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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution
Autoren: Christopher John Sansom
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d’une
cloche, et instinctivement je les lançai autour de celle-ci, m’accrochant à la
surface de métal, enfonçant mes ongles dans le creux des ornements. Cela
ralentit ma chute, mais j’avais les mains moites de sueur et je me sentis
glisser vers le bas.
    Mon pied heurta alors quelque chose et je m’immobilisai. Je m’aplatis
contre la cloche et réussis tout juste à nouer mes doigts autour d’elle. Jetant
un bref coup d’œil vers le bas, je compris que mon pied s’était posé sur l’antique
plaque de la vieille cloche espagnole. Je me cramponnais avec l’énergie du
désespoir.
    Puis je sentis bouger la cloche. Mon poids la faisait
osciller. Elle cogna contre la cloche voisine, provoquant un carillon
assourdissant dans le beffroi au moment où le choc violent menaçait de me faire
lâcher prise. La cloche revint en arrière, moi agrippé dessus comme une moule à
son rocher. J’aperçus Edwig qui, tout en me jetant des regards noirs, se
dégageait de ses sacs et se penchait pour ramasser les pièces tombées par terre.
Il savait que je ne pouvais rester dans cette position que quelques instants de
plus. Je percevais un faible bruit de voix tout en bas. La foule avait dû se
précipiter dans l’église en entendant le carillon inattendu. Je n’osai pas
regarder en bas. La cloche se balança à nouveau et cogna encore une fois contre
la plus proche. Cette fois-ci, toutes les autres s’entrechoquèrent, produisant
un vacarme qui semblait capable de me crever le tympan. À cause des vibrations
de la cloche qui s’ensuivirent, mes mains commencèrent à s’écarter l’une de l’autre.
    J’accomplis alors l’acte le plus désespéré de ma vie. Je
tentai l’opération uniquement parce que je savais que c’était ça ou la mort
certaine. D’un seul coup, je laissai mes mains se séparer, puis tournoyai dans
l’air, utilisant la plaque sous mon pied comme tremplin pour me propulser en
direction du garde-fou. Je recommandai mon âme à Dieu, sûr que ce serait ma
dernière pensée sur terre.
    Mon estomac heurta la rambarde. Le souffle coupé, mes mains
serrant frénétiquement la partie intérieure du garde-fou secoué par le choc, je
me hissai par-dessus, sans que je sache comment aujourd’hui. Je me retrouvai
affalé par terre, le dos et les bras en capilotade. De l’autre côté du local, agenouillé,
une poignée de pièces dans la main, Edwig me fixait d’un air à la fois furieux
et perplexe, pendant que les cloches sonnaient à toute volée en faisant
trembler le plancher.
    Il fut tout de suite sur pied, s’empara de ses sacoches de
cuir et se précipita vers la porte. Je me jetai sur lui, cherchant à atteindre
ses yeux. Il se dégagea d’un mouvement brusque mais le poids des sacoches lui
fit perdre l’équilibre. Il chancela et heurta le garde-fou comme moi quelques
instants auparavant. Le choc lui fit lâcher ses sacoches qui basculèrent
par-dessus le bord. Poussant un cri, il se pencha en avant pour saisir la corde
qui les attachait ensemble. Il réussit à l’attraper, mais le geste le
déséquilibra. Un instant il resta aplati contre le garde-fou, et je crois que
si seulement il avait renoncé à l’or il aurait pu s’en tirer, mais il ne lâcha
pas prise. Le poids des sacs l’entraîna et il tomba la tête la première, rebondissant
sur le flanc d’une cloche avant de disparaître, hurlant de terreur et de rage, comme
si au moment de rendre l’âme il savait qu’il devrait se présenter devant son
créateur avant d’avoir pu faire sa grande offrande. Je me précipitai vers la
rambarde et vis qu’il tournoyait toujours dans les airs, sa soutane gonflant
autour de lui, accompagné d’une forte pluie de pièces s’échappant des sacoches.
Prise de panique, la foule s’enfuit au moment où il s’écrasa sur le sol au
milieu d’un jaillissement de sang et d’or.
    Je m’appuyai sur la rambarde, haletant et couvert de sueur, tandis
que la foule revenait lentement vers lui. Certains baissaient les yeux vers les
restes de l’économe, d’autres levaient la tête vers l’endroit où je me trouvais.
Je fus écœuré de voir des moines et des serviteurs se mettre à quatre pattes et
se mouvoir en tout sens pour ramasser des poignées de pièces.

ÉPILOGUE
FÉVRIER 1538 TROIS MOIS PLUS
TARD
     
    Tandis que je pénétrais dans la cour du monastère, je vis que
les grosses cloches avaient été descendues du beffroi, réduites en morceaux en
vue d’être fondues,
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