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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution
Autoren: Christopher John Sansom
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mourir de faim ses frères. Il est mort peu après.
    — Que Dieu donne la paix à son âme torturée ! »
Le frère Guy se tut et me regarda d’un air hésitant. « Savez-vous ce qui est
advenu de la main du bon larron ? On l’a emportée quand on a emmené Jérôme.
    — Non. J’imagine qu’on a enlevé les pierres précieuses
et fondu le reliquaire. La main elle-même aura sans doute été déjà brûlée.
    — C’était réellement la main du larron, vous savez. Les
preuves sont très solides.
    — Croyez-vous toujours qu’elle pouvait accomplir des
miracles ? »
    Il ne répondit pas, et nous continuâmes à avancer en silence
pendant quelques instants, pénétrant dans le cimetière des moines où les
ouvriers enlevaient les stèles. Dans le cimetière laïque les tombeaux familiaux
avaient été brisés et réduits à des amas de pierres.
    « Dites-moi, finis-je par dire, qu’est-il advenu de l’abbé
Fabian ? Je sais qu’il n’a pas reçu une pension d’abbé puisqu’il n’a pas
signé l’acte de soumission. »
    Guy secoua tristement la tête.
    « Sa sœur l’a recueilli. Elle est couturière en ville. Il
ne va pas mieux. Certains jours, il parle d’aller chasser ou de rendre visite
aux hobereaux du coin sur leur vieille haridelle ; elle doit alors l’empêcher
de sortir vêtu des misérables habits qui lui restent désormais. Je lui ai
prescrit certains médicaments, mais ils n’ont aucun effet. Il a perdu la tête.
    — “Les puissants sont tombés bien bas !” », citai-je.
    Je me rendis compte qu’inconsciemment je nous avais conduits
vers le verger. Plus loin se dressait le mur de derrière du monastère. Je m’arrêtai,
une sensation de malaise au creux de l’estomac.
    « Voulez-vous qu’on rentre ? demanda Guy d’une voix
douce.
    — Non. Continuons ! »
    Nous marchâmes jusqu’au portail. J’avais un trousseau de
clefs et nous sortîmes de l’enceinte. Sous nos yeux s’étirait le lugubre
paysage. Les eaux de novembre s’étaient dès longtemps retirées et les marais n’étaient
plus qu’une étendue brune et silencieuse, des bouquets de roseaux oscillant
tranquillement dans le vent, leur image reflétée par les mares stagnantes. Des
oiseaux de mer se balançaient sur la rivière enflée, le vent marin ébouriffant
leurs plumes.
    « Ils m’apparaissent en rêve, Mark et Alice, murmurai-je.
Je les vois se débattre dans l’eau, perdre pied, appeler à l’aide. Il m’arrive
de me réveiller en hurlant. » Ma voix se brisa. « De manières
différentes, je les aimais tous les deux. »
    Le frère Guy me regarda un long moment, puis plongea la main
dans son habit. Il me donna un feuillet plié, très froissé.
    « J’ai beaucoup réfléchi à l’opportunité de vous le
montrer. Je me demandais si le lire ne vous ferait pas davantage de mal.
    — Qu’est-ce que c’est ?
    — Je l’ai trouvé il y a un mois sur le bureau de mon
dispensaire, en revenant d’accomplir mes diverses tâches. Je pense qu’un
contrebandier a graissé la patte d’un des ouvriers de Copynger pour qu’il le
laisse là à mon intention. Il vient d’elle, mais c’est lui qui l’a écrit. »
    J’ouvris la lettre et reconnus l’écriture ronde et nette de
Mark Poer.
     
    Frère Guy,
    J’ai demandé à Mark d’écrire ce mot à ma place car son
écriture est plus lisible que la mienne. Je l’envoie par un homme de la ville
qui vient parfois en France. Il vaut mieux que vous ne sachiez pas qui c’est.
    Veuillez me pardonner de vous écrire. Mark et moi sommes en
sûreté en France, mais je ne dirai pas où. Je ne sais pas comment ce soir-là
nous avons réussi à nous tirer de ce bourbier. À un moment, Mark est tombé
dedans et j’ai dû l’en extirper, mais nous avons fini par rejoindre l’embarcation.
    Nous nous sommes mariés le mois dernier. Mark connaît un peu
le français et il fait de si rapides progrès que nous espérons qu’il pourra
obtenir un poste d’employé de bureau dans la petite ville où nous vivons. Nous
sommes heureux et je commence à ressentir une paix que je n’ai pas connue
depuis la mort de mon cousin, bien que je ne sache pas si, par les temps qui
courent, le monde nous laissera tranquilles.
    Quoique cela vous soit sûrement égal, monsieur, je tiens à
vous dire que j’étais malheureuse d’avoir à vous tromper, vous qui m’avez
protégée et tant appris. Ça me peine, mais je ne regrette pas d’avoir tué
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