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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales
Autoren: Robert Merle
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des populations occupées des Pays-Bas. Et ce fut en raison de cette popularité que, lorsque son mari mourut, le gouvernement de Madrid fit d'elle le gouverneur de la province conquise.
    J'ai eu le privilège de voir souvent l'Infante Claire-IsabelleEugénie (que j'aime la douce sonorité de ses prénoms!) quand Louis m'envoya à Bruxelles pour persuader Gaston de revenir en France. L'Infante le poussait aussi dans ce sens, non qu'elle ne l'aim‚t point, tout le rebours. Elle était de lui raffolée, pour la raison qu'il lui rappelait, par sa gaieté, ses saillies et son enjouement, l'aimable Cour de Valois qui avait fait le bonheur de ses enfances. Il est vrai que Gaston lui cachait ses frasques.
    Elle ne les aurait pas souffertes, étant si pieuse. quand je l'ai encontrée, l'Infante avait soixante-six ans. Je ne sus que penser d'elle de prime, car je la vis vêtue de l'habit des clarisses de Saint-François, sans néanmoins faire partie de cet ordre. Le lecteur (pardon, belle lectrice, de m'adresser aussi à lui, je ne voudrais pas qu'il se croie délaissé) n'ignore pas que je fais une grande différence entre les pieux et les dévots. Je respecte fort les pieux quand ils appliquent en leur vie les préceptes sacrés - comme Schomberg ou comme Louis (encore que Louis, à mon humble sentiment, pourrait encore progresser quelque peu dans les voies de la mansuétude) -, mais je déteste comme peste les dévots comme Marillac et Bérulle. Ce sont hommes de pouvoir qui ne rêvent qu'à régner afin d'éradiquer les protestants par le fer et le feu. Ce ne sont pas là mes évangiles...
    quand je vis pour la première fois à Bruxelles, pour la 432
    mission que j'ai dite, l'Infante Claire-Isabelle-Eugénie, elle avait soixante-six ans, et il ne me fallut que quelques mots et quelques regards pour que je découvrisse en elle la vieille dame la plus adorable de la création. Le temps - le temps inéluctable - qui creuse, affaisse et déforme les faces les plus belles, l'avait touchée d'une aile légère, la vieillissant sans l'enlaidir. Son visage reflétait une douceur telle et si grande qu'aucune fillette fraîchement éclose n'aurait pu l'égaler. Alors que sur les vieux visages les peines de la vie ont laissé à l'ordinaire des traces de tristesse et d'amertume, le sien était lisse et serein, et ses yeux mordorés ne reflétaient que douceur et tendresse pour les gens qui l'entouraient.
    Le fait qu'elle port‚t l'habit des clarisses ne l'empêchait point d'avoir le cheveu testonné en boucles bien faites, le visage discrètement pimploché, le sourcil et les cils soulignés d'un trait léger, et de reluire des pieds à la tête d'une propreté méticuleuse. Elle parlait d'une voix basse, douce et mélodieuse: un enchantement chez une femme.
    Il me parut évident que Gaston avait trouvé là une nouvelle mère, infiniment plus aimante et aimée que la sienne. Je ne voudrais pas qu'on s'y tromp‚t. Le fait que la reine-mère le préférait à son frère aîné -
    surtout pour la raison qu'avec Gaston, qui n'était pas le roi, elle n'avait pas de conflit de pouvoir - ne voulait pas dire qu'elle l'aim‚t plus que ne le pouvaient son coeur dur, son caractère escalabreux, ses bouderies infinies, et ses stupides entêtements.
    qui e˚t cru que la piété de l'Infante causerait un jour sa mort ? En novembre 1633, alors qu'elle était déjà toussante et mal allante, elle voulut de force forcée, et maugré l'avis de son médecin, suivre une procession. Elle y prit froid et mourut le deux décembre 1633.
    Les Belges se désolèrent de cette perte, se doutant bien que le successeur espagnol n'aurait pas d'aussi bonnes dispositions à leur égard que la mezza francese. Mais plus que tous, Gaston la pleura. Il s'était filialement ococoulé dans la tendresse de l'Infante et il perdait une mère infiniment plus aimante que la sienne. quand le nouveau gouverneur des 433
    Pays-Bas, El Marqués d'Aytona, arriva à Bruxelles, Gaston, rien qu'à le voir, sentit qu'il se trouvait meshui beaucoup plus proche de l'Enfer que du Paradis.
    El Marqués d'Aytona était un de ces hidalgos roides, rudes et infiniment hautains qui considéraient que si le Seigneur avait choisi de donner à
    l'Espagne l'or des Amériques, c'était pour qu'elle fond‚t en Europe, avec l'aide des Habsbourg d'Autriche, une royauté universelle qui, en les rendant maîtres des Pays-Bas, de l'Italie, de la France, de l'Angleterre et des princes luthériens
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