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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2
Autoren: Alain Decaux
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dimension exceptionnelle, pesant mille cinq cent soixante grammes.
     
    — Il faut qu’il parle !
    Il s’agit de l’assassin et c’est le cri général à Mexico. Comme celui du monde entier.
    Jacson affirme qu’il s’appelle Jacques Mornard, qu’il est citoyen belge, fils d’un ministre plénipotentiaire, qu’il est né à Téhéran et qu’il a été élève à l’École militaire de Dixmude. Il va être confondu par le ministre de Belgique qui lui pose des questions simples sur Dixmude auxquelles il ne peut répondre. La police découvre que le passeport au nom de Jacson est en fait celui d’un Canadien tué en Espagne pendant la guerre civile. Elle ne peut que poser la question : par quelle filière le passeport d’un ancien membre des Brigades internationales est-il venu entre les mains de Mornard ?
    L’enquête n’ira pas plus loin. On n’a rien pu tirer de Sylvia Agelof, littéralement effondrée. Il est évident que la malheureuse n’est pas une complice du faux Jacson, mais qu’elle en a été la victime. Sur l’assassin, on a trouvé une lettre exposant les motifs de son acte. Il déclare qu’il était lui-même trotskiste mais que, dès qu’il a rencontré son idole, il a éprouvé une déception immense. Ce qu’il n’a pu supporter, c’est d’entendre Trotski lui proposer une mission secrète en URSS au cours de laquelle il lui eût fallu assassiner plusieurs dirigeants, dont Staline. Il a estimé que Trotski avait dupé ses partisans et que, de ce fait, il devait mourir.
    « Jacson » sera jugé et condamné à vingt ans de prison. Il les accomplira sans jamais rien révéler sur sa personnalité ni sur ceux qui l’avaient fait agir.
    Vingt ans au fond d’une prison. Vingt ans sans parler.
     
    Le 13 mai 1960, Ramon Mercader, alias Mornard, alias Jacson, est libéré. Un avion l’emporte à Cuba. De là, il s’envole pour la Tchécoslovaquie puis pour Moscou où, à peine arrivé, il se voit décerner la médaille d’or de héros de l’Union soviétique.
    On veut croire que l’une de ses premières pensées aura été pour les deux hommes qui lui avaient ordonné de tuer Trotski et qui, de ce fait, avaient si profondément modifié son destin : Soudoplatov et Eitingon. Il n’a pas dû chercher longtemps leur adresse : après la mort de Staline, Soudoplatov, accusé d’être le complice de Beria, a été jeté en prison. Il s’y trouve toujours et ne sera libéré qu’après plus de quinze ans de captivité, le 21 août 1968. Eitingon ? En prison, lui aussi. Il ne sera libéré qu’en 1964.
    Une photographie nous montre Ramon Mercader, en janvier 1962, à Moscou. Visage devenu rond sous une casquette de bon faiseur, lunettes sans monture, stature confortable, veste légère jetée sur une chemise à carreaux, sacoche en bandoulière, il ressemble à un touriste américain.
    Il ne quittera Moscou que pour regagner Cuba où Fidel Castro l’a appelé aux fonctions de conseiller au ministère des Affaires intérieures. Il mourra à La Havane le 18 octobre 1968. Son corps sera rapatrié à Moscou. Le KGB ayant décidé que les obsèques ne bénéficieraient d’aucune publicité, seul Eitingon pourra y assister.
    On oubliera de prévenir Soudoplatov.
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