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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution
Autoren: Christopher John Sansom
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allez-vous ? Il fait plus
beau que lors de votre dernier séjour en ces lieux, n’est-ce pas ?
    — En effet. On est presque au printemps, bien que le
vent qui souffle de la mer soit très froid. Comment trouvez-vous la maison
abbatiale ?
    — J’y ai emménagé avec grand plaisir. L’abbé Fabian l’avait
fort bien entretenue. Quand le monastère aura été détruit, je jouirai d’une
belle vue sur la Manche. » Il fit un geste vers le cimetière des moines où
des ouvriers étaient en train de déterrer les stèles. « Vous voyez, je
fais installer là un enclos pour mes chevaux. J’ai acheté toute l’écurie des
moines à un bon prix.
    — J’espère que vous n’employez pas à cette tâche des
hommes des Augmentations, sir Gilbert », dis-je en souriant. Copynger
avait été anobli à Noël. Le roi l’avait lui-même adoubé chevalier en touchant
son épaule d’une épée. Plus que jamais Cromwell avait besoin d’hommes liges
dans les comtés.
    « Non, non. Ce sont mes ouvriers. Je les paie de ma
propre poche. » Il me regarda avec hauteur. « Je regrette que vous n’ayez
pas souhaité habiter chez moi pendant votre séjour ici.
    — Ce lieu évoque pour moi de trop mauvais souvenirs. Je
suis mieux en ville. J’espère que vous comprendrez.
    — Fort bien, monsieur, fort bien. » Il hocha la
tête d’un air condescendant. « Mais j’espère que vous dînerez avec moi
plus tard. J’aimerais vous montrer les plans dressés par mon architecte que
voici. Une fois démolis les bâtiments principaux, nous allons transformer
quelques-unes des dépendances en bergeries. Ce sera un beau spectacle, hein ?
Plus que quelques jours à attendre.
    — En effet. Veuillez m’excuser, je vous prie… » Je
m’inclinai et m’éloignai, m’emmitouflant dans mon manteau pour me protéger du
vent.
    Je pénétrai dans le cloître. Le sol de la galerie était
souillé d’innombrables traces de bottes boueuses. L’inspecteur des
Augmentations s’était solennellement installé dans le réfectoire où, en un flot
ininterrompu, ses hommes lui apportaient vaisselle, statues dorées, croix en or
et tapisseries, chapes et aubes, et même la literie des moines… Tout ce qui
pouvait avoir de la valeur en vue de la vente aux enchères devant se tenir le
surlendemain.
    Le dos devant un feu flambant, messire William Glench trônait
dans un réfectoire vidé de ses meubles mais plein de caisses et de coffres. Il
discutait un élément de son volumineux registre avec un secrétaire. C’était un
homme tatillon, grand et mince, portant lunettes. Durant l’hiver, les
Augmentations avaient recruté une flopée de quidams de son acabit. Je me
présentai. Il se leva et s’inclina, après avoir marqué avec soin l’endroit où
il s’était arrêté dans son livre.
    « Tout semble très bien organisé », dis-je.
    Il se rengorgea.
    « Tout est inscrit, monsieur, jusqu’à la moindre
casserole et marmite des cuisines. » L’espace d’un instant, il me rappela
Edwig. Je réprimai un frisson.
    « Je vois qu’on s’apprête à brûler les livres de la
bibliothèque. Est-ce nécessaire ? Ne pourraient-ils avoir quelque valeur ? »
    Il secoua vigoureusement la tête.
    « Non, monsieur. Tous les livres doivent être détruits. Ce
sont des instruments du culte papiste. Pas un seul n’est écrit dans notre
honnête langue anglaise. »
    J’allai ouvrir un coffre au hasard. Il était bourré d’ornements
d’église. Je soulevai un calice en or joliment sculpté. C’était l’un des deux
qu’Edwig avait jetés dans l’étang avec le corps d’Orpheline pour faire croire
que la voleuse s’était enfuie. Je le fis pivoter dans mes mains.
    « Ces objets ne sont pas à vendre, dit Glench. Tout l’or
et l’argent doit être transporté à la Tour pour être fondu. Sir Gilbert a
essayé d’en acheter certains. Il trouve qu’il s’agit d’un beau travail et c’est
peut-être vrai, mais ce sont des hochets utilisés dans les momeries papistes. Il
devrait le savoir.
    — Oui, en effet. » Je remis le calice dans le
coffre.
    Deux hommes ayant apporté un gros panier d’osier, le
secrétaire commença d’empiler des soutanes sur la table.
    « On aurait dû les nettoyer, déclara-t-il d’un ton
irrité. On en aurait tiré davantage. »
    Je sentais Glench impatient de se remettre au travail.
    « Je vous quitte. Prenez garde à ne rien oublier ! »
ajoutai-je, jouissant brièvement de son
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