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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France
Autoren: Robert Merle
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éclat ocre, si
gai sous le soleil, de la pierre du Périgord. Puissamment construit sur un roc
qui domine les lacis de la Dordogne, flanqué d’une grosse tour ronde, il parut
à nos deux Capitaines inexpugnable, sauf peut-être par une artillerie
nombreuse, mais qui aurait eu néanmoins le désavantage de tirer de bas en haut.
Ils notèrent, d’ailleurs, après avoir passé le pont-levis, deux ouvertures
garnies de couleuvrines qui, en croisant leurs feux, pouvaient contrebattre les
assaillants et leur faire beaucoup de mal.
    Les
deux visiteurs firent de grands compliments aux Caumont de ce château si neuf,
si magnifique, si bien pourvu en défenses, et d’où le regard portait si loin
sur la plaine de la Dordogne. Après ce début, que mon père n’était pas homme à
abréger, il y eut un grand échange de compliments, car François de Caumont, qui
s’était informé sur ses hôtes, les loua de la valeur extraordinaire qu’ils
avaient montrée au service du Roi. Ceci dut être dit dans le style ampoulé
qu’affectionnaient nos pères, et que certains d’entre nous retiennent encore,
mais que je trouve, pour moi, fort lassant, lui préférant le parler simple et
clair du paysan.
    François
de Caumont (son frère Geoffroy traversa avec moi des événements sanglants dont
c’est miracle si nous sortîmes) était petit mais râblé, la voix profonde, l’œil
luisant et attentif. À vingt-cinq ans, il avait la sagesse de l’âge mûr, pesant
tout, ne s’avançant qu’à pas comptés, et un pied déjà sur le recul.
    Quand
les compliments furent finis, François de Caumont, qui avait flairé dans ses
deux visiteurs des gens proches, comme lui, de la «  nouvelle
opinion » [5] , leur posa des questions adroites, et bien qu’ils répondissent d’une façon
très prudente, il vit bien qu’il ne se trompait pas. Il comprit alors tout le
poids que pourraient apporter à son parti des hommes de cette trempe, et
combien il était souhaitable d’aider à leur établissement.
    — Messieurs,
dit-il, vous ne sauriez mieux tomber. Dans huit jours, on vendra à Sarlat, à
chandelle éteinte, la châtellenie de Mespech, qui, encore qu’elle soit quelque
peu tombée en friche depuis la mort de son seigneur, compte de belles et bonnes
terres à labour, des prés très sains, et de beaux bois de châtaigniers. Le
Baron de Fontenac, dont le domaine jouxte Mespech, aimerait s’arrondir à peu de
frais en l’achetant, et il a tout fait pour en retarder la vente, dans
l’espérance que la châtellenie prenne si mauvaise mine qu’elle ne tenterait
plus personne. Mais enfin à Sarlat, on a voulu passer outre, dans l’intérêt des
héritiers, aux remuements de Fontenac et la vente à la criée se fera sans
rémission le lundi qui vient, à midi.
    — Monsieur
de Caumont, dit Jean de Sauveterre, le Baron de Fontenac est-il de vos amis ?
    — Point,
dit Caumont en baissant les yeux. Personne ici n’est l’ami de Fontenac et il
n’est l’ami de personne.
    Au
silence qui suivit, Sauveterre comprit qu’il y avait là-dessus trop à conter et
que Caumont préférait ne dire mot. Et Siorac s’en serait lui aussi avisé, si
n’était entrée dans la grande salle du château une gracieuse demoiselle qui
était vêtue d’une robe de matin très décolletée et dont les cheveux blonds
retombaient sur les épaules. Depuis qu’il avait commencé ses visites aux seigneurs
du Sarladais, Siorac avait vu tant de dames dont le col était emprisonné dans
des fraises sur lesquelles leur tête paraissait reposer comme sur un plat,
qu’il se réjouit fort de voir ce cou d’une blancheur succulente qui se pliait
de droite et de gauche avec la grâce d’un cygne, tandis que la demoiselle le
regardait de ses grands yeux bleus. Il y eut échange de saluts, et Sauveterre,
se rapprochant en boitant, aperçut sur cette gorge qui plaisait tant à Siorac
une médaille qui le fit sourciller.
    — Isabelle,
dit Caumont de sa voix profonde, est la fille de mon oncle, le Chevalier de
Caumont. Ma femme doit chambre garder, en raison d’un refroidissement du
cerveau, sans cela elle serait descendue pour honorer ses hôtes. Mais Isabelle
va la remplacer. Bien qu’elle ne soit pas sans biens, ma cousine Isabelle vit
avec nous pour notre très grand agrément, car elle est la perfection même,
reprit-il en jetant un coup d’œil à Siorac.
    Puis
il ajouta, d’un air de badinage, mais cette fois en regardant
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