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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France
Autoren: Robert Merle
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PRÉFACE
     
     
    J’ai
écrit la première ligne de Fortune de France le 24 mars 1976 et j’ai
tracé le dernier mot du sixième et dernier volume le 4 mars 1985, quelques
minutes avant que mon plus jeune fils m’appelât par téléphone à « la repue
de midi ».
    Je
pus alors me retourner pour embrasser du regard l’œuvre accomplie : neuf
années d’un labeur de bénédictin, de longues journées passées à la Bibliothèque
nationale, cinq heures d’écriture quotidienne, et surtout, acquise dès le
premier volume, conservée jusqu’au dernier, et à ce jour multipliée, la faveur
du public.
    Au
bonheur d’avoir terminé ma tâche s’ajouta pour moi l’inouï plaisir de l’arrêter
sur un de ces rares moments de l’Histoire de l’homme où la justice et
l’humanité triomphent de l’intolérance : l’année 1599, la dernière année
du XVI e siècle, mais
aussi celle qui vit l’enregistrement de l’Édit de Nantes par le Parlement de
Paris.
    Voici
ce qu’en dit alors La Surie, le fidèle compagnon du marquis de Siorac, dans le
dernier volume de la série :
    «
— Ha mon Pierre ! Que je me sens heureux d’être vif, sain et gaillard
en cette année-ci, la dernière du siècle ! Assurément, il n’est pas donné
à tout un chacun de voir finir un siècle ! Et de le voir finir si bien, et
par la mort du despote qui entendait écraser l’Europe sous la tyrannie de
l’Inquisition [1] ,
et par un Édit qui accorde la liberté de conscience et de culte aux huguenots.
Ventre Saint-Antoine, mon Pierre ! Il faut boire à cette nouveauté sans
précédent dans l’histoire du monde : l’obligation faite par un grand roi à
deux religions de vivre côte à côte dans un même pays sans se déchirer. »
    J’ai
connu un temps où l’Histoire était devenue en France à l’école primaire une
matière facultative, abandonnée à la bonne volonté de l’instituteur, qui
l’enseignait ou ne l’enseignait point, selon ses compétences. J’ai connu un
autre temps, où la Nouvelle Histoire  – l’étude des faits de
société aux différentes époques  – ayant supplanté l’Histoire
chronologique, les écoliers, gorgés de faits intéressants, ne savaient plus
à quelles dates les accrocher ni sous quels règnes les situer.
    Cette
querelle-là, à laquelle je ne fus pas mêlé, m’apparut très caractéristique,
comme bien d’autres, de l’esprit de système des Français et de leur penchant à
se diviser en sectes. Quant à moi, dans Fortune de France, j’ai mélangé
tout à fait innocemment la Nouvelle Histoire et l’Histoire
chronologique, le roman historique ne se pouvant passer, de toute évidence,
ni des dates ni des faits de société.
    La
tradition du roman historique à laquelle je me rattache est celle de Flaubert
dans Salammbô, et aussi, mais je dirai plus loin pourquoi et dans quelle
mesure, celle de Thackeray dans Henry Esmond, et non à celle de Dumas,
de Hugo [2] et de Vigny  – grands auteurs, certes, auxquels je dois aussi ajouter
Michelet, lequel dans son Histoire de France, a écrit plus d’une
brillante page qu’aucun document connu ne vient corroborer.
    Vigny,
dans la préface de son Cinq-Mars, n’a pas craint de faire la théorie de
ce dangereux survol du passé : il oppose la vérité de l’Art au vrai du fait, et préfère hautement la première au second.
« L’Art », écrit-il avec un flegme parfait, « ne doit jamais
être considéré que dans ses rapports avec la beauté idéale. Il faut le
dire : ce qu’il y a de vrai n’est que secondaire. »
    À
suivre cette méthode, on peut aller très loin. Et par exemple, prendre comme
héros une pauvre tête folle comme Cinq-Mars, traître à son roi et à son pays,
vouer en revanche aux gémonies le plus grand homme d’État du temps et puisqu’on
est en si bon chemin, faire vivre le père Joseph quatre ans après sa mort.
    La
critique que l’on peut faire de la Salammbô de Flaubert (et que Flaubert
s’est adressée tout le premier) est que le piédestal est trop grand pour la
statue, l’auteur s’intéressant davantage à ses mercenaires qu’à l’héroïne du
titre. En revanche, l’érudition historique sur laquelle le roman repose, et que
Sainte-Beuve attaqua avec une fielleuse incompétence, s’est avérée tout à fait
sans failles [3] .
Et c’est sur ces solides fondations que Flaubert a construit son superbe livre.
Preuve, s’il en était besoin, que la vérité de
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