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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge
Autoren: Charles Dickens
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reste de ses
gens avait été laissé à Londres et devait venir le lendemain. Il
arriva que, ce même soir, un vieux gentleman qui demeurait à
Chigwell-row, où il avait longtemps vécu pauvrement, décéda, et que
je reçus à minuit et demi l'ordre d'aller sonner le glas des
trépassés. »
    Il y eut ici dans le petit groupe des
auditeurs un mouvement qui indiqua d'une manière sensible la forte
répugnance que chacun d'entre eux aurait éprouvée à sortir à
pareille heure pour une pareille commission. Le sacristain
s'aperçut de ce mouvement, le comprit et développa son thème en
conséquence.
    « Oui, ce n'était pas gai, allez ;
d'autant plus que, comme le fossoyeur était alité, à force d'avoir
travaillé dans un sol malsain, et pour s'être assis en prenant son
repas sur la pierre froide d'une tombe, il me fallait absolument
aller seul, car une heure si avancée ne me laissait pas l'espoir de
trouver quelque autre compagnon. J'étais cependant un peu préparé à
cela ; le vieux gentleman avait souvent demandé que l'on
tintât la cloche le plus tôt possible après son dernier
soupir ; et depuis quelques jours on s'attendait à le voir
passer d'un moment à l'autre. Je fis donc contre fortune bon cœur,
et, bien emmitouflé, car c'était par un froid mortel, je m’élançai
dehors, tenant d'une main ma lanterne allumée et de l'autre la clef
de l'église.
    À cet endroit du récit, le vêtement de
l'étranger rendit un froissement, comme s'il se fût tourné pour
entendre d'une manière plus distincte. Regardant avec dédain
par-dessus son épaule, Salomon haussa les sourcils, inclina la
tête, et fit l'œil à Joe pour savoir si en effet le monsieur se
dérangeait pour écouter. Joe, ombrageant ses yeux avec sa main,
sonda l'encoignure ; mais, ne pouvant rien découvrir, il
secoua la tête comme pour dire non.
    « C'était précisément une nuit telle que
celle-ci. L'ouragan sifflait, il pleuvait à torrents, le ciel était
plus noir que je ne l'ai jamais vu, ni avant ni depuis. C'est
peut-être une idée ; mais les maisons étaient toutes bien
closes, les gens étaient chez eux, et il n'y a peut-être que moi
qui sache réellement combien il faisait noir. J'entrai dans
l'église, j'attachai la porte en arrière avec la chaîne, de sorte
qu'elle restât entrebâillée : car, pour dire la vérité, je
n'aurais pas voulu être enfermé là tout seul, et, posant ma
lanterne sur le siège de pierre, dans le petit coin où est la corde
de la cloche, je m'assis à côté pour moucher la chandelle.
    « Je m'assis pour moucher la chandelle,
et, quand j'eus fini de la moucher, je ne pus point me résoudre à
me lever et à me mettre à l'ouvrage. Je ne sais pas comment cela se
fit, mais je pensais à toutes les histoires de fantômes que j'avais
entendu raconter, même à celles que j'avais entendu raconter quand
j'étais petit garçon à l'école, et que j'avais oubliées depuis
longtemps, et notez bien qu'elles ne me revenaient pas à l'esprit
une à une, mais toutes à la fois, et comme en bloc.
    « Je me rappelai une histoire de notre
village, comme quoi il y avait une certaine nuit dans l'année (rien
ne me disait que ce ne fût pas cette nuit-là même), où tous les
morts sortaient de terre et s'asseyaient au chevet de leurs propres
fosses jusqu'au matin. Cela me fit songer combien de gens que
j'avais connus étaient enterrés entre la porte de l'église et la
porte du cimetière, et quelle chose effroyable ce serait que
d'avoir à passer au milieu d'eux et de les reconnaître, malgré
leurs figures terreuses, et quoique si différents d'eux-mêmes. Je
connaissais depuis mon enfance toutes les niches et tous les
arceaux de l'église ; cependant je ne pouvais me persuader que
ce fût leur ombre que je voyais sur les dalles, mais j'étais
convaincu qu'il y avait là une foule de laides figures qui se
cachaient parmi ces ombres pour m'épier. Dans le cours de mes
réflexions, je commençai à penser au vieux gentleman qui venait de
mourir, et j'aurais juré, lorsque je regardais en haut le noir
sanctuaire, que je le voyais à sa place accoutumée, s'enveloppant
de son linceul, et frissonnant comme s'il eût senti froid. Tout ce
temps, je restai assis écoutant, écoutant toujours, et n'osant
presque pas respirer. À la fin je me levai brusquement et je pris
dans mes mains la corde de la cloche. Au moment même sonna, non pas
cette cloche, car j'avais à peine touché la corde, mais
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