l’épuisement, au bout d’un moment. J’avais traîné une paillasse de la chambre des assistants à la petite pièce du fond. Borgia m’ayant certifié que lui aussi allait se reposer, je me laissai tomber dessus et m’endormis presque instantanément.
    Je sombrai, jusqu’à ce qu’au cœur de la nuit je me réveille en sursaut, ne sachant plus où je me trouvais. Il me fallut un bon moment avant de comprendre, et une bouffée de peur monta alors en moi. Je cherchai à tâtons le large chapeau de feutre qui dissimulait mes cheveux, et avec lequel il était si incommode de dormir. Rassurée de le savoir toujours en place, je m’assoupis de nouveau mais dormis cette fois-ci d’un sommeil léger, car je n’arrivais à m’ôter de la tête la grande bataille que j’étais sur le point de livrer.
    Au deuxième matin, les affaires sérieuses commencèrent. Les marchands de ce monde se réjouiront de savoir que Dieu, apparemment, est l’un des leurs. Tout ce dont j’ai pu être témoin au conclave, qui m’évoquait un peu plus à chaque heure passée un bazar d’Orient, vient le confirmer. Si Dieu s’exprimait réellement à travers les princes de Son Église, alors Dieu était un barguigneur, un négociateur, un habile vendeur tout autant qu’un habile acheteur. Cette expérience m’a amenée à la conclusion que ce sont les marchands, et non les débonnaires, qui hériteront de cette Terre. Quant à ce qu’ils en feront ensuite…
    Ce jour-là se résuma à de discrètes conversations, des petits mots passés de main en main, des visites à la dérobée et des réunions en petit comité autour d’une fiasque de vin. En bref, une journée de sourires (froids pour la plupart), de mains serrées et d’apartés. Mais aussi une journée lors de laquelle d’immenses sommes d’argent et de vastes propriétés furent mises sur la table comme autant d’atouts dans une partie de cartes, et ramassées avec la même nonchalance par d’autres mains.
    Le soir arrivé, Borgia semblait satisfait, même s’il mangea peu et alla se coucher tôt.
    Le lendemain, le premier tour de scrutin eut lieu.
    Borgia perdit.
    Il bénéficia de sept voix, mais quatorze en tout revinrent à della Rovere et ses représentants. Personne n’ayant atteint la majorité des deux tiers, le conclave continua.
    Que dire du lendemain ? Vous parlerais-je de l’angoisse qui monta en moi à mesure que réunions et transactions se poursuivaient, ou bien du nombre de fois où je passai discrètement la tête par la porte de la suite de Borgia pour tenter d’évaluer ce qui se passait « au-dehors » ? Peut-être aimeriez-vous savoir qui je vis aller et venir entre les divers appartements : en règle générale, des assistants obligés de jouer aux messagers, mais aussi de temps à autre un cardinal en personne, rasant les murs en espérant ne pas être vu, ou au contraire paradant d’un air important au vu et au su de tous. Si je m’étais posé des questions en voyant la détermination de Borgia à amasser une si grande richesse en plus de celle qu’il possédait déjà, je comprenais à présent ce qui l’avait poussé à agir ainsi. Je pourrais vous faire l’inventaire des sommes exactes remises à tous ces princes de l’Église, mais leur vénalité étant notoire, cela me paraît sans intérêt.
    Je m’en tiendrai donc à dire qu’en quelques heures décisives, les très riches le devinrent davantage encore. Mais cela ne suffisait toujours pas, visiblement.
    Le deuxième tour de scrutin eut lieu au soir du troisième jour. Le décompte ne changea guère la donne, à part que Borgia avait gagné une voix. Les négociations se poursuivirent toute la nuit. Le bruit
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